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 case#001 cold, cold heart

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Alastair K. Russo
mount everest ain't got sh*t on me
Alastair K. Russo
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#  case#001 cold, cold heart EmptySam 25 Mar - 11:52
tw violence, sang


Archibald & Alastair
case#001 cold, cold heart


Pas mal de pression au taf en ce moment, et c'était limite un comble parce qu'en temps normal je réclamais que ça. Ça me manquait souvent, l'effervescence de l'anti-terroriste. C'était toujours pas assez d'étincelles, on va pas se mentir, mais c'était quand même bien mieux que la section des crimes organisés, où j'évoluais entouré de mous du bulbe qui avaient la fâcheuse tendance de jouer sur mes nerfs. L'abonnement à la salle de boxe avait été une première solution, sacrifier une infime partie de mon généreux salaire s'avérant finalement un sacrement nécessaire. Puis, ça n'avait plus tout à fait suffi. Chaque coup dans un sac me donnait envie d'un autre coup dans un être humain. C'était pas tout à fait glorieux, pas tout à fait quelque chose que j'aurais pu avouer à qui que ce soit non plus ; mais ça tombait bien, je vivais dans un isolement choisi et serein. La nuit était tombée comme un drap de satin, enveloppant la ville entière avec elle, et j'avais eu l'envie de sortir, l'envie de me défouler un peu. Si ça pouvait m'éviter de choper une autre série de séances chez le Docteur Armstrong, c'était toujours ça de pris. Alors j'avais démarré ma sportive, clope au bec, m'étais garé dans les quartiers sud, clope au bec, et m'étais pointé devant l'une des adresses dont j'avais le secret bien gardé, un message, un destinataire inconnu, sans doute un type à moustache grasse. Cigarette à moitié fumée mais entièrement écrasée, cendres noires qui s'effondrent dans le gobelet à l'entrée, tâché de jaune sans qu'on puisse vraiment savoir ce qui s'était passé dedans ; mais je m'en foutais pas mal, c'était définitivement pas une planque du crime organisé, et même si c'était le cas, j'étais pas en train de travailler. Je n'aimais pas suffisamment mon boulot pour pouvoir m'y consacrer sur les quelques heures que j'avais soutiré à mon planning professionnel, ce foutu agenda rayé de gris rempli de rendez-vous, de séances chez la psy, et de dates butoirs pour la rédaction de ces comptes-rendus qui ne rendaient définitivement pas justice à ma plume. Stendhal aurait été fou de devoir abréger tant de mots, de devoir écrire autant de conneries quand généralement ça pouvait se limiter à une phrase ; agent FBI gentil a attrapé méchant. Parfois, ça dérive, il l'attrape et lui soutire des infos confidentielles, ou un membre carrément. Mais ça valait toujours un bon d'achat pour une série de séances chez un psy assermenté.

Pas beaucoup de souvenirs du moment où j'étais rentré dans le vif du club nocturne, pas non plus de sourire cynique quand je m'étais retrouvé entouré de muscles bandés et huilés, de lampions rouges, de fumée de cigarette - et j'étais déjà à pas grand-chose de m'en rallumer une. Combats clandestins, les lumières basses sauf sur les rings improvisés, mais c'était pas non plus la mort parce que j'y participais pas tant que ça. Au début, j'avais découvert cet univers en tant que spectateur, à deux doigts de l'orgasme quand je voyais des mecs se défoncer la gueule mutuellement. Puis, comme souvent, je m'étais lassé. Parce que ça allait pas assez vite. Parce qu'ils cognaient pas assez fort. Mais je ne pouvais pas monter sur le ring, c'était impossible, on aurait pu me reconnaître, et j'étais prêt à beaucoup de choses, mais pas à m'infliger une nouvelle salve de psychanalyse. Alors j'avais trouvé une autre technique, un truc courant qu'un mec m'avait soufflé un coup, entre trois clopes, entre cinq combats. Parfois, les vrais rounds se jouaient dans l'ombre, quand tout était terminé, sur le parking. Là, les types qui s'étaient mis minables toute la soirée, à grand renforts de surconsommation de tise ou d'herbes, s'amusaient à se latter un peu plus. Et c'était le truc idéal. Il suffisait d'attendre deux heures, de se perdre dans la foule, puis après on pouvait facilement se laisser aller sur le parking, s'allumer une énième cigarette, les regarder tous se défoncer. De temps en temps, j'y allais, avec mon air d'empereur - et quel empereur j'étais face à tous ces rats d'égout qui ne m'inspiraient que le dégoût -, ça les faisait presque instantanément vriller. Jamais le premier coup porté, je les laissais viser la mâchoire, la serrais suffisamment pour amortir le choc. Jamais trop mal, ou en tout cas jamais assez. Et puis après je me déchaînais. Laissais ses potes arriver, reprenais les salves. Tout ce qui comptait, c'était de frapper, pendant une longue dizaine de minutes, en savourant l'adrénaline, en savourant le goût et l'odeur du sang. Et après, je me tirais. Je ne laissais jamais un type salement abîmé, pas spécialement envie qu'un idiot qui se sente pousser des ailes se rende au comico du coin pour venir demander mon nom avec à l'appui les vidéos de surveillance.

De retour en voiture, ce soir-là, j'avais l'arcade salement abîmée, le bras dans un piteux état, une cuisse qui me faisait souffrir - un rapide moment d'inattention m'avait valu une chute et quelques coups de pieds - et l'envie de fumer une dix-septième cigarette dans la soirée. Le tabac n'arrangeait aucune douleur, mais au moins ça occupait mes pensées. Même route que d'habitude. Les mêmes portes, la même secrétaire - j'aurais presque pu établir un planning, Dottie le lundi avec ses cheveux blonds arctiques, Roberta le vendredi avec son accent chantant et ses grands sourires. "Je veux voir Robinson." Hochement de tête, elles avaient toutes l'habitude, savaient que dans tous les cas je ne bougerais pas un seul orteil tant que je n'aurais pas eu ce que je voulais, gamin capricieux sans doute, mais bien avisé parce que tu étais le seul dont je puisse éviter les questions et à qui je n'en ai aucune à poser. La confiance médicale, sans aucun doute. Ou un manque flagrant d'intérêt pour tout ce qui aurait pu se passer dans ta vie. Annie du mercredi et Dottie du lundi avaient chacune le bon sens de m'escorter vers un bureau - est-ce que c'était le tien ? est-ce que c'était une salle de consultation ? je n'en avais pas grand-chose à faire, tout ce qui comptait c'était que tu sois là -, franchissant d'innombrables couloirs comme si les malades et les mourants n'avaient pas autre chose à foutre que se perdre dans un dédale aux odeurs d'hospice. "Merci, Dottie." Pas besoin de taper à ta porte, pas grand-chose à foutre non plus du secret médical, je l'ouvre, m'immisce dans la pièce, t'es tout seul comme prévu, et t'aurais jamais osé me mettre dehors dans tous les cas. "Salut. Arcade, bras droit, cuisse gauche." Le doigt qui se dresse sur la ligne de ma mâchoire. "Et ça, aussi. Si t'as de la glace pour faire dégonfler." Pas un merci, le diagnostic dévoilé en mode Cluedo, les phalanges qui désignent les zones du corps endolories les unes après les autres. Pas de formalités entre nous ; on se "connaît" depuis suffisamment longtemps.
AVENGEDINCHAINS
Archibald Robinson
Land of the living
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Archibald Robinson
#  case#001 cold, cold heart EmptyLun 27 Mar - 18:18

Archibald & Alastair
case#001 cold, cold heart


Longue nuit. Longue journée. Longue semaine. Longue vie, probablement, aussi. Tout s’enchaînait comme d’habitude, patient après patient, dossier après dossier, parce qu’il n’y avait visiblement plus que ça dans ma vie. Ça, le regret, et mon chien. L’arrivée de Blue avait apporté un vent de fraîcheur sur mon quotidien morne, m’obligeait à ne plus m’enfermer complètement à l’hôpital, à prendre un peu de temps pour moi, qui était au fond du temps pour lui. Ses promenades au parc me faisaient prendre l’air, mes séances de sport avaient été remplacées par de la course à pied, la boule de poil se pressant à mes côtés, langue pendante, presque comme le sourire aux lèvres. Son arrivée avait été salvatrice, m’empêchait de m’envoyer une bouteille entière de rhum quand je me savais en congés le lendemain, me donnait une raison de pas trop broyer de noir quand les choses n’allaient pas. C’était un farceur, le genre de chien qui aime aller chercher la balle mais pas la rendre une fois devant vos pieds, qui n’a pas trop conscience de sa place dans l’espace et se cogne sans arrêt... Pile le genre d’énergie dont j’avais besoin, qui me fait un bien fou. Pour autant, il n’a pas tout arrangé et certains moments sont encore bien difficiles. Comme aujourd’hui, par exemple. Pourquoi ? Aucune idée. Il y a juste des jours sans. Ou des semaines. J’ai un peu l’impression que j’ai des années sans, depuis assez longtemps maintenant. Mais certains jours sont pires que d’autres. Probablement à cause de la fatigue, ou du nombre de patients que j’avais dû voir ces derniers temps. Parce que je m’en imposais toujours plus, des cas toujours plus compliqués, certains qu’aucun autre chirurgien de ma spécialité n’aurait ne serait-ce qu’envisagé de traiter. Je n’y pouvais rien, j’étais accro. Accro au scalpel, à l’adrénaline, à la sensation du devoir accompli, aux larmes de joie dans les yeux de l’entourage, à la fierté dans ceux des patients. J’aimais tout ça, j’était presque sûr d’en crever quand on ne me jugerait plus apte à pratiquer. Sauf que forcément, ça finissait par me rattraper. Fatigue physique, musculaire, mentale aussi, parce qu’on ne pouvait pas sauver tout le monde, et que même si mon taux de réussite était dans les plus élevés de l’hôpital, il n’était pas parfait. Alors parfois je m’imposais des gardes plus longues, comme aujourd’hui. Presque quarante-huit heures que j’étais debout, chose que j’avais appris à faire dès l’internat, qu’on n’imposait heureusement plus aux jeunes médecins aujourd’hui. Café, boissons énergisantes, siestes de dix minutes, tout ce que j’interdisais à mes patients, en somme. Mais ça me permettait d’opérer huit, dix, douze heures d’affilée, puis de faire quelques consultations, retourner au bloc, attraper un trauma au vol, me lancer sur un cas imprévu... Avant de m’avouer vaincu, tirer ma révérence pour la nuit, un peu avant l’arrivée d’Apollon et de son char qui viendrait tous nous éblouir et me faire tout recommencer. Pas de vrai repas avalé depuis hier, mon estomac commençait à gronder, à me dire que je devrais m’arrêter dans un diner pour quelques gaufres, ou bien me contenter des restes probablement peu ragoûtants qui se trouvaient dans mon frigo. Mouais... Pas très tentant. Blue avait été sorti par ma voisine, mais il voudrait très probablement aller courir un peu, je ne reprendrais mon poste qu’à la mi-journée, enchaînerait une nuit, et puis prendrais un jour de repos. Oui, c’était plutôt un bon planning. Du moins... Jusqu’à ton arrivée. Bip de l’accueil, un code reconnaissable entre tous, puisqu’il n’était adressé qu’à moi et dans une situation bien particulière. Yeux levés au ciel, soupir, blouse remise sur mes épaules alors que je venais de l’enlever. Et puis talons tournés, direction prise d’une salle de consultation, toujours la même. Adossé au mur, bras croisés en attendant ton arrivée, bâillement. Moins de cinq minutes avant de te voir débarquer, toujours aussi poli. Pas de coups frappés, à peine un bonjour, mais ce n’était pas comme si je n’y étais pas habitué. On se pratiquait depuis des années, toi et moi. À force, je savais. Ça se passait toujours de la même façon. T’entrais, tu me disais ce qui allait pas, je te réparais, et tu te cassais comme t’étais venu. Signe de tête pour te dire de te mettre sur le lit, puis j’avance vers toi, fais glisser la table à roulettes sur laquelle se trouve de quoi te rafistoler la tronche, une fois de plus. Grimace et langue qui claque contre mon palais.

« Tu pues la clope. »

Pas vraiment un jugement, plutôt un constat. Encore une fois, j’y suis habitué. Je ne sais pas ce que tu fais pour te mettre dans ce genre d’état, je crois que je n’en ai pas grand-chose à faire. Probablement le seul patient auquel je ne m’intéresse pas réellement. Probablement le seul aussi qui ne m’aie jamais confié quoi que ce soit sur lui. J’aimais écouter les histoires de ceux que je traitais, leur poser des questions, en apprendre plus. Pas avec toi. Peut-être parce que toi tu ne le voulais pas, que je détestais franchir les limites. Limites complètement bousillées entre nous, mais pas sur le plan de la discussion. Examen rapide, lumière dans les yeux pour vérifier qu’il n’y a pas de traumatisme, crâne soigneusement analysé, puis je te tends une poche de glace.

« Enlève tes fringues, mets ça sur ta mâchoire. »

Ça aidera à faire dégonfler au moins le temps que je te traite. Tu t’exécutes, me laisse voir l’étendue des dégâts, envisager le traitement. Quand ça ne touchait pas au cœur, j’étais moins performant. Tu le savais, mais visiblement tu t’en foutais. Tu m’avais connu interne, touche-à-tout, pas encore tombé amoureux des battements de cet organe merveilleux. Bras et cuisse visibles, légère grimace. Tu n’y étais pas allé de main morte.

« La cuisse, c’est juste un hématome. Le bras, c’est une autre histoire. Y’a une plaie, et si je te connaissais pas je te dirais d’immobiliser au minimum quatre jours, attelle, pommade cicatrisante. J’imagine que c’est non. Je vais pas suturer, c’est pas assez profond, mais il faut que je désinfecte. »

Toujours l’habitude de détailler chacun de mes mouvements, le genre de médecin qui n’aimait pas prendre les gens par surprise, faire le mauvais geste, perdre la confiance établie. Silence en réponse, ce n’est pas comme si j’étais habitué à de grands discours de ta part. Je me mets à l’ouvrage, commence par poser un autre sac de glace mais sur ta cuisse, puis désinfecte ton bras, pose des stéri-strips pour faire tenir la peau et qu’elle cicatrise plus rapidement, avant de me pencher sur ton arcade. C’est loin d’être beau à voir, tes collègues feront une sacré tête en te voyant demain. Enfin, j’imagine. Ce n’est pas la première fois que tu te fais péter la gueule à ce point, donc peut-être que comme moi, ils y sont habitués. Je n’en sais rien. Fil et aiguille en main, je fais au mieux pour ne laisser aucune cicatrice, après avoir bien désinfecté le tout. Concentré sur ma tâche pour éviter de me laisser distraire par les images qui m’envahissent l’esprit, souvenirs de cette même salle habitée de bruits bien différents, bien plus reconnaissables aussi. Les protagonistes n’étaient pourtant pas différents, mais l’histoire n’avait pas vraiment été la même...

AVENGEDINCHAINS
Alastair K. Russo
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Alastair K. Russo
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#  case#001 cold, cold heart EmptyLun 27 Mar - 19:45

Archibald & Alastair
case#001 cold, cold heart


Ce que j'aimais bien, dans l'administration hospitalière, c'est que toutes les secrétaires de l'accueil avaient fini par abdiquer, par arrêter de lutter quand je réclamais ton nom à l'entrée. Je ne savais même pas si tu connaissais le mien ; je ne me souvenais pas te l'avoir donné, mais je n'étais pour ainsi dire pas toujours au meilleur de ma forme quand je venais te voir. Et pour cause, quand tout allait bien, je n'avais pas besoin de m'imposer les longs couloirs jusqu'à ton bureau, ni ton regard scrutateur, ni même tes remarques incessantes sur ma consommation de clopes. "Je ne pensais pas que t'étais devenu cancérologue." Les yeux au ciel que je réprime aussi fort que possible parce que je veux pas que ça devienne une joute, sinon tu vas en rajouter, ça n'aura pas de fin. Pas du tout envie de passer la soirée avec toi. Ni avec personne d'autre d'ailleurs. J'avais eu ma dose d'humains ; les tout mous au bureau, les survoltés en marchant dans les voitures, les plus dociles et utiles s'avérant quand même être ceux qui traînaient à la sortie des clubs clandestins, attendaient pour taper - ou se faire taper, chacun ses fantasmes. Quelques coups assénés et je me sentais déjà prêt à attaquer une nouvelle semaine. Peut-être même que je n'allais pas être obligé d'en trouver un autre à provoquer pour mieux le fracasser. "Je me parfume pas pour toi dans tous les cas, Robinson. Contente toi de faire ton taf." ... et de la mettre en mode silencieux, mais ça je ne pouvais pas tout à fait le dire, pour tout un tas de raisons très différentes. Déjà, parce que tu pouvais te vexer, même si c'était pas trop ton genre. Mais je ne voulais pas prendre le risque de me retrouver avec un médecin scrupuleux qui se serait mis en tête que j'étais en danger. Ni prendre le risque de devenir ledit danger pour ledit médecin scrupuleux. Non, avec toi, c'était silence, quelques remarques agaçantes, et une fois seulement des gémissements qui avaient au moins eu le mérite de te la mettre définitivement en veilleuse. Une autre raison, c'était aussi que t'étais quand même franchement le meilleur médecin que j'ai croisé, que t'avais réparé quelques plaies bien sales sans vraiment sourciller, et que même sans savoir ce que tu faisais vraiment dans la vie, je savais que t'étais doué. Bien plus doué que tous les médecins du FBI, bien plus doué que la quiche de psy que je devais me coltiner aussi, puisque t'arrivais parfois à me faire sourire. C'était très rare, très subtil, mais t'étais bien le seul à y arriver, ce qui était... Rassurant. J'obtempère à tes ordres, me défais des vêtements superflus, les accroche sur le porte-manteau à côté de ce qui doit être le manteau d'un médecin qui l'a oublié ou qui n'a pas su déverrouiller son casier tout bien ordonné, tout bien ridicule, ce matin. Puis, je me laisse retomber sur le lit d'hôpital, grimace quand tu me mets ta lumière d'examen encore dans les yeux. "Je crois pas t'avoir dit que j'ai mal à l'oeil. J'ai pas besoin de lunettes, t'es pas ophtalmo, range ça." Je sais que ça fait partie de tes coutumes, sans doute de toutes tes étapes obligatoires avant de soigner un type ; mais je me passe bien de toutes les manches habituelles, j'ai un peu plus mal que d'ordinaire et je ne veux pas que ça se voit dans les prochains jours.

Tu t'attardes sur mes jambes, pendant deux secondes ça me rappelle encore l'image surprenante des coups qu'elles donnaient aux tiennes au fur et à mesure que je t'avais pris, dans ce même bureau, il y a... Des mois, maintenant. Un seul écart de comportement, le premier de la décennie, et j'avais décidé d'enfouir tout ça très loin, parce que je pouvais pas me permettre d'admettre que ça avait fait du bien, que j'avais mieux géré les jours suivants. C'était pas toi, ça pouvait pas être toi, c'était juste une décharge d'hormones, c'était finalement que de la chimie et tout s'expliquait scientifiquement. T'avais à peine abordé le sujet une fois, et puis nos regards s'étaient parés du même noir, signifiant que cette nuit-là était très loin, et que c'était qu'une erreur de parcours. Je n'aimais pas ces erreurs, toi tu y semblais abonné ; sinon, ça aurait fait bien longtemps que tu m'aurais envoyé paître sans prendre la peine de me soigner avec toute l'attention du monde. Tes mains sur ma jambe piquent et caressent en même temps, et c'est vraiment pas agréable. Je préfère un bon coup de poing dans la mâchoire, ça au moins j'y suis préparé, c'est franc, c'est brutal, c'est pas une dizaine de fourmis qui s'amusent à dessiner des formes dans ma chair. "T'as tout compris. C'est non. Je reprends demain, c'est pas négociable." Fin sourire. C'est pour ça que je t'aime bien quand même. Parce que t'arrives à capter très vite que tu ne me feras pas plier, que même si tu m'avais arrêté, j'aurais trouvé un moyen de m'échapper pour pouvoir bosser. Pas par passion pour le crime organisé, non ça je crois qu'on a bien établi que c'était sacrément merdique, mais pour pas tourner en rond avec toutes mes idées noires, pour pas déclencher un tsunami dans les rues de Los Angeles, et pour surtout pas devoir m'occuper en allant rendre visite à Raegan tous les jours. Hors de question d'être faible devant ou avec lui. Légers tremblements du muscle quand le désinfectant brûle la plaie ; ouais, c'est toujours pas super agréable. Je veux pas que tu m'entendes pester, alors je mords très fort mes lèvres, jusqu'à les sentir exploser aussi, me laissant un goût métallique dans la bouche. Tant pis. C'est pas une blessure profonde, celle là je m'en occuperais. Pas besoin que t'y mette tes doigts. Ton visage par-dessus ma cuisse me rappelle des souvenirs agités, je secoue la tête, tente de pas trop me laisser influencer parce que tu remarquerais vite mon malaise, ton nez à dix centimètres de mes sous-vêtements plissés entre mes poings. "T'as bientôt fini ?" Heureusement, tu finis vite ton truc - enfin, je pense, j'ai pas fait médecine et j'ai juste envie de me barrer -, je me redresse, récupère mes couches de tissus sombres. "Tu veux quoi, cette fois ?" Parce que t'avais jamais accepté mes pourboires, parce que je comptais là-dessus pour m'assurer que tu continuerais à pas l'ouvrir et à t'occuper de moi. Alors je préférais te devoir des faveurs, tu osais rarement les réclamer et c'était très bien. Pas en arrière, mes yeux plongés dans les tiens en attendant que tu te décides à me répondre. La porte qui s'ouvre, rapide regard et... Merde. "Okay, je ne peux pas sortir. J'ai des collègues à côté." Je ne sais même pas si tu soupçonnes mon travail, je pense que t'as dû me poser la question et que j'avais répondu une connerie du genre mascotte de street fighter, ou vendeur de glaces pour enfant. Un truc crédible et un truc pas du tout, c'était la méthode pour faire douter et manipuler l'adversaire. T'étais pas vraiment un adversaire, plutôt un allié, et ça me faisait mal à la tête de l'admettre. "T'avais pas prévu de partir tout de suite dans tous les cas." C'est pas une question, pas une supposition, à moitié entre l'ordre et l'affirmation. Autre technique de manipulation, mais celle-là aussi tu passais à travers. Je reste appuyé à la porte, tenté de siffloter avant de me rappeler que ça m'aurait juste donné envie de me gifler pour me taire - à défaut que mon père puisse le faire lui-même, puisque c'était sa spécialité.
AVENGEDINCHAINS
Archibald Robinson
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Archibald Robinson
#  case#001 cold, cold heart EmptyLun 27 Mar - 20:19

Archibald & Alastair
case#001 cold, cold heart


Une remarque et te voilà déjà énervé, ce que ça peut me gaver tout ça. Si t’aimais pas ma tronche, t’avais qu’à arrêter de venir me faire chier, ça nous soulagerait tous les deux. Ce n’était pas comme si on se devait quoi que ce soit, ou comme si ça me plaisait de repasser côté internat alors que j’avais fait mes preuves depuis bien longtemps. Faire de la bobologie pour un mec qui se comportait comme un connard, ce n’était pas vraiment pour ça que j’avais signé. Pourtant, je venais toujours. Ce même code, cette même sale, ce même air à la con sur tes traits, c’était la routine. Routine bizarre, routine dont je ne parlais jamais à personne, routine quand même. Pas de réponse à ta pique, à quoi ça servirait ? Soupir en t’entendant dire que tu ne te parfumes pas pour moi, parce que ça n’a clairement rien à voir avec ce que j’ai dit, que t’as l’air de chercher la petite bête pour me faire vriller, ou pour vriller toi-même, je n’en sais rien. Tu m’agaçais autant que tu m’intriguais, probablement pour ça que je revenais comme un boomerang. Pourtant après plus de dix ans à te connaître, je n’avais rien appris de franchement extraordinaire, tout comme tu savais à peu près rien et demi sur moi. Tout ce que je savais, c’était que t’avais probablement un boulot de terrain, genre vigile, militaire, ou flic – parce que j’avais enlevé une balle de ta chair une fois et que ça avait pas eu l’air de t’émouvoir plus que ça – que ton nom de famille était Russo – signé sur les papiers, la première fois que t’étais venu, papiers que je t’avais plus jamais fait signer depuis – et que tes coups de reins étaient plutôt agréables. Rien de plus, rien de moins. On continuait ce jeu bizarre, ces échanges qui n’en étaient pas, ces piques froides et mes tentatives de discussions. À force, je m’embêtais plus, n’attendais plus que tu me répondes. Pourtant parfois, comme ce soir, tu me surprenais.

« Ouais bah quand tu seras médecin et que tu te soigneras toi-même tu décideras de la marche à suivre. Pour l’instant tu viens me voir, tu te plies aux règles. »

Je n’aimais pas ce ton que j’adoptais avec toi, loin de celui toujours doux et rassurant que j’offrais dans les couloirs et les chambres de l’hôpital. Sûrement parce que contrairement aux autres, y’avait aucune peur dans tes yeux. Aucune émotion, au fond, d’ailleurs. Sauf peut-être cette fois-là, quand le désir avait agrandi nos pupilles au même moment. Il y avait de la colère, de la haine, qui se mélangeaient au reste, deux paires d’yeux mais les mêmes émotions, les mêmes sentiments. Moment de faiblesse, d’égarement, qui m’avait poussé à aller courir deux heures de plus que d’habitude le lendemain, à vouloir t’évacuer de sous ma peau. Parce que je n’aimais pas ça, je n’aimais pas coucher avec n’importe qui, juste comme ça. Je m’étais senti con, irresponsable que ce soit arrivé ici... Quand tu étais revenu la fois d’après, je t’avais détesté. Un peu. Et puis c’était parti, j’avais retrouvé la neutralité que j’ai toujours éprouvé en te voyant. Le détachement. Un patient parmi d’autres, même si pas tout à fait pareil que qui que ce soit d’autre. Soupir.

« Je te parle pas d’arrêter le travail, mais d’immobiliser ton bras pour que la putain de plaie se ferme et parce que t’as probablement une fracture légère. Tu changes le pansement demain, manches longues pour le tenir en place, mais pas trop serrées ou tu vas couper le flux sanguin. »

Je termine de traiter, installe des pansements, vérifie mes sutures... Et grogne.

« Non mais sérieusement ? »

Tu t’es défoncé la lèvre alors qu’elle ne l’était pas y’a une minute et j’ai envie de hurler. Mais ce n’est pas mon problème.

« Mets de la glace quand t’arrives chez toi, ce que tu t’infliges à toi-même j’en ai un peu rien à foutre. »

Faux, parce que chaque chose douloureuse m’inquiète, déformation professionnelle qui ne me quitte jamais. Tu me demandes ce que je veux, je lève les yeux au ciel en rangeant les fils et la gaze.

« Un gros bisou et une tape sur l’épaule. Va te faire. »

Ce n’est pas comme si j’avais besoin de quoi que ce soit. Je ne te traite pas de façon tout à fait légale ou déontologique, je déteste les arrangements financiers pas nets, ne suis pas non plus fan des cadeaux. Je te l’ai dit, te l’ai répété, ce que tu as à m’offrir ne m’intéresse pas. Tu me proposes des services, me dis que tu me le revaudras, en général, mais je ne te demande jamais rien, parce que je n’en ai pas besoin. Et puis j’entends la porte qui s’ouvre, se referme aussitôt, ta voix qui s’élève. Je te lance un regard après avoir tout rangé dans les tiroirs adéquats, fermés à clé. Tu reprends, je grogne. Ben oui, bien sûr, ma vie ne tourne qu’autour de toi et de tes petits bobos.

« Oh ben oui, ça ne fait que quarante-huit heures que je suis là à opérer des gens. C’est vrai que j’ai que ça à foutre d’attendre tranquillement que les flics au bout du couloir s’en aillent. »

J’enlève ma blouse, détache mes manchettes et remonte les manches de ma chemise. Rapide coup d’œil vers ma montre, soupir avant que je ne passe une main sur mon visage, retrouve tes yeux.

« Quarante secondes, pas plus. Après ça je me casse. J’ai pas mangé depuis... Je sais pas quand. Donc tes petits problèmes de collègues crois-moi bien que ça m’intéresse pas trop-trop. »

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#  case#001 cold, cold heart EmptyLun 27 Mar - 21:15

Archibald & Alastair
case#001 cold, cold heart


L'envie de répéter tes exacts mots sur l'immobilisation nécessaire de mon bras, en adoptant un ton enfantin et en tirant la langue me traverse l'esprit pendant quelques secondes. Pas envie de me tourner en ridicule, et une nouvelle fois, pas du tout l'envie de te laisser croire que tu peux me répondre et avoir de l'influence sur mes décisions ou sur le cours de ma soirée. Je n'avais pas du tout envie non plus de te donner plus d'informations sur ce à quoi ressemblait mon quotidien, alors je m'étais contenté de rester muet, de pas te révéler que non, je ne pouvais pas tout à fait me permettre d'avoir un bras immobilisé si je voulais travailler, parce que ça pénalisait à la fois les tâches de bureau que j'exécrais, et que ça me mettait d'office de côté pour les trop rares interventions ; je n'étais déjà pas en tête de liste dès que le chef faisait ses rangs pour un déploiement sur le terrain, depuis le malheureux petit incident sous les ordres de Senior il y a moins d'un an, je ne pouvais pas du tout me pointer demain matin, un bras plâtré, ma gueule de con toute souriante, pour lui demander de me mettre dans ses petits papiers puisque c'était même pas le bon bras qui était attaqué et que je pouvais encore tenir en joug un type. Et j'avais pas spécialement le désir de devoir expliquer ce qu'il s'était passé à la hiérarchie ou aux quelques collègues qui n'avaient toujours pas compris que je les méprisais. Alors tu pouvais oublier ton projet de plâtre, l'enterrer, et te concentrer sur le reste ; ce que tu fais, d'ailleurs, parce que déjà tu commences à te plaindre et à grogner. Je ne peux pas te dire que c'est un peu tôt, que d'habitude tu attends au moins la septième plaie ou le premier juron. Ce serait te faire remarquer et admettre à moi-même que je t'analyse ; ce qui n'est évidemment pas le cas, tu as juste une routine bien définie qui fait que chaque occurence différente se remarque très facilement. Déjà rhabillé, j'en dis pas plus parce que t'as l'air de mauvais poil, que la dernière fois que ça s'est vu autant, j'ai fini en toi plus rapidement et plus bestialement que je n'avais jamais baisé quelqu'un, et que je ne voulais pas tenter le diable en me laissant aller à ce genre de moments passés post-soins. On n'avait rien à se dire, toi et moi, et tu m'exécrais sans aucun doute, me soignant uniquement par compassion, piété, charité, ou sens du devoir professionnel, sans que je puisse dire lequel des deux premiers était le sentiment le plus révoltant et répugnant depuis que le monde avait été monde. "Je peux pas t'embrasser sans te donner de mon sang, donc je vais me contenter de la tape sur l'épaule." Bref mouvement sur tes omoplates, et puis je m'éloigne pour franchir la porte... et faire demi-tour aussitôt.

Ce sont ces cons de Brandy et de Grant, au bout du couloir. L'un a été mon collègue à l'antiterroriste pendant des années, et il était également là le jour où j'ai décidé de repeindre le plancher de l'appartement faisant d'office de planque aux petites mains d'ISIS. L'autre était son frère jumeau, la même gueule de poireau, la même moustache fournie et la même barbe de toutes les couleurs. Ils étaient presque indissociables, à un détail près : Grant boitait, et était de ce fait bloqué à son bureau au sein des crimes organisés sans jamais pouvoir s'en échapper. C'était le genre de situation qui pouvait justement me provoquer de la compassion ou de la piété. Mais Grant était un gros crétin à la grande bouche, et son frère aussi. Ça ne m'arrangeait vraiment pas qu'ils soient là, et ce même si c'était juste pour rendre visite à leur mère malade - ou opérée de je sais plus quoi, Grant l'avait répété toute la semaine sur son plateau, comme si c'était une nouvelle sonnerie pour marquer les heures qui passaient trop lentement. T'as fini de ranger ton matériel, j'entends des clefs qui tintent, mais je retiens surtout que tes yeux se sont transformés en deux lance-flammes bien chargés, et que tu as l'envie de me carboniser sur place. Pas de bol, ça voudrait dire rester plus longtemps pour me soigner. Parce que tu me soignerais, hein ? "C'est pas des flics." Détail inutile mais pourtant j'avais ressenti le besoin inextricable de clarifier au moins ça. "Arrête de tirer la gueule." Ça c'était inutile aussi, parce que je n'avais réussi à obtenir des sourires de ta part que dans deux circonstances : la première, c'est quand j'avais eu des blessures qui t'avais semblé des exercices de maths niveau bambins et que j'avais pas arrêté de me plaindre (c'était avant que je m'endurcisse réellement pour t'affronter), la seconde c'était une situation qui mêlait des souffles courts, des mains brûlantes, une absence totale de préservatif et moi qui glissait en toi avec une facilité naturelle presque effrayante. "Je te paie à bouffer si tu veux. Tu mérites bien ça." Pas que j'apprécie l'idée d'une soirée passée en la compagnie de quelqu'un d'autre qu'un bon bouquin ou que ma couette pour me reposer un coup (c'était le genre de phrases qui aurait fait rire Rae, avant qu'il me traite de mémère), mais j'avais la dalle et surtout un énorme code d'honneur qui faisait que je ne pouvais pas te laisser t'en tirer en me demandant que dalle pour me soigner presque toutes les semaines. "Si tu me fais sortir maintenant, tu compromets la sécurité du pays tout entier." Ouais, pas vraiment un bon menteur, pourtant j'avais eu toutes les séances d'échauffement du monde quand il fallait dégainer des situations expliquant un truc basique au père, pour éviter qu'il ne mette un revers et qu'il se contente d'une gifle. "Aussi, arrête de jouer les connards, ça te va pas, laisse moi ce rôle là. Et file moi du désinfectant et une compresse pour ma bouche." Tête penchée, je bloque la porte dans tous les cas, mais tu bouges pas. "S'il te plaît." Ça sonne comme un râle, c'est moche, ça va pas avec tout ce que je dis d'habitude, parce que j'ai jamais été poli, c'était pas ma came. Mais ça a l'air de faire son effet, puisque tu ne m'as pas encore fusillé du regard - d'habitude tu le fais dès que je ferme la bouche, mais là j'arrive pas à le faire sans que ça pique, c'est peut-être pour ça. "Tu devrais te reposer, en plus, quarante-huit heures sans dormir ça te donne vraiment une sale gueule." Haussement d'épaules.
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Archibald Robinson
Land of the living
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Archibald Robinson
#  case#001 cold, cold heart EmptyLun 27 Mar - 22:22

Archibald & Alastair
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Et voilà que tu me prenais au mot… Abruti. Mouvement d’épaule pour dégager ta main, mais sourire en coin qui étire mes lèvres parce qu’au fond ça m’amuse, ta connerie. Pour une fois que t’es un peu marrant, autant en profiter un peu. Ce n’était pas tous les jours que ça arrivait, alors que toi la tête en vrac, j’avais l’impression que c’était une occurrence quotidienne. Il y avait des périodes où c’était encore plus fréquent, où t’avais l’air tellement agacé que je ne prenais même pas la peine de discuter, hormis mes consignes habituelles. Des fois ça s’espaçait un peu plus, mais ça restait régulier. Si j’avais travaillé dans le privé, j’aurais probablement dit que tu étais mon client le plus régulier. Ce n’était pas le cas, tu étais un patient, même si tu me faisais largement plus chier que tous les autres.

« Je veux ni de ton sang ni de quoi que ce soit qui vienne de toi. »

Même un autre tour entre tes bras ne m’intéressait pas. Ça avait été sympa, m’avait distrait de mes pensées sombres, ça n’arriverait plus jamais. Tu m’assures que tes clampins de collègues ne sont pas flics, mais j’en doute. Si tu n’appartiens pas à la police, je suis quand même persuadé que ton métier n’en est pas loin. Pas de question supplémentaire cependant, parce que tu n’y répondras probablement pas de toute façon. Tu me demandes d’arrêter de faire la tête, ça ne me fait que lever les yeux au ciel encore une fois, je vais finir par me bloquer dans cette position si on en croit ce que répétait mon père en boucle quand on était petits. Pas vraiment envie de te faire de grands sourires, ce n’était pas comme si on s’appréciait, non plus. J’étais plutôt du genre souriant, pourtant, mais apparemment tu ne faisais pas tout à fait ressortir mes bons côtés. Bras à nouveau croisés, tête qui part en arrière tandis que je pousse un grognement, pose les deux mains sur mes yeux.

« La dernière chose dont j’ai envie c’est de partager mon petit-déj avec un type qui a la gueule en biais et qui m’adressera pas deux mots. Je sais que je le mérite, d’où le fait que je sois prêt à m’arrêter pour de bonnes gaufres que je vais rentrer et tranquillement partager avec mon chien. Bien meilleure compagnie. »

Pour le coup, pas de mensonge. Blue était largement plus agréable que la plupart des humains que je côtoyais. La perspective de ne pas manger seul pour une fois me tentait un peu, mais quitte à me retrouver face au silence et au jugement, autant ne pas fréquenter qui que ce soit. Nouveau bobard de ta part, ma tête qui revient vers l’avant, soupir.

« Mais bien sûr, rien que ça. »

Je ne joue pas les connards, je suis juste agacé, fatigué... Et je meurs de faim. Puisque tu bloques la porte, je n’ai pas d’issue de secours et même si je suis plutôt doué question bagarre, je n’ai pas trop envie de me frotter à tes poings qui semblent avoir bien servi ce soir, si j’en crois la rougeur de tes phalanges. Et puis tu dis les mots magiques, pour la première fois depuis que je te connais, et ça me fait hausser les sourcils. Ça, c’est vraiment nouveau. Alors j’abdique, attrape de la gaze, des stéri-strips, m’approche de ta lèvre. Tu fais un geste pour les attraper mais je fais claquer ma langue, éloigne le tout.

« Tu touches, j’te bouffe. »

De toute façon, qu’est-ce que tu comptes faire, tu ne peux même pas te regarder dans un miroir, il n’y en a pas ici. Pas de désinfectant si près de la bouche, ce serait un risque inutile, surtout pour quelque chose d’aussi léger. Tapotement léger pour enlever les quelques gouttes de sang qui se sont glissées sur ta lèvre, bande posée, je me recule en entendant ta nouvelle remarque, soupire.

« Tu sais qu’à force je vais plus vouloir te voir si tu continues avec ce genre de compliments ? Et je te signale que presque à chaque fois que tu viens, je suis sur une garde de deux jours. C’est bien de prendre conscience maintenant du fait que les médecins sont fatigués. Tu y réfléchiras peut-être à deux fois maintenant avant de te faire fracasser la tête. »

Ce n’était probablement pas complètement de ton fait, mais j’en venais à me dire que tout ça n’avait rien d’innocent et que ça ne pouvait pas être juste lié à ton travail. Mais ça ne me regardait pas, alors je me contentais d’être désagréable, mais pas curieux. Grondement au niveau de mon estomac, je me rebelle, te pousse légèrement pour réussir à ouvrir la porte, passer la tête. Je la referme, croise ton regard courroucé sans sourciller.

« Le couloir est entièrement vide. C’est bon ? On peut y aller ? »

J’ouvre à nouveau la porte, un peu plus grand cette fois, commence à sortir. Et puis je m’adosse au cadre, bras croisés, te lance un regard à la fois agacé et curieux.

« Tu me les offres, ces gaufres ? »

Après tout, c’était toi qui avais proposé, non ?

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Alastair K. Russo
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Alastair K. Russo
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#  case#001 cold, cold heart EmptyLun 27 Mar - 23:58

Archibald & Alastair
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Finalement tu obtempères à ma demande, mais tu ne me lances aucune bouteille de remède miracle, pas non plus un bandage hyper long qui aurait transformé ma bouche et mon menton en ceux d'une momie. Ça en aurait ravi plus d'un, fait rire plus d'un aussi ; mais non, tu t'approches, je contrôle du mieux que je peux muscles et membres pour ne pas qu'ils se contractent, pour ne pas avoir un mouvement de recul. Être l'objet de ton analyse médicale quand je suis couché est une chose, t'avoir aussi près de moi en étant debout est une autre. Je déteste qu'on me touche, les autres le savent ; les collègues n'essaient plus de me serrer la main depuis que je n'ai pas empoigné celle d'un chef de secteur qui visitait nos bureaux. Bon, pour être parfaitement honnête, avec ce type-là c'était pas seulement juste mon aversion pour les contacts humains. C'était une énorme tête de con et je détestais leurs visites politiques de récupération à la con. Ça faisait beaucoup de con à la fois, et j'en avais déjà bien assez autour de moi au quotidien sans qu'on vienne me foutre dans les pattes un bureaucrate asservi et complètement déconnecté. Le type avait graissé la patte de pas mal de monde pour en arriver là, avait essayé de se saisir de mes doigts, j'étais resté de marbre, le regard droit en face de moi, affront ultime puisqu'il avait grogné je sais pas trop quoi, et que je m'étais retrouvé convoqué chez Senior (c'était encore dans sa brigade que j'avais fait n'importe quoi avec cet important personnage). Petit cours sur les bonnes manières, éclats de voix, de l'autre côté de la vitre de son bureau, les agents nous regardaient comme si on était en train de se battre. J'avais rien dit, je l'avais juste invité à se faire foutre, mais il avait l'habitude, ça le faisait plus sourciller autant que la première fois. C'était peut-être ça qui m'avait donné l'envie de noter tout un tas de détails sur les gens que j'étais amené à voir souvent : pour mieux les manipuler et finir par les écraser. Savoir que tu avais un chien ne serait probablement jamais utile, mais te rappeler son existence un jour où tu serais tenté de me couper la carotide en prétextant une erreur médicale, pouvait jouer en ma faveur. Même si j'aurais pu te désarmer, te plaquer au sol, contre un mur, contre une table, à peu près n'importe où. Tu avais un physique musclé, je l'avais vu de près, mais rien qui puisse réellement contrer mes techniques à moi, celles qu'on apprenait dans les formations primaires. Autant dire que face aux techniques les plus développées, tu ne pourrais rien. Mais pas le moment de penser à la façon dont je pouvais plier ta colonne vertébrale contre tous les objets de la pièce ; pour l'instant, t'es redevenu un peu plus sympa, tu parles de ton doggo, et je suis à pas grand-chose de t'avouer que je préférerais aussi partager une gaufre avec lui plutôt qu'avec toi.

"Je savais pas qu'il fallait que je te complimente, Robinson. Je connais ton nom de famille, je pensais que ce serait suffisant." Un instant. "Tu sais, c'est déjà plus qu'avec la majorité des gens." Dents qui tracent un sillon amusé sur mes lèvres abîmées, grimace de dégoût quand je me rappelle de la gaze quand elle est effleurée par les canines. "Mais t'as un joli petit cul. Quand on voit que t'es fatigué, ça oblige au moins à détourner le regard de tes cernes." C'était la meilleure façon de te désarmer aussi. Sans me jeter des fleurs sur mes performances de l'autre soir, parce que j'aurais préféré dès lors qu'elles soient fanées. Mais t'avais choisi de pas en parler non plus, alors ça pouvait facilement te la boucler, rien que quelques secondes, le temps que les deux gros nigauds aient quitté ce foutu couloir trop propre. Je te laisse me pousser sur le côté, me disant que primo tu ne me laisseras pas finir seul la soirée ici, pas avec autant de matériel médical à portée de main, et deuzio, tu ne risques pas de te faire reconnaître par Grant ou son jumeau avec leurs têtes de bouledogues, puisque tu ne les avais jamais croisés. Tu me parles de dos, je t'entends mal mais hors de question de confesser que mon ouïe a tendance à foutre le camp, peut-être à cause des balles tirées plus que dans une vie classique, les oreilles qui n'aiment pas trop les explosions même quand c'est juste de la poudre. Et puis tu te retournes, t'attends une seconde, appuyé sur le chambranle de la porte, j'en déduis que les deux gugusses se sont cassés ou que tu as choisi de me faire livrer en pâture aux ragots des collègues. Mais rien ne se passe, tu ouvres juste la bouche pour me surprendre, me faire froncer les sourcils. Je te passe devant, rejoins le couloir en t'attendant, le pas plus lent. "Au départ je pensais surtout t'offrir une barre chocolatée dans un distributeur en bas. Mais va pour une gaufre." Haussement d'épaules. Pas vraiment de honte à l'avouer, c'est pas comme si on cherchait un cadre pour un rendez-vous romantique. T'es hors-service, j'ai mal un peu partout malgré la pression de tes mains en roulis sur tout mon corps. C'est de la nourriture, un besoin primaire et on se casse. Mais j'avais toujours ce doute quand il s'agissait des besoins primaires et que tu étais dans l'équation. J'avais peur de succomber à un autre ; mais non, pas ce soir, pas assez fatigué, pas assez affamé.

Je te suis dans ton domaine, te regarde lever la main vers ceux de tes collègues que tu croises. Curieusement mes yeux se perdent sur le roulement discret de tes hanches sous ton pull. Je ne l'avais pas remarqué avant, parce que je t'avais vu en blouse, et quand tu ne l'avais pas, je ne te voyais pas marcher. Images en flashes, j'ai mal aux lèvres, et ça me casse la tête. Ascenseur silencieux, le mouvement mécanique des câbles autour de la cage fait plus de bruit que nos discussions muettes. On se regarde en chiens de faïence, pas un sourire, juste des soupirs. Et puis je craque le premier, pile quand la sonnette annonce l'arrivée au parking souterrain. "Tu montes avec moi. C'est pas négociable, t'arriveras pas à conduire." Je secoue la tête comme pour balayer tous tes arguments. "J'ai mon permis depuis vingt piges, tu risques rien. Et je te ferais pas le coup de la panne. Mais je ne fléchirais pas non plus, Robinson." J'accélère un peu le pas, j'aime pas être derrière quand je connais la destination, les couloirs sont loins dans ma tête, le parking je le connais par coeur. Je m'assois du côté conducteur, attends sagement que tu ouvres la portière, un peu contraint par mes regards meurtriers. Je chasse de la paume les journaux par dizaines sur le siège de cuir blanc, les envoie tous sous ton siège ou à l'arrière directement, pluie de papier. "Je ne fumerais pas. Allez, monte. Me casse pas la tête, sinon c'est toi qui répares. Tu sais comment ça fonctionne entre nous, Archibald." Je dis rarement ton prénom, souvent pour attirer ton attention ou t'envoyer chier, là c'est un peu des deux, et ça a l'air de marcher. Je lève les yeux au ciel, parce que je sais que la pensée t'a traversé l'esprit au moins dix fois dans les dix dernières minutes, que c'était peut-être un de tes arguments majeurs. Mains sur le volant, les pieds déjà prêts à marteler l'accélérateur, conduite rapide, mais fluide, pour retrouver les fins de la nuit, au dehors.
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Archibald Robinson
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Archibald Robinson
#  case#001 cold, cold heart EmptyMar 28 Mar - 22:55

Archibald & Alastair
case#001 cold, cold heart


Oh mais ce que tu pouvais me faire chier. Peut-être que là, j’avais un peu moins de patience encore que d’habitude, d’ailleurs. Aucune idée du pourquoi ou du comment, peut-être juste la fatigue qui s’était accumulée ces derniers temps, entre les gardes et les insomnies. Peut-être que t’étais plus con que d’habitude. Aucune idée. Mais ta dernière remarque me fait lever les yeux au ciel, je vais finir par me faire mal avec tout ça. Ça a l’air d’être un truc exceptionnel à tes yeux, de connaître le nom de quelqu’un, alors que c’est le niveau de politesse le plus bas qui existe. Et puis un soupir, parce que forcément, forcément, t’es obligé de faire un commentaire sur mes fesses. Comme si ce n’était pas suffisant d’avoir ce souvenir honteux en tête. Honteux pour plein de raisons différentes. Parce que j’avais utilisé le sexe pour me détourner de pensées pas terribles, parce que c’était arrivé uniquement à cause de colère et de rage, parce que ça n’aurait jamais dû exister, parce que c’était arrivé dans cette fichue salle et que je n’arrivais au fond plus trop à y voir autre chose. Plus envie d’être là enfermé avec toi, de revoir ces images dans ma mémoire, alors je m’enquière de ce qu’il se passe dehors, regarde si le passage est libre. C’est le cas, soulagement. Sauf que ma bouche s’active avant que mon cerveau n’aie fait sept fois le tour de lui-même et me voilà à te proposer quelque chose qui au fond ne me fait pas du tout envie. Je secoue la tête.

« J’ai dit des gaufres. Tu vas raquer, Russo. »

Tu t’amuses de mon nom, je m’amuse du tiens, pas de raison. Et puis je te suis, rattrape rapidement ton pas. Passage par le vestiaire pour y déposer ma blouse et attraper ma sacoche, puis direction le parking. Quelques saluts amicaux à mes collègues, ceux qui prennent leur garde, café en main, ou qui sont là depuis aussi longtemps que moi. Les pauvres internes qui courent déjà partout avant même de commencer leurs rondes. Promenade achevée une fois dans l’ascenseur, silence complet entre nous, parce qu’au fond, qu’est-ce qu’on a à se dire ? Pas grand-chose. Tu m’ordonnes de monter avec toi, yeux à nouveau levés au ciel. Je ne sais pas pour qui tu te prends, à décider à ma place, mais je n’ai pas envie de me battre là, tout de suite. Ça n’a aucune logique, puisque ma voiture est là et qu’il faudra que tu me ramènes après, ce qui nous fera perdre un temps précieux à tous les deux. Mais si tu veux être illogique, pourquoi pas. Ce n’est pas comme si j’avais pensé plus de deux minutes que tu pouvais être normal. Bon gré mal gré, j’obtempère, me glisse sur le siège passager.

« Oh mais ferme-là. Je t’ai demandé des comptes ? Me semble pas. Donc arrête ton drama et démarre. »

Ceinture attachée, tête calée contre le cuir, mes yeux se ferment un instant, jusqu’à ce que tu démarres, nous fasse sortir de l’obscurité du parking pour trouver celle de l’extérieur, qui ne restera pas très longtemps. Comme l’impression que tu conduis vite, mais l’adrénaline de la garde tombe, la fatigue s’écrase sur mes épaules, j’ai du mal à me concentrer sur ce que tu fais. J’aurais largement pu conduire, mais être passif côté passager me bercerait presque. Je me frotte les yeux, t’indique un diner pas très loin. Je le connaissais bien, y avais fait passer quelques gueules de bois et y avais repris des forces après des nuits de garde un peu plus longues que d’autres. Alors à peine la porte franchie, le sourire éclatant de la serveuse derrière le comptoir me réchauffe le cœur. Je me laisse tomber sur la banquette vieillotte qui craque un peu, un café noir déjà fumant qui m’arrive sous le nez, me fait sourire.

« Ça, Patti, c’est le bonheur. »

Sourire de la femme et petite tape sur le sommet de mon crâne, avant qu’elle te lance un regard un peu étrange, mi-curieux, mi-agacé. La plupart du temps, j’étais ici tout seul, ou avec Tim quand on était encore ensemble, moins depuis qu’il avait refait sa vie. Elle hausse un sourcil en posant à nouveau les yeux sur moi, je me contente d’un sourire éclatant.

« Sers-moi les meilleures gaufres de la terre, pitié.
- Noyées dans le sirop ?
- Tu me connais bien. Merci ! »

Petit clin d’œil en sa direction, avant que mon regard ne trouve le tiens, t’interroge silencieusement. C’est vraiment bizarre de te voir là, en dehors de l’hôpital, comme s’il y avait entre nous autre chose que les soins, les visites nocturnes et les piques incessantes.

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Alastair K. Russo
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#  case#001 cold, cold heart EmptyJeu 30 Mar - 23:02

Archibald & Alastair
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Rapidement, j'arrête de secouer la tête. Tu me résistes et tu me réponds, ce soir. C'est rare. Je ne sais même pas si tu l'avais fait avant. Ça me donne un tas d'envie divergentes, et la plus poignante reste celle d'une réplique cinglante pour te la faire fermer une fois pour toutes. Je peux aussi ouvrir ta portière, te détacher, te larguer au sol en roulant très, très vite, sur une route. Mais non. J'ai besoin de toi. Ça m'emmerde suffisamment de le penser, je ne compte pas te le dire un jour. Tu n'es pas indispensable, attention ; un autre médecin, ça se trouve facilement. Si ce n'est pas toi, ce sera une collègue plus jeune, moins expérimentée, ou n'importe quel type en blouse qui passera devant mes yeux et qui acceptera de la mettre en veilleuse, de me soigner avec un peu de douceur ou beaucoup d'amour - bref, tout ce dont tu es incapable. On roule en silence sur une distance qui me rappelle que je ferais mieux de faire le plein dans les jours à venir. A côté de moi, t'as l'air dans le vague, comme si t'allais t'endormir, et je me dis que c'est le moment idéal pour te pousser hors de la voiture en route. Mais non, je ne bouge pas, je reste, mes mains bien serrées sur le volant, à peser le pour et le contre. Finalement, la décision vient vite. Je ne veux pas te blesser, parce qu'il y a des caméras, que c'est le genre de trucs où on me collera d'autres séances chez la psy avec ses marmonnements indicibles et mes nouvelles envies de meurtres. Et puis, imagine tu meurs. On trouverait encore un moyen de me mettre ça sur le dos, et puis un type pigerait vite notre relation, on pourrait capter mes activités nocturnes et j'avais tout, mais alors vraiment tout, sauf envie de ça. Je préférais encore te redonner du plaisir dans ton cabinet, ou bien me contenter de la banquette arrière. Images qui viennent par salves très lumineuses, un peu trop presque ; je réprime une grimace dégoûtée, parce que ça en ferait trop. J'ai bien aimé être en toi. J'ai bien aimé la façon dont nos corps avaient formé une espèce de forme étrange. Mais ça n'arrivera plus. Je ne dérape jamais, une fois c'est déjà beaucoup trop, ça fait s'effondrer toutes les statistiques et je ne peux pas me le permettre. Tu es beaucoup trop agaçant, dans tous les cas. Je ne veux pas que tu te fasses des idées, que tu écrives mon nom dans ton journal intime entre "j'ai eu mon diplôme je vais soigner des bobos" et "aujourd'hui j'ai adopté un chien je l'ai appelé blue il est beau je l'aime de trop <3".

Finalement, tu te redresses, me donne enfin une direction - expérience copilote absolument zéro, ne recommanderais pas -, et je me gare devant un diner qui ressemble plutôt pas mal aux scènes de crime de l'antiterroriste ; il y a vraisemblablement eu des bombes de moisissures, des bombes de toiles d'araignées, des bombes de mauvais goût, tout ça en même temps, et pourtant je ne me souviens pas avoir vu le dossier passer sur mon bureau tout carré. Tu rentres le premier, salue par son prénom la serveuse, je me dis que c'est bien, tu fais les démarches pour nous deux, me contente de regarder derrière une batterie de casseroles, en me demandant laquelle pourrait faire le plus mal si on l'éclatait contre un crâne humain. La trop grosse est difficilement maniable, la plus petite est plate, sert davantage à faire des crêpes qu'à étaler des corps. Je sens son regard à elle qui me dévisage, je reviens à la vraie vie en la fixant de la même façon. Drôle de personnage que celle que tu as appelé Patti. Je suis presque sûr qu'elle est du genre à servir des étouffe-chrétiens.

Je lève la main en désignant le café, secoue la tête quand tu mentionnes les gaufres - prêt à tout sauf à mourir à tes côtés dans un diner complètement déraciné du monde de l'hygiène et des bonnes manières -, elle secoue la tête à son tour, attend visiblement quelque chose. Je ne lui accorde qu'un très faible sourire, dégaine une liasse de billets que je pose devant elle, et visiblement ça suffit. Les humains n'ont que deux moteurs. Le sexe, l'argent. Le reste c'est du vent, des décors qu'ils construisent. Toi, tu étais différent en ce sens là. T'avais de l'argent, tu aimais le sexe - en tout cas le mien -, mais tu semblais pas tout régir par ces deux règles. Outsider en ce sens-là, à peu près comme moi. Mes deux mots d'or, c'était violence et justice. Quand les deux se réunissaient, c'était le truc le plus excitant du monde, j'aurais pu fracasser des murs de mes poings juste pour récupérer cette adrénaline-là. "Tu viens ici souvent ?" J'ai les pieds sur l'arceau de ton tabouret, parce que c'est plus confortable, aussi parce que je savais pas quoi faire de mes jambes, que je ne voulais pas les plier comme toi. Ta grande copine nous avait déjà regardé étrangement, je tenais pas spécialement à renouveler l'expérience, et je m'en serais voulu de devoir lui crever les pneus ou... Non. Pas d'assassinat.

Je te regarde, j'attends une réponse, pas par intérêt spontané pour la façon dont tu bouffais des gaufres, plutôt pour établir une sorte de conversation, un truc qui fasse défiler plus vite le temps, parce que dehors c'est pas encore l'aube, et que quelque chose me dit que t'es du genre à mâcher quand tu manges, donc qu'on est pas prêts de se tirer du regard inquisiteur de Patti, qui revient déjà les mains chargées de deux assiettes, pose la tienne doucement, fait glisser la mienne avec une hargne qui ne s'évapore pas même quand elle ramasse les billets. "Je comprends pas la langue des signes. Parle plus fort la prochaine fois." Ouais, c'est pas une bonne pâte - et je parle des gaufres, pas de Patti. Je me retiens de lui dire que c'est pas très bienveillant comme commentaire, je me contente de déchirer avec un air que j'imagine dégoûté les gaufres, du bout de la cuillère qu'elle m'a lancé à la gueule juste avant de manquer de respect à toute une partie de la population. Elle s'éloigne, chiffon sur l'épaule. "Ça va, je m'attendais à pire, c'est pas mauvais. Ta meilleure amie est de mauvais poil." Je hausse les épaules. M'en fiche pas mal qu'elle raconte avoir servi un type malpoli à ses copines autour d'un verre, ou à son mari sans qu'il l'écoute vraiment. La coupe de café qui se vide d'une traite dans ma gorge, et la gaufre est vite terminée aussi, parce que j'ai pas appris à manger lentement, qu'on m'a au contraire toujours éduqué en me rappelant que le plat pouvait disparaître rapidement ou qu'on pouvait m'y foutre le nez comme un chien dans sa gamelle.
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#  case#001 cold, cold heart EmptySam 1 Avr - 9:14

Archibald & Alastair
case#001 cold, cold heart


Drôle d’odeur, dans ce diner, entre le plastique des banquettes et des tables – cet espèce de faux cuir qui grince à chaque fois qu’on bouge d’un millimètre – et puis l’amertume du café, le gras de la friture, le sucre… Tout se mélangeait dans un genre de dissonance pourtant si harmonieuse. C’était rassurant, comme odeur. Moins que celle de l’hôpital – ou encore mieux, du bloc – parce que je n’étais jamais aussi calme que là-bas, que c’était ma maison probablement plus qu’aucun de mes appartements ne l’avait jamais été, mais tout de même apaisante. Un truc familier, qui faisait que je me sentais à ma place, en quelques sortes. Et puis il y avait le sourire de Patti, sa façon de me tapoter le sommet du crâne et de ne jamais me faire payer le prix affiché, de me glisser une part de tarte à emporter, ‘au cas où’, comme si j’étais dealer de tartes et qu’elle essayait de me remettre sur les rails. C’était peut-être parce qu’un jour, quand j’étais encore résident, j’avais opéré son fils. Une de mes premières chirurgies en solo, appendicectomie entièrement réussie, le gamin était rentré chez lui dès le lendemain. Ou peut-être que c’était parce qu’une fois j’avais empêché un grand-père de s’étouffer en mangeant un gâteau ou un autre, manœuvré de Heimlich et personne n’était mort, pas de plainte déposée, ennuis évités. Ou peut-être que c’était juste parce qu’elle m’aimait bien, parce qu’elle me connaissait depuis des années. Aucune idée. Toujours était-il que j’aimais beaucoup venir ici et que c’était donc forcément le premier endroit auquel j’avais pensé en m’imaginant un bon petit-déjeuner bien copieux. Ta question me fait lever un sourcil et je secoue la tête.

« Non. Je t’ai donné une adresse au hasard et son nom est écrit sur un badge. Ou alors je l’ai deviné. »

Soupir, yeux levés au ciel avant de me passer les mains sur le visage. Gorgée de café, bien meilleur que celui de l’hôpital, avant que je reprenne.

« Ça doit faire au moins dix ans que je viens ici après les gardes un peu longues. »

C’est probablement tout ce à quoi tu auras le droit, ce n’était pas comme si j’avais envie de m’étaler. Et puis tu n’en avais probablement rien à faire, cherchais peut-être juste à ne pas attendre en silence. Assiettes qui arrivent sur la table en même temps, me tirent un sourire par leur différence de traitement. Trois gaufres généreusement arrosées de sirop et quelques fruits frais sur la mienne, deux sur la tienne, un peu de sirop, pas grand-chose de plus. Fourchette et couteau en main, j’attaque, soupire presque de soulagement en sentant enfin de la vraie nourriture venir emplir mon estomac. Les boissons énergisantes et autres barres de céréales n’apportaient définitivement ni le même plaisir ni la même sensation de satiété. Tu lances un nouveau commentaire, je me contente d’une gorgée de café, d’une autre bouchée de gaufres. Je pourrais dégommer l’assiette entière en moins de 3 minutes, vaisselle comprise, tellement j’ai faim. Y’a plus rien sur mon assiette en à peine quelques secondes et – presque comme par magie – se matérialise devant moi une assiette d’œufs et de bacon, accompagnée d’un clin d’œil. Patti retourne derrière le comptoir après avoir rempli aussi nos tasses de café et je me remets à manger.

« Elle est pas de mauvais poil, c’est la personne la plus douce qui existe. Elle peut juste pas te voir, alors qu’elle vient de te rencontrer. On se demande pourquoi, tiens. »

Léger coup d’œil pour remarquer que le plus gros de la liasse de billets a terminé dans le pot à pourboires, puis je me reconcentre sur toi.

« Bon. Tu fais quoi, si t’es pas flic ? CIA ? FBI ? Un autre assemblage de lettres ? »

Pourquoi est-ce que j’engageais la conversation ? Probablement pour les mêmes raisons que toi. Parce que ça faisait passer le temps, ça brisait cette dynamique bizarre que l’on s’était tous les deux imposée. On avait décidé de manger ensemble, alors que l’on n’avait rien à se dire. Ce n’était pas comme si on partageait tous nos secrets. On ne se parlait presque pas, en temps normal. Alors pourquoi aujourd’hui ? Il n’y avait aucune raison, aucune explication valable. C’était juste arrivé comme ça, parce que. Et je n’étais pas tout à fait sûr d’aimer ce qui était en train de se passer. Dernières traces de nourriture salée effacées de mon assiette, je me cale un peu plus contre le dossier, mug fumant en main pour le siroter tranquillement, le regard posé sur toi. Ça faisait dix ans qu’on se connaissait, et pourtant, toujours la même question dans le fond de ma tête : qui es-tu, Alastair Russo ?

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