Une journée tranquille se prépare de mon côté. Je quitte mon appartement, portable en main et lunette de soleil sur le nez. Je ne bosse que tard ce soir donc j’ai tout le temps du monde pour rejoindre ma collègue et amie Harlow et passer un moment avec elle, comme on l’a prévu. Les sessions shopping, c’est la vie en même temps et je sais qu’elle est du même avis que moi à ce niveau. C’est l’avantage de notre métier, surtout quand on sait que notre agence a pour clients les personnes les plus riches de Los Angeles. Même si Harlow et moi avons un point de vue assez différent sur tout ça, nous nous entendons tout de même vraiment bien. Je l’ai aidée à trouver sa place avec nous, enfin autant que possible si on considère qu’elle n’est pas exactement ravie de faire tout ça. Ce n’est pas la première fois qu’une de mes collègues vit mal la situation et même si ce n’est pas mon cas, j’essaie d’être présente pour celles et ceux qui ne sont pas à l’agence par guettée de coeur. Avec Harlow, on va souvent faire du shopping et on passe toujours de bons moments. Pendant plusieurs heures, on s’éclate juste à dépenser notre salaire et on profite à fond. Sur la route, je reçois un message de mon amie et constate que je vais être en retard. Pas de beaucoup mais quand même un retard. Merde. C’est parfois l’enfer cette ville pour être à l’heure. Dès que je peux, je réponds à Harlow que je suis là dans une dizaine de minutes. Nous avons prévu de nous retrouver devant notre boutique préférée à toutes les deux.  Arrivée sur l’avenue après quelques minutes de marches intenses, je suis soulagée de voir que je vais arriver un peu plus tôt que prévu. Essoufflée, je slalome entre les passants, sac à main collé contre moi. De loin, j’aperçois la devanture de la boutique et tout de suite après, mes yeux tombent sur la silhouette de Harlow. Je lui souris chaleureusement en arrivant à son niveau. « Hey ! Excuse-moi de ce petit retard, j’ai mal calculé mon coup. » Je ramène mes cheveux en arrière en sentant que je commence à avoir chaud.  « T’es prête à faire chauffer ton compte en banque ? Ou tes billets ? Enfin faire chauffer tout ce que tu veux ? » ai-je lancé avec un enthousiasme non dissimulé. J’adore le shopping, ayant un côté matérialiste difficile à dissimuler. « Bon vu qu’on est là, on commence direct par le meilleur ? »  ai-je demandé en indiquant d’un mouvement de tête cette boutique qu’on adore toutes les deux.

Cet instant shopping partagé avec Harlow est l'occasion de se changer les idées et ça fait vraiment du bien. Nous avons toutes les deux une activité qui n'est pas reposante autant physiquement que mentalement, mais qui nous permet de vivre notre vie comme nous le souhaitons, c'est à dire en étant indépendante et sans se restreindre. Harlow et moi partageons cette envie de profiter à fond et de se faire plaisir. L'avoir comme partenaire de shopping coule de source et ça va nous faire du bien de nous voir en dehors du boulot. Ce job n'est pas évident pour elle et même si, de mon côté, je donne l'impression de bien le vivre, c'est un peu plus compliqué que ça en a l'air. En tout cas je suis vraiment heureuse de la voir, même si du coup je suis un peu en retard. « Pas de soucis ne t’en fais pas » me dit-elle, avant d'enchaîner quand je lui parle de faire chauffer son compte en banque : « La carte va chauffer, je te le dis. » Je hoche la tête, partageant le même enthousiasme qu'elle. « On est d'accord là-dessus, j'ai le même programme ! » J'ai très envie de me faire plaisir pendant notre session shopping d'aujourd'hui. C'est de toute façon souvent le cas mais parfois ça m'arrive d'être moins motivée que d'autres et quand ça arrive... quand ça arrive je le sens et je m'arrange pour ne pas aller faire du shopping, tout simplement. « Allons-y ! » lance Harlow quand nous décidons d'aller dans notre boutique préférée. Sourire collé aux lèvres, j'entre avec ma collègue dans l'endroit que nous connaissons limite par coeur maintenant. Une légère bouffée d'euphorie vient m'envahir maintenant que nous sommes là. C'est un mélange entre le fait de me retrouver dans un endroit que j'aime et le simple fait de voir tous les articles disposés un peu partout... tellement de possibilités. « Mon dieu je vais encore faire des folies… » lance Harlow. « Tu lis dans mes pensées ! T'as vu leur nouvelle collection ? Elle a l'air canon ! Mes placards vont finir par exploser. » Nous commençons à aller regarder deux trois articles de plus près quand mon amie se tourne vers moi. « Ça va toi, en ce moment? » Je hoche la tête tout en regardant le chemisier turquoise que je viens de déplier. « Oui ça va pas mal ! Que ce soit boulot ou autre, ça va... Je me passerai juste de mon garde du corps mais bon, ce n'est pas comme si Clarisse me laissait le choix. » ai-je fait en levant les yeux au ciel. Harlow a une idée de quoi je parle, elle sait que j'ai du mal à tout ça, même si ça fait maintenant un peu plus d'un mois que je dois bosser avec Warren dans les pattes et que je me suis un peu... habituée. De toute façon comme je l'ai dit, notre patronne reste intransigeante sur le sujet. Je fais un vague signe de main, comme pour effacer ce que je viens de dire. « Mais bon, c'est pas important. On va pas se prendre la tête avec ça maintenant. » ai-je souri avant d'enchaîner. « Et toi ça va ? On n'a pas eu beaucoup le temps de se croiser ces jours. » Je repose le chemisier que j'avais en main à sa place.

Harlow et moi montrons déjà notre enthousiasme à peine rentrées dans la boutique. Il faut dire que nous adorons toutes les deux cette endroit donc c'était à prévoir, mais ça tombe bien parce que nous avons l'argent nécessaire pour nous faire plaisir et c'est tout ce dont j'ai envie aujourd'hui, faire du shopping avec une amie, craquer pour de jolies choses sans y repenser à deux fois. C'est l'avantage indéniable de bien gagner sa vie comme c'est mon cas et comme c'est le cas de ma collègue. « Je n’arrive même pas à choisir. Je veux quasiment toute la nouvelle collection. » Je hoche tristement la tête, je comprends sa lutte intérieure pour ce qui est de se contrôler face à cette nouvelle collection. Même si nous gagnons bien nos vies, on ne peut pas non plus se permettre une telle folie... et puis même si c'était le cas, je n'aurais certainement pas la place de tout ranger dans ma chambre. « Je sais ce que tu ressens... Des fois je me dis qu'on devrait acheter cette boutique, ça serait plus pratique. » On pourrait se servir dans les rayons, dans la réserve... ce rêve ! Oui je sais, à croire que porter les tenues magnifiques fournies par l'agence ne me suffit pas, j'ai apparemment aussi besoin qu'on me fournisse des vêtements dans mon quotidien. J'aime beaucoup trop ça que voulez-vous, les beaux vêtements, les belles chaussures, les jolis sacs et accessoires. Quand elle demande de mes nouvelles, je ne peux pas me retenir de grogner sur la situation avec nos gardes du corps. « On finira bien par s’habituer… Comme tu le dis, pas le choix. » lance Harlow. Encore une fois, je hoche la tête, sachant bien qu'elle a raison. Je grogne encore un peu mais je me fais doucement à l'idée que je n'ai pas le choix. Je n'ai pas mon mot à dire dans cette histoire. La situation n'est pas évidente que ce soit pour moi, pour Harlow ou le reste de nos collègues. Alors que je continue à regarder tout ce qui m'intéresse dans la boutique, je lui retourne la question en lui demandant comment elle va bien. « Ca peut aller… C’est compliqué. L’autre jour, j’ai croisé un chef d’entreprise… Avec lequel j’ai diné avec un client. Diner d’affaires, grosses sommes en jeu, je n’étais là que pour faire joli... » Elle me raconte la suite de ce moment gênant qui en effet, n'est pas évident à gérer selon ce qu'on pense de notre boulot. Je sais que Harlow vit moins bien les choses que moi, que même si elle est heureuse de pouvoir se payer ce qu'elle veut, ce qu'elle doit faire pour avoir l'argent ne lui plaît pas. C'est une chose qui nous différencie, même si j'ai mes compliqués aussi sur mes choix de vie. « C'est jamais des situations faciles à gérer, je sais bien et je compatis. Je suis sûre que tu t'en es sortie au final... et si le gars a un doute, il ira directement posé la question à ton client. Au final, ça devrait être à lui de gérer ce genre de questions si jamais il y en a. » C'est toujours plus facile à dire qu'à faire selon la technique qu'on décide d'adopter. Je connais des collègues qui avouent sans hésiter que non, en fait ce sont juste des escort. Il y a des gens qui devinent en nous voyant aux évènements ce que nous sommes réellement... mais il y a aussi des clients qui ne veulent pas que ça se sache et du coup, ça devient plus compliqué. « La dernière fois que ça m'est arrivée, j'ai sorti la classique, que ça n'avait pas marché avec mon client et tout le blabla. » ai-je poursuivi. C'est mon excuse de prédilection pour gérer ce genre de moment pénible. Je navigue souvent entre cette technique et celle du "je suis escort et je t'emmerde". Mais encore une fois, ça dépend de ce que nos clients demandent. « Enfin bref. Ca mérite bien un nouveau sac. » termine Harlow. Un grand sourire éclaire à nouveau mon visage. « Ca c'est le bon état d'esprit ! Moi il me faut de nouvelles chaussures... » Je lui donne un petit coup de hanche en espérant chasser les souvenirs de ce moment pénible et gênant qu'elle a eu en recroisant ce type. « Je sais que ce n'est pas raisonnable mais... et si on se trouvait une tenue complète chacune et qu'on allait jouait les mannequins dans les cabines d'essayages ensuite ? » ai-je proposé en me disant que ça pourrait être une bonne idée pour qu'on s'amuse encore un peu plus. Je voulais lui demander aussi comment ça se passe avec son garde du corps mais je vais attendre un peu en fait.