That’s it. I don’t care anymore.

ft. Andreas Martens

Un nouveau patient de perdu. Un gosse, cette fois. Pas beaucoup plus âgé que Naya, 13 ou 14 ans. Arrivé à l’hôpital suite à un malaise en classe, les analyses avaient révélé une énorme tumeur au cerveau. Le gamin avait des migraines intenses et d’énormes saignements de nez depuis des mois, mais son médecin traitant ne s’était pas inquiété. Le gosse était mort avant même d’entrer à l’hôpital, à cause de la négligence de ce soi-disant professionnel. Ils avaient tout tenté, l’opérant en urgence quand il avait fait un arrêt soudain, mais il n’y avait rien eu à faire. Mort sur la table. Tobias était là, quand le chef de neuro avait annoncé la nouvelle aux parents. Il avait vu la douleur dans leurs yeux, l’incompréhension. Comment leur fils avait-il pu mourir après un simple malaise ? Perdre un patient n’était jamais évident, mais un gosse ? Ça avait totalement retourné Tobias. Tellement retourné qu’en sortant de l’hôpital, une fois sa garde terminée, il n’avait absolument pas su quoi faire, ni où aller. Et puis soudain, il s’était souvenu d’une chose. Juste avant l’arrêt de son patient, il parlait avec Andreas. Et là, tout de suite, il ne voulait voir personne d’autre que lui. Il grimpa sur sa moto et démarra, ayant parfaitement retenu l’itinéraire. Il ne vit pas le trajet défiler, ne pensa à rien d’autre qu’à ce qu’il voulait faire, ce qu’il devait faire. Il arriva en bas de l’immeuble, entra, et monta jusqu’au bon étage. Comme quelques nuits auparavant, il frappa, puis attendit qu’on vienne lui ouvrir. Mais cette fois, avant même de laisser la moindre chance à Andreas de parler, il se jeta sur ses lèvres. Un baiser passionné, probablement le plus passionné qu’il ait vécu de sa vie. Puis il le lâcha, et plongea son regard dans le sien, plus sérieux qu’il ne l’avait jamais été.

« Toi. C’est toi que je veux. »

 that's it, i don't care anymore

That’s it. I don’t care anymore.

ft. Andreas Martens

Andreas ne s’était pas vraiment attendu à ce que ce moment incroyable se termine si abruptement. Il s’était attendu à toutes sortes de réponses, sauf celle-ci. Un peu sonné, tant par la journée que par ce qui venait d’arriver, il se contenta de fermer la porte et d’avancer un peu dans l’appartement, glissant ses mains dans ses poches. Quand Andreas refit surface, Tobias fronça légèrement les sourcils. Des live de jeux vidéo ? C’était assez surprenant, mais pourquoi pas. Pour toute réponse, le brun hocha légèrement la tête, ne sachant pas vraiment quoi dire. Le moment était passé, ses pensées s’était assagies, il avait l’impression d’avoir pris une mauvaise décision. Andreas n’avait pas l’air heureux de le voir, il s’était échappé aussi rapidement que possible, et il se tenait maintenant loin de lui, comme s’il n’avait même pas envie de l’approcher. Sa mâchoire se serra. Est-ce qu’il s’était trompé à ce point ? Lorsque le blond prit la parole, Tobias soupira et secoua la tête. Avant qu’il ait pu répondre cependant, Andreas vint se coller contre lui, et il l’entoura de ses bras, le serrant doucement.

« Si j’étais pas sûr, tu penses que je serais venu ici ? »

Il posa les mains sur ses joues et lui fit relever la tête, ancrant son regard au sien.

« Oye, tu penses que j’suis quelqu’un de bien moi ? Parce que c’est pas le cas. »

Toujours les mains sur ses joues, il lui fit légèrement baisser la tête pour embrasser doucement son front avant de se détacher de lui, s’installant sur le canapé. Il avait passé six heures debout à cette foutue table d’opération et ses muscles étaient endoloris.

« Ecoute, j’y ai beaucoup réfléchi. Non, je veux pas mettre ma carrière en danger. Je bosse pour me retrouver à ce niveau depuis des années et je veux pas perdre tout ce que j’ai construit. Mais depuis ce soir-là sur la plage, j’arrive pas à t’enlever de ma tête et ça m’est jamais arrivé avant. Alors ouais, c’est risqué, mais je veux prendre le risque, si ça veut dire que je peux être avec toi. A chaque fois que j’ai un cas compliqué et que je sais que quand je vais rentrer chez moi je serais tout seul comme un con, j’ai envie de venir ici, de te parler… J’te l’ai dit c’est la première fois de ma vie que je ressens ça, alors j’ai mis du temps à comprendre ce que c’était, mais maintenant j’suis sûr. »

 that's it, i don't care anymore

That’s it. I don’t care anymore.

ft. Andreas Martens

Jamais Tobias ne s’était senti ainsi. Il n’avait jamais senti le besoin d’être avec quelqu’un de façon romantique. Toutes ses relations passées n’avaient été qu’une façon de satisfaire un besoin, de se sortir de son quotidien... Bref, rien d’autre que des relations primales, sans aucun sens. Quand il pensait à Andreas, il ne pensait pas de la même façon. Non. Tout ce qu’il avait en tête quand il pensait au blond, c’était cette chaleur un peu étrange qui se répandait en lui quand il le regardait dans les yeux. C’était sûrement pour ça qu’il lui était si facile de lui parler. Dire ce qu’il pensait, ça n’avait jamais trop été un problème pour Tobias. Il ne tournait pas autour du pot, pas le temps pour ça. Mais quand ça touchait ce qu’il ressentait, ses sentiments, il se retrouvait bloqué, à ne pas savoir ni quoi dire ni quoi faire. Pourtant, il avait réussi à le faire – certes, avec beaucoup d’alcool dans le sang – avec Andreas. Face à son indifférence, il avait simplement compris que le blond n’était pas intéressé, et même si c’était douloureux, tant pis. Pourtant l’échange qu’ils avaient eu par sms lui avait fait comprendre qu’en fin de compte, il n’était pas le seul à ressentir quelque chose. Il ne savait pas ce que c’était, mais il était là, ce quelque chose. Andreas s’installa face à lui, et Tobias attendit. Il avait dit ce qu’il avait à dire, avait plaidé son cas. Maintenant, les choses n’étaient plus entre ses mains. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres en entendant les premières paroles du blond. Ouais, bon, sur ce coup-là, ils étaient pareils. Le médecin n’arrivait pas à comprendre ce qui lui était tombé sur le coin de la tête, pourquoi il s’était mis à ressentir tout ça. Mais c’était là, et il ne pouvait plus faire semblant. Leurs regards s’accrochèrent, et il écouta attentivement, ce qu’Andreas avait à lui dire, avant de soupirer, secouant la tête.

« J’y ai pensé. Mais ça n’a rien de judicieux. Sauf que si tu demandes à changer de médecin pour ton suivi, si tu demandes à changer d’hôpital, on se demandera pourquoi et ça finira par me retomber dessus... Je sais que c’est pas une bonne idée, qu’on devrait pas faire ça, mais je sais que je peux y arriver. Et je sais que t’es entre les mains des meilleurs chirurgiens, dans cet hôpital. C’est pas pour rien que j’ai choisi de faire ma résidence ici. »

A dire vrai, il avait matché avec de nombreux hôpitaux, à travers tout le pays. Il avait longtemps hésité, mais avait fini par s’établir dans le meilleur hôpital de Los Angeles, pour rester proche de sa mère et de sa nièce. Maintenant, avec Andreas face à lui, avec cette chaleur qui devenait familière qui se répandait en lui, il était plus qu’heureux d’avoir fait ce choix, de ne pas se trouver à l’autre bout du pays. Un nouveau sourire étira ses lèvres et il attira le blond sur le canapé pour le serrer tout contre lui. Ils se retrouvèrent allongés sur l’étroit canapé, serrés l’un contre l’autre, et Tobias fixa son regard dans celui du blond, posant une main sur sa joue.

« Tu penses qu’on peut y arriver ? Qu’on peut construire un truc, toi et moi ? Est-ce que... Est-ce que t’en as envie ? »

Tobias avait toujours eu confiance en lui. En son jugement, en ses capacités, en sa logique. Mais là, il doutait largement. Il avait parlé à voix basse, comme si faire plus de bruit avait pu signifier qu’il se ferait aussitôt rembarrer. Il n’avait pas souvent peur, presque jamais à dire vrai, mais alors qu’il regardait Andreas droit dans les yeux, alors que le silence s’étirait entre eux, il était terrifié.

 that's it, i don't care anymore

That’s it. I don’t care anymore.

ft. Andreas Martens

Il lui faisait confiance. Andreas lui faisait confiance. C’était probablement la première fois que quelqu’un lui disait ça, en dehors de sa famille et sans parler de ses capacités professionnelles. Et merde, ça lui foutait une putain de pression. La confiance, c’était quelque chose de super important à ses yeux, et sûrement aux yeux de beaucoup d’autres gens. Alors entendre Andreas lui dire ça, ouais, c’était carrément flippant, en fait. Parce que gagner sa confiance, ça voulait dire devoir être à la hauteur et ça, Tobias, il était pas vraiment sûr de pouvoir y arriver. Il lui avait déjà fait beaucoup de mal et même s’il ne voulait plus jamais lui en faire, rien n’était moins sûr. Donc… Pression. Mais beaucoup de joie, aussi. Il n’aurait pas cru que ce soit possible, alors ça le rassurait un peu de l’entendre.

« Merci… »

Il ne savait pas réellement quoi dire d’autre, et il fut bien content qu’Andreas lui demande un câlin. Le sujet passait à autre chose, et il avait le plaisir de pouvoir le serrer contre lui. Étonnamment, lui qui n’aimait être physique que pour le sexe trouvait dans ce geste simple un côté plus que rassurant et agréable. C’était réconfortant, d’avoir le blond entre ses bras, sans arrière-pensée, en sachant qu’il ne s’agissait que d’une étreinte. Il fronça cependant les sourcils en le voyant baisser les yeux mais n’eut pas le temps de lui demander ce qui le tracassait que déjà, Andreas reprenait la parole. Il l’écouta attentivement, glissant une main dans ses cheveux tandis que leurs regards s’accrochaient. Il laissa le silence s’installer, souriant doucement en sentant ses lèvres sur sa peau, avant qu’il ne s’élargisse en entendant sa réponse. Il avait l’impression que son cœur allait éclater dans sa poitrine tellement il était heureux, alors qu’il savait pertinemment que ce n’était physiquement pas possible. Sa main dévia vers sa joue et il l’attira à lui, l’embrassant doucement. Lorsqu’ils se séparèrent, il soupira légèrement et perdit son sourire un instant.

« Moi aussi, j’fous tout en l’air. Les relations humaines, j’ai du mal, j’ai jamais trop su comment faire. Après la mort de mon frère j’ai… J’voulais pas revivre un jour ça, donc j’ai juste arrêté d’essayer de tisser des liens avec les gens. Avec toi, c’est différent. J’sais pas ce que c’est, mais j’ai l’impression qu’il y a comme un fil qui nous relie et qui… C’est totalement ridicule ce que je suis en train de dire, je sais, mais je suis sûr qu’on était comme destinés à se croiser. Si on foire tous les deux, p’t’être qu’ensemble on peut réussir ? »

 that's it, i don't care anymore

That’s it. I don’t care anymore.

ft. Andreas Martens

Le silence s’était installé entre les deux jeunes hommes après les paroles de Tobias, auxquelles Andreas avait répondu par un sourire. Étrangement, le médecin se sentait à l’aise dans cette position, le blond entre ses bras, son visage niché dans le creux de son cou. C’était pourtant tellement loin des relations qu’il avait pu avoir par le passé que ça aurait pu lui faire peur. Mais non. Parce qu’il avait compris, même s’il n’avait pas voulu le voir au début, qu’il n’y avait rien d’habituel pour lui dans cette relation. Il se reconnaissait à peine, ne comprenait pas la plupart de ses réactions... Et pour la première fois de sa vie, il s’en foutait. Il se laissait juste porter, parce que qu’est-ce qui pouvait lui arriver de pire ? Ça pouvait mal se finir, il le savait, bien évidemment. La relation pouvait être découverte, auquel cas un renvoi du programme était possible, mais il ferait en sorte d’être pris ailleurs, tant pis. Il avait l’un des meilleurs dossiers qui soit, jamais aucun écart de conduite et quatre ans d’avance sur tous les autres. Andreas pouvait aussi lui briser le cœur, c’était une possibilité. Dans ce cas, il savait qu’il aurait mal, que ce serait probablement extrêmement douloureux et difficile, mais après tout, il avait déjà perdu tellement... Un peu plus ou un peu moins, qu’est-ce que ça pouvait bien faire ? Il était détruit, dans tous les sens du terme, il se foutait de l’être plus. Il fut soudain sorti de ses pensées par la voix d’Andreas et il se mit à distraitement caresser son dos tandis qu’il réfléchissait aux mots justes pour lui répondre. Il soupira finalement puis prit posément la parole. Mentir, tourner autour du pot, ce n’était pas son truc.

« Non, ça me fait pas peur. Pourquoi on aurait besoin de passer tout notre temps ensemble ? Peut-être plus tard, mais pour l’instant... J’pense qu’on peut prendre notre temps pour apprendre à réellement se connaître, avant de s’imposer de se voir tout le temps. Tu l’as compris, mon travail c’est ma vie. Et même si ça fait sûrement de moi un connard, je sacrifierai pas ma carrière pour me consacrer entièrement à une relation, c’est pas moi ça. Et j’pense que c’est ça, l’essentiel. Tu m’changeras pas, et j’te changerai pas. J’m’en fous que tu veuilles pas me voir pile quand j’ai un moment de libre parce que t’as pas envie. C’est ton droit de pas avoir envie, comme c’est mon droit de bosser comme un dingue avec des horaires pas humains. C’est comme ça. »

Il le serra un peu plus fort contre lui, bougeant légèrement pour pouvoir embrasser son crâne avant de reprendre sa position de départ.

« T’as l’droit d’avoir peur. Dios mio j’suis flippé aussi ! Tu crois que je m’attendais à ressentir ça pour un de mes patients, voire à ressentir ça tout court ? J’suis pas du genre à venir sonner chez les gens au beau milieu de la nuit, complètement bourré, pour dire des trucs comme ça. C’est nouveau pour moi, et c’est terrifiant. »

 that's it, i don't care anymore