Je venais tout juste de clore la discussion par SMS avec Darius, mon ancien coloc et qui fut même un peu plus que ça fut une époque. Je dois avouer que de lire ses malheurs m'a un peu paniqué, et c'est pour cette raison que je décida de lui préparer ma fameuse tarte aux myrtilles. Je savais qu'il appréciait et lui redonner un peu de sourire en ces temps difficile ne serait pas un luxe.
Je prépare donc mes ingrédients en sifflotant. Il y a environ trois mois que je n'ai pas eut de colocataires, mais briser ma solitude ne m'a jamais tellement dérangé. De toute façon, la seconde chambre était déjà prête à recevoir quelqu'un. Une fois le tout bien préparé, je place ma tarte au four tranquillement et met une minuterie. J'ouvre un peu la fenêtre, sans penser à enlever mon tablier rose. Ça m'importait peu, je devais l'admettre. J'avais encore un peu de farine sur la joue, mais je suis fier, ma tarte sera une réussite !
Ça sent bon dans mon appartement, il ne manque plus qu'un copain avec qui la partager... et justement, je crois que c'est lui qui arrive. Je souris. Darius est un bon ami et je dois admettre qu'il m'avait manqué.
Je retire mes gants de four que je pose nonchalamment sur la table pour aller lui ouvrir avec excitation.
Je ne me sentais pas bien; les prises de têtes à répétitions avec Lilas, la perte de tous mes vêtements et de mon appartement dans un incendie, mes récentes agressions et mon incertitudes constantes face au silence d’Hadès faisaient que mes crises d’anxiétés avaient non seulement doublées en intensités, mais également en nombre. Je n’en pouvais plus, je tremblais en permanence et j’étais à la rue. Mais genre…vraiment cette fois. Pour la première fois depuis que je suis à Los Angeles, je commence à douter de moi. Alors, qu’est-ce que j’ai fait? Perdu après le rejet de Lilas, j’ai sorti mon téléphone et j’ai écris à une personne que je ne méritais vraiment pas. Pas après ce que je lui avais fait. Clematis Blair. Cet homme incroyable qui avait eu la gentillesse de m’héberger à mon arrivé dans cette ville. Cet homme fabuleux auquel je m’étais attaché et que j’avais quitté sans dire un mot durant une froide nuit d’hiver, parce que je m’étais rendu compte que j’étais beaucoup trop attaché à lui et que j’avais eu peur d’avoir mal, moi la petite bête brisée qui avait tant souffert à l’époque à cause de mes parents.
Aujourd’hui, j’étais perdu et déboussolé et c’était sa chaleur qui m’était venu en tête en premier. Parce qu’Hadès était silencieux et que Lilas avait fait la putain d’erreur de lui dire que j’avais une tête avec moi. Je paniquais, il allait me quitter, c’était évident! Alors je me rendais à cet appartement que j’avais habité pendant quelques semaines et j’ai toqué à la porte. Je retrouvais par là cette impression de déjà vu alors que mon cœur battait à tout rompre. D’ici, je sentais déjà l’odeur de cette tarte aux myrtilles dont il m’avait parlé. Mon anxiété augmenta en entendant son pas aérien. Pourquoi avait-il accepté de me revoir après ce que je lui avais fait? Je me le demandais encore et honnêtement, je craignais une nouvelle gifle. Après mes deux dernières agressions, je ne voulais pas en vivre une troisième.
La porte s’ouvre et le parfum de la pâtisserie m’englobe de façon rassurante. Je retrouve avec nostalgie cet endroit qui avait longtemps été ma maison. Ce premier cocon où je m’étais enfin sentit moi-même. « Clem… » Dis-je avec douceur en esquissant un sourire maladroit, incertain de l’attitude à avoir. Sauf que c’est avec le même instinct qu’autrefois que je m’avance doucement pour le serrer fort dans mes bras et respirer son odeur. Il n’a pas changé, c’est toujours le mec adorable que dans mon souvenir. « Oh mon dieu, tu m’as tellement manqué » Murmurais-je avec émotion sans le lâcher, incapable de ne pas ressentir d’émotion suite à cette retrouvaille. Serait-ce possible qu’il y ait une chose de positif dans cette journée merdique. Je me décolle légèrement de lui et je regarde son tablier rose avec affection tout en venant essuyer avec douceur la farine qui salie sa joue. « Tu n’as vraiment pas changé, Clem » Dis-je avec tendresse.
J’avais l’impression d’être revenu à la maison et ça faisait du bien.
J'accepta cette tendre accolade avec grand plaisir. C'est vrai qu'il était parti très rapidement la dernière fois... sans dire aurevoir...sans prévenir... sans même un merci... mais je ne lui ai jamais tenu rigueur pour cela. Au contraire, ce depart soudain signifiait qu'une opportunité lui était apparue, ce qui était positif. Je ne suis qu un passage, qu'une rencontre temporaire et je n'en suis pas malheureux. Les gens arrivent ici quand ils en ont besoin, pour améliorer leur vie, et repartent ensuite quand tout va mieux. C'est pourquoi je ne nourris aucune rancune envers Darius.
- Merci. Toi tu sembles avoir changé un peu, et tu es magnifiques à voir !
Je lui souris de mon air enjoué habituel.
- La chambre du fond est prête à te recevoir. Si tu as besoin de quoi que se soit, tu n'as qu'à demander. Si je suis au refuge tu as mon numéro de toute façon. Rebienvenu chez toi !
Et je rigole joyeusement en sautillant de joie un peu.
Clematis était tendresse et douceur. C’était la perfection incarnée. Il était impossible de le détester et encore plus impossible de ne pas l’aimer. Il y a plusieurs années, quand j’ai fugué, il était devenu mon phare dans les ténèbres qu’étaient ma vie et m’avait réappris à aimer vivre. Je n’avais pas été le plus sympathique dès le début, enfermé dans ma dépression personnelle, mais à force de douceur et de patience, il m’avait non seulement apprivoisé, mais permis de devenir moi-même. Le véritable Darius Lloyd Mercado. Indirectement, il m’avait permis d’être libre et heureux. Et j’étais tombé amoureux de lui, parce qui ne tomberait pas amoureux de la perfection? Bien sûr, ce sentiment m’avait effrayé puisqu’il se rapprochait monstrueusement de cet événement qui m’avait précipité vers les bras de la mort. Alors j’avais fui parce que la mort me faisait presque aussi peur que l’amour. Pourtant, je retournais vers lui aujourd’hui, alors que je me rapprochais dangereusement des mêmes sentiments sombres que lors de notre prochaine rencontre.
« Tu m’as tellement manqué » Dis-je avec émotion alors que je tremblais dans ses bras, les larmes dans mes yeux menaçant de s’évader dangereusement. Sauf que je ne pleurerais pas. Je ne pleurais jamais. Plus depuis cette tentative de suicide. Était-ce nocif? Oui sans doute, mais j’avais peur de ne plus être capable d’arrêter si je laissais libre court à mes émotions. « Oui…j’ai changé…je le devais… » Dis-je doucement en caressant son dos alors que je ne réplique pas sur le fait que j’étais sensé être magnifique. Normalement, je me rengorgeais de ce genre de compliment, mais je me sentais si dégoutant en ce moment que je ne me trouvais pas sublime du tout. Loin de là. En fait…ma tête me faisait peur et j’avais besoin de sa lumière.
Je le vois là, si heureux et rayonnant et ça me fait mal au cœur. Comment avais-je pu avoir l’égoïsme de ternir sa lumière, dans le passé? Le fait d’être relégué dans mon ancienne chambre me fit sourire tristement. À l’époque, j’atterrissais dans son lit à tous les soirs, terrifiés par les ténèbres qui m’entouraient. Ténèbres que j’avais vaincu au fil des mois et des années. Années qui étaient revenus, suite à toutes ces agressions. « La chambre du fond…je n’ai aucun souvenir de cette chambre, tu sais » Dis-je avec douceur, un peu perdu dans toute cette folie qu’était ma vie en ce moment. Je le regarde, tentant de rester dans le présent et non replongé dans notre passé. « C’est vraiment ok avec toi si je reste? » Demandais-je à nouveau en caressant sa joue du bout de mon pouce pour en retirer la farine. « J’adore ce tablier…je l’ai toujours adoré » Rajoutais-je en caressant la bretelle de son vêtement. Dans le temps, il me suffisait de le voir porter ça pour que ça m’excite.
Tant de temps s’était écoulé. Tant de chose s’était passé. Et pourtant, il ne me détestait pas. Ce mec était un véritable ange sur cette terre.
Je rougis un peu en me grattant l'arrière de la tête face aux propos de Darius et aux souvenirs qu'il faisait remonter
- Ouais... c'est vrai que tu as beaucoup plus utilisé ma chambre que la tienne... et pour ce qui est du tablier, j'avais que j'ai parfois fait un peu exprès de le mettre devant toi pour... avoir droit à certaines choses.
J'étais un peu plus timide sur ce sujet, parce que je n'en étais pas très fier. J'entends la minuterie de ma tarte qui résonne, et je profite donc de celle-ci pour fuir cette discussion. Je sors la tarte aux myrtilles du four et l'éteint, posant celle-ci dans une assiette
- Tu en veux une part, Darius ? je peux aussi l'accompagner d'une boule de glace à la vanille, comme tu le souhaite !
Je prépare aussi ma propre assiette au passage. Certains anciens colocs avaient appelé ma tarte ''la tarte au réconfort''. J'ignore si elle est réconfortante ou pas, mais je sais que je fais toujours de mon mieux pour que les gens se sentent bien en ma présence et oublient un peu leur tracas, au moins pour quelques minuscules minutes.
Je le regarde avec affection. L’époque dont nous parlons était tellement plus facile. On ne se posait pas de question, on faisait ce dont nous avions envie sans pression. Ce tablier me rendait fou à l’époque. C’était peut-être un peu le cas encore présentement. Lilas avait raison, c’était dangereux de venir ici alors que je ressentais toujours quelque chose pour Clematis. Mes mains caressant toujours le textile du tablier, je souris lorsqu’il confirme ce que je pensais à l’époque; il avait réellement porter ce vêtement pour m’exciter. Et ça avait fonctionné. Coup sur coup. Tellement que ça en était devenu un jouet sexuel, presque. J’adorais Clematis à l’époque et force m’étais de constater que je l’adorais encore aujourd’hui. Ses longs cheveux roux, ce tablier…il ne me rendait pas la tâche facile. Je me rapproche de lui et j’embrasse doucement sa joue, près de son oreille. Je retrouve son odeur si particulière qui m’avait tant manqué. « Ça fonctionne toujours, tu sais » Lui avouais-je d’une voix légèrement rauque en caressant toujours le textile.
Sauf que je me recule. Parce que je suis les ténèbres et lui la lumière et que je lui ai fait suffisamment mal pour ne pas avoir envie de recommencer. La minuterie de son four le fait s’éloigné de moi et me permet de reprendre mon souffle. Clematis était dangereux pour moi parce qu’il me rappelait une époque moins compliquée. Une époque où je n’avais pas tué un mec qui avait tenté de me faire la peau, où mon petit copain semblait croire que j’étais avec lui pour son putain de fric et où ma meilleure amie ne me tenait pas responsable d’un cadavre n’ayant pas complètement carbonisé. « Évidemment que je veux une part. Sans glace, je fais attention à mon poids » Dis-je doucement en le rejoignant dans la cuisine, l’observant derrière son comptoir. Oui, il n’avait pas changé et c’était rassurant.
Je l’avais aimé pour cette douceur candide et cet optimisme qu’il possédait et c’était deux qualités si fortes en lui que je ne l’avais pas brisé en partant sans un mot. Ça me rassurait beaucoup et grandement. « Ça sent atrocement bon. Je n’ai jamais réussi à manger de tarte après notre histoire. Aucune ne vaut les tiennes » Dis-je en fouillant dans un tiroir pour en retirer une fourchette. Elles étaient au même endroit que lors de mon dernier jour ici. Je pique la pointe de tarte et je souffle doucement sur le morceau fumant avant de lentement le mettre dans ma bouche. « Mmmmh…c’est tellement bon » Dis-je en fermant mes yeux, léchant mes lèvres pour cueillir une goutte de jus qui s’était échappé de ma bouche.
Darius... du plus lointain que je me souvienne, il avait toujours été un allumeur avec moi... et du plus lointain que je me souvienne, il a toujours réussi. En témoigne mon léger rouge aux joues qui me trahis, et qui m'a toujours trahi. Cette fois-ci, par contre, c'était différent. Je ne pouvais pas cédé. À l'heure actuelle, Darius était un ami qui avait tout perdu et qui avait besoin d'un ami.
- Après notre histoire ? Une histoire n'est jamais terminé tant qu'on en a pas tourné la page...
Je lui donne sa part doucement
- Et de ce que j'ai put voir depuis quelques minutes, elle n'a pas été complètement tournée.
Je mange ma part tranquillement, avec une boule de glace parce que j'adore le sucre. Je le regarde apprécier ma tarte et ça me fait du bien. Le voir sourire et se sentir bien me réchauffait le cœur. Je savais que j'avais fait les bons choix et les bons gestes pour lui.
J’adore ses joues rouges. J’adore sa façon d’être. J’ai toujours aimé Clematis. D’abord en tant qu’amis et ensuite en tant qu’amant. Il avait toujours été tendre et doux avec moi et maintenant que j’étais complètement déboussolé et submergé dans un océan de violence, mon être réclamait sa tendresse alors que mon cœur me hurlait que je ne pouvais pas faire ça à Hadès. Je le vois bien qu'il est mal à l'aise malgré le fait que je reste quand même très distant malgré le fait que je sois collé contre lui. Il ne suffit que de voir le rouge peindre ses joues et ses mains rester sur son assiette pour comprendre qu’il ne lui suffit pas de me revoir pour succomber à mon charme. Charme que je ne possède plus, d’ailleurs.
Je baisse mon regard lorsqu’il mentionne le fait que la page de notre histoire n’était peut-être pas complètement tournée vu mes agissements et mes paroles. Il a raison, je suis un connard. Non seulement je l’ai abandonné de la pire des façons sans un mot d’explication, mais en plus, je jouais avec le feu par rapport à Hadès. Je joue avec ma fourchette sans réellement manger la tarte et ce, même si je crève de faim. Une immense boule se force dans mon estomac et l’air passe de moins en moins bien. Les larmes montent dans mon regard mordoré alors que je tente de garder une certaine fierté…ce qui échoue lamentablement.
« Pardonne-moi » Murmurais-je difficilement en continuant de fixer les piques de ma fourchette comme si c’était la chose la plus passionnante au monde. « J’au…j’aurais pas dû revenir » Rajoutais-je difficilement alors que mes larmes s’écoulaient silencieusement sur mes joues. Je tente de contrôler ma respiration, mais la terreur, l’insomnie, l’horreur des derniers jours et la culpabilité sont trop lourdes pour mes épaules et je craque. « Je..je vais repa…repartir…c’était une m-m-m-mauv…vaise idée » Dis-je à travers mes sanglots de moins en moins contrôlé alors que je laissais tomber ma fourchette tout en reculant comme une bête traquée. Je devais partir pour le protéger de moi, c’était une évidence. J’avais été si idiot de venir ici!
Je m'approche de Darius doucement, le laissant extérioriser ce qu'il ressentait. Je prends avec lenteur ses mains au creux des miennes et les masses un peu avec mon pouce. Lorsque je senti qu'il était temps pour moi de parler de nouveau, j'ajouta sans aucune colère ou jugement.
- Je ne vois pas pourquoi je te pardonnerais, car tu n'as rien à te faire pardonner.
J'affiche un sourire doux et pas trop apparent, pour ne pas gâcher le moment. Je le regarde dans les yeux un moment, puis agrippe un mouchoir pour éponger ses larmes avec une infinie tendresse.
- Darius, tu as toujours fait partie des plus beaux moments de ma vie... Et tu auras toujours ta place dans cet appartement. Tu n'as jamais créé de négativité dans ma vie. Jamais.
Je pose un léger baiser sur sa joue, avec une lenteur appréciable. Je voulais qu'il arrête de se torturer ainsi et qu'il comprenne tout ce qu'il représente pour moi.
- Je suis bien moins fragile que tu ne sembles le croire...
Clematis était un ange de douceur et de compassion. C’était le genre d’homme à s’adapter à tout et qui ne s’imprègne jamais du négatif. Je l’enviais. Je l’adorais. Bon sang, comme je l’avais aimé cet homme. Je ferme mes yeux alors qu’il parle, qu’il dit qu’il n’y avait rien à pardonner. Pourtant, je l’avais laissé de la pire des façons, sans dire un mot ou sans laisser une note pouvant expliquer mon comportement. « Je suis partit sans te dire merci ou au revoir. Je suis partit pour ne pas te dire que je t’aimais…parce que ça me faisait peur » Dis-je doucement en décidant d’être honnête avec lui. Je lui devais bien ça, même si je me doutais bien que son rejet me ferait mal, même si c’était plusieurs années plus tard.
Qu’étais-je donc en train de faire? C’est son regard dans le mien qui me sort de mes pensées et son mouchoir épongeant mes larmes me fait sourire. J’ai l’impression de nous revoir, à mon arrivé à Los Angeles, alors que j’étais perdu et suicidaire. Il avait été mon phare dans la nuit. Celui qui m’avait maintenu en vie, malgré ma détresse. « Tu m’as sauvé la vie, Clem. Tu m’as sauvé et je t’ai fuie par peur » Dis-je d’une voix enrouée alors qu’il m’assurait que je n’avais jamais éveillé de sentiment négatif en lui. Mes mains se posent sur ses hanches lorsqu’il embrasse ma joue. Un long frisson parcouru ma colonne vertébrale suite à cette marque de tendresse. Mon attirance pour lui n’était pas morte, c’était une évidence.
« Tu n’es pas fragile…je le sais bien » Dis-je en le regardant avec tristesse. C’était vrai. Clem était une force de la nature, c’était évident. Quiconque possédant sa philosophie de vie ne pouvait qu’être fort. « C’est moi qui suis faible. Je l’ai toujours été » Avouais-je doucement sans relever les yeux. J’étais pratiquement dans le même état de désespoir que lors de notre première rencontre.
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Jeu 29 Juil - 17:25
ft. Clematis Blair & Darius Mercado