FLASHBACK (2014) - Quantico, Virginia ~ Cette semaine avait été éprouvante pour les recrues de Quantico. Nous nous étions entendus pour les mettre dans des conditions de missions et de multiplier les terrains et les situations intenses psychologiquement comme physiquement. Ca me rappelait ma propre formation. Je me souvenais avoir été sollicité jusqu’à l’épuisement par mes supérieurs qui se faisaient un plaisir de me charger davantage, de me pousser à bout. J’avais tenu bon, mais j’avais aussi dormi comme un bébé les jours suivants. Etre de l’autre côté avait quelque chose de grisant. D’autant plus que j’avais carte blanche et que je pouvais les recaler si j’avais l’intime conviction que certains n’étaient pas dignes d’être agents. Je le voyais sur les visages, ils étaient exténués. Certains, avaient abandonné, certains en avaient même vomi ou pleuré. Et je n’éprouvais aucune pitié ou empathie pour eux. Ils avaient choisi d’être là. J’avais le dernier cours de la semaine, et après un petit discours, je leur avais expliqué qu’on allait faire une compétition à obstacles en binôme prédéterminé afin que les faiblesses des uns soient les forces des autres, et nous terminerions par de la montée à la corde – à mains nues. Histoire de les motiver, j’avais fait la démonstration du parcours avec un autre instructeur en montrant que tout était possible – la seule condition était de franchir la ligne d’arrivée ensemble. Chose que je savais, serait impossible quand on mettait l’homme le plus rapide avec la fille la plus intelligente, ou la femme la plus costaud avec l’homme le plus agile. On avait aussi déterminé les binômes par des caractères bien différents. On voulait voir comment chacun s’en sortait. Il y avait des noms qu’on observait avec plus d’attention. Lennox par exemple. Elle avait tout pour réussir : elle avait une forme physique exceptionnelle, un mental d’acier, elle était intelligente, maligne, mais elle avait un énorme défaut : elle était aussi bornée qu’un taureau dans une corrida. Et ça dérangeait la hiérarchie, parce qu’elle faisait souvent cavalier seul, elle n’obtempérait pas toujours et ouvrait souvent la bouche pour dire ce qu’elle pensait ouvertement. Beaucoup disaient qu’elle serait recalées aux tests psychologiques, mais nous étions quelques-uns à vanter ses mérites au regard non seulement de ses résultats, mais aussi de sa capacité à se sortir de toute situation.
Elle n’était pas surhumaine, et je pouvais voir qu’aujourd’hui, le parcours supplémentaire que je leur avais demandé, avait laissé des traces. Peu de monde arrivait à finir, et je m’époumonais totalement consterné par ce que je voyais : « Nowell, tu vas me dire qu’en pleine opération si c’est trop dur tu abandonnes et tu prends le prochain car ? Recommence si tu veux pas qu’on te renvoie dans les jupes de ta mère. » Un peu plus tard, un autre incapable de se hisser sur la planche, et son coéquipier trop fatigué pour l’aider : « Les gars, rappelez-moi de ne pas faire appel à vous en mission, j’aurais honte à votre place. » Les bras croisés, je levais les yeux au ciel en regardant le second intervenant. D’un signe de tête, on convient qu’il est temps de passer à la corde. Mais là encore, peu de réussite. Je perds patience, et je bouscule un des jeunes en lui remontrant une autre fois : « C’est pas possible de pas arriver à faire ça. » Je me hisse avec facilité à la corde grimpant jusqu’en haut à la force des bras, sans avoir recours aux jambes. « Si c’est trop dur pour vos petits bras, deux choix : le premier allez vous acheter un physique en salle de musculation. Le second, aidez-vous des jambes. » Redescendant, en soupirant je jette un regard à Roxane Lennox : « Lennox, à toi. On va voir si tu es aussi douée pour la ramener que pour monter à la corde. » Des rires dans les rangs. Mais je les ignore et incite Lennox de la main, à se lancer à la corde.
FLASHBACK (2014) - Quantico, Virginia ~ Lorsque j'avais été acceptée à l'académie de formation du FBI, je ne m'étais pas attendue à ce que ce soit un simple parcours de santé. A vrai dire, personne ne nous avait spécialement préparé à ce qu'on allait vivre et je devinais aisément que lorsque j'allais en sortir badge à la main -parce que c'était mon but- je ne pourrais rien en dire non plus. Le FBI était une institution pour notre pays et malgré les recrutements qu'ils faisaient, ils restaient une instance plus que secrète sur la formation et les missions de leurs agents. Je ne savais pas vraiment comment j'en étais arrivée là mais il me semblait que quelque chose m'avait poussé à me lancer... Les bancs de la fac, la vie posée, ce n'était clairement pas fait pour moi, j'avais besoin de bien plus. A vrai dire, j'avais besoin de me dépasser, de ressentir l'adrénaline et potentiellement la perte de contrôle. Peut-être que c'était ce que ressentait tous les flics ou alors c'était simplement ma jeunesse qui parlait. 25 ans et déjà dans les rangs de formation, autant dire que je ne passais pas inaperçu auprès de mes futurs collègues. D'ailleurs, d'après certains je n'avais pas la mentalité d'une jeune femme de 22 ans, et j'étais bien trop entêtée pour ça. Pour autant, je ne comptais pas changer quitte à me brûler les ailes, je ne savais pas être quelqu'un d'autre que moi, Roxy Lennox.
J'avais beau avoir un mental d'acier, les semaines passaient et tout se compliquait. Je savais que nos instructeurs faisaient en sorte de tester notre résistance et je me battais bec et ongles pour me surpasser. Je m'étonnais moi-même, par moment, mais je ne savais pas si ma détermination était bien perçue par ma hiérarchie. Je manquais parfois de patience même si j'avais jusque là fait des efforts là dessus, allant même jusqu'à sauver les fesses de Kate, une autre future agent. Qu'on ose me dire que je n'avais pas d'esprit d'équipe. « Putain mais il ferme jamais sa gueule lui... » se plaignait Jackson alors que l'agent Ellis nous remettait encore une fois en place. « Ça vous fait un point commun. » répliquais-je en le poussant légèrement pour prendre place au point de départ du parcours. J'entendais Ellis crier sur Nowell et je serrais les dents, espérant qu'il ne commente pas ma prestation. Je ne savais pas pourquoi mais je sentais qu'il m'avait pris en grippe depuis le début de la formation et si Kate me disait que c'était seulement car il sentait le potentiel en moi, je n'y croyais que très peu. Nous arrivions tous à la corde, plus exténués les uns que les autres. Notre inspecteur nous démontrait encore une fois qu'il était plein de ressources et je ne pouvais pas cacher que malgré mes ressentiments sur sa façon de faire, il était carrément impressionnant. Si j'avais été tranquille le temps de quelques heures, voilà qu'il avait décidé de me reprendre à partie, sous les railleries des autres. Je lui jetais mon regard le plus froid et m'approchais de la corde, mordant mes joues pour ne pas répondre. « J'suis sure qu'elle est douée au lit aussi... » chuchotait Jackson, mais probablement pas assez bas pour qu'on l'entende pas. Je soufflais et m'accrochais en montant quelques centimètres avant de sentir une douleur latente dans les bras. J'allais lâcher mais il était hors de question que je leur donne cette satisfaction quitte à me défaire une épaule. Malheureusement, la fatigue avait raison de moi et je lâchais la corde pestant un juron avant de m'y remettre immédiatement, laissant les commentaires sexistes de Jackson loin de mon esprit.
FLASHBACK (2014) - Quantico, Virginia ~ On avait beau être intransigeants avec nos recrues. Ces personnes-là étaient déjà de sacrées forces de la nature. On leur demandait d’être bons voire excellents partout. On les soumettait à des épreuves que le commun des mortels n’envisagerait jamais. Certains d’entre eux seraient peut-être amenés à faire partie de l’unité d’élite dont je faisais partie. Mais pour l’instant, je ne voyais cela chez aucun d’entre eux. Parce qu’ils étaient moins dociles que nous l’étions quelques années auparavant. Nous avions beaucoup de respect pour nos supérieurs, ce que cette promotion semblait oublier. C’est la raison pour laquelle on s’efforçait de les mater, de leur faire peur en étant maitres de leurs destins. Je savais que je ne resterais pas formateur, et je m’étais plié aux exigences de ma section parce qu’ils estimaient que j’avais assez de caractère pour dégouter les plus faibles d’entre eux. Ils ne voulaient pas de victimes au Federal Bureau of Investigation, que des gagnants. Etre instructeur ne serait jamais un désir de carrière. Ma hiérarchie le savait, j’étais un homme de terrain, j’abhorrais les discussions inutiles et par-dessus tout, je ne supportais pas l’échec et de voir certains se contenter de ça me laissait sans voix. Heureusement, certains faisaient preuve d’entêtement, ce qui pouvait leur permettre d’atteindre les sommets, mais je restais dubitatif quant au succès des autres. Certains se permettent un peu trop de la ramener, notamment un certain Jackson, qui passe son temps à râler. Fils d’agent du FBI, il est pourtant loin du niveau de son père et il est probablement ici grâce à lui. Peu importe qui il est, je ne lui fais pas de fleurs, bien que je m’abstienne de le prendre à partie la plupart du temps.
Mais cette fois, c’est trop. Alors que j’invite Lennox à se lancer, il se permet de faire un commentaire qui m’agace : premièrement parce qu’il ternit l’image des hommes de loi qu’il représentera peut-être plus tard. Deuxièmement, les femmes qui ont réussi au FBI n’ont rien à envier à leurs homologues masculins. Troisièmement, il a déconcentré Lennox, je n’ai pas besoin de la regarder pour le comprendre. Il faudra qu’elle s’endurcisse à ce niveau. Je fais signe à Lennox de ne pas se lancer, et je reprends la parole en fustigeant le rookie. « Jackson, quand on est incapable de faire un parcours en moins de cinq minutes, on se la ferme. D’ailleurs tiens, t’as cinq minutes pour le faire. Si tu ne le fais pas dans le temps imparti, non seulement tu le referas jusqu’à ce que tu y arrives, ou que tu crèves, j’en ai rien à faire, mais en plus, je laisse à Lennox le choix d’une sanction supplémentaire. » Je pose alors un regard sur la jeune femme et puis je m’avance jusqu’à Jackson en étant plus que ferme et sérieux. « Je me suis bien fait comprendre ? » Et je l’envoie sur le parcours avec le deuxième formateur qui lui servira de chronomètre. Ca le fera taire pendant un moment. Revenant sur mon atelier, Lennox s’élance et ne peut avancer qu’un peu avant de lâcher la corde. « Lennox, sers-toi de tes jambes, tu vas pas me dire que tu sais pas le faire ?! » Déçu d’une prestation de ce type, je secoue la tête alors qu’elle s’y attèle à nouveau pour un deuxième essai. Mais là encore, elle n’arrivera probablement pas au bout, parce qu’elle ne respire pas. « Elle est pugnace, n’est-ce-pas ? Elle est aussi irréfléchie. Au lieu de reprendre sa respiration, elle s’est ruée sur la corde, elle fait la même erreur. » Dépité, je soupire, en me disant finalement que j’ai dû faillir à un moment pour qu’ils ne puissent pas arriver à relever un tel défi. « Je sais pas si vous réalisez mais en mission vous ne serez pas toujours en forme et monter à la corde c’est la base. » Après un nouvel échec de la part de Lennox, je regarde l’heure et décide d’écourter la séance. Je n’en tirerais plus rien, ils sont lessivés, c’est à peine si certains tiennent encore debout. Je reste dur dans mon constat, mais je suis obligé de les mettre en garde. « Bon, je sais pas trop ce que vous espérez avec un tel niveau… je crois qu’on va s’arrêter là pour aujourd’hui, vous pouvez partir… » Il faut que je trouve une solution. Je ne veux pas garder un souvenir négatif de cette séance, si bien qu’alors que je vois la jeune canadienne prendre ses affaires, je la stoppe dans son élan : « Pas toi Lennox. » J’ai l’intime conviction qu’il ne lui manque pas grand-chose pour y parvenir, et je suis sûr que mine de rien, il ne s’agit que d’une colère mal dirigée. « Des commentaires comme celui de Jackson t’en entendras tout le temps. Mais ça ne doit pas bousiller ta concentration. Ca doit être du bruit de fond. » Revenant vers la corde, je lui demandais alors : « Je voudrais que tu réessayes. Et sers-toi de tes cuisses. »
FLASHBACK (2014) - Quantico, Virginia ~ Je ne savais pas qui avait décidé de nous mettre ces instructeurs mais il m'arrivait de me demander si je n'avais pas signé pour entrer dans l'armée plus qu'au FBI. Ils ne nous laissaient pas vraiment de répit et si au début il avait fallu garder son sang froid, je sentais que les nerfs de mes camarades commençaient à lâcher les uns après les autres. Nos instructeurs nous testait, je le savais, je n'étais pas novice en la matière même si personne de ma famille n'avait jamais été dans ce genre d'école. Contrairement à certains, je m'étais renseignée sur le FBI et si ce qu'on faisait ici était un secret bien gardé, tout le monde s'afférait à dire qu'il y avait souvent beaucoup d'appeler mais peu d'élus. Les conditions étaient difficiles et même avec un fort mental, il n'était pas rare de voir les plus forts craquer au bout de quelques semaines. Je ne comptais pas me laisser abattre et il était hors de question que je ne sorte pas d'ici avec ma plaque à la main. Quand je commençais quelque chose, j'aimais le terminer et avec succès de préférence. Jackson était toujours aussi con et je serrais les dents en entendant ses commentaires à la fois sexistes et machistes. Je savais qu'il faisait ce qu'il pouvait pour me provoquer au regard du vent que je lui avais mis quelques jours plus tôt lorsque il avait tenté de se glisser dans mon dortoir. Il se prenait pour le chef de meute mais il n'était qu'une brebis égarée pour moi et si il n'avait pas été dans mon groupe, je n'étais pas certaine que j'aurais ne serait ce que pris le temps de lui donner l'heure. J'esquissais un léger sourire lorsque Ellis le remettait violemment à sa place et évidemment, il m'était impossible de ne pas jubiler. Je me tournais pour regarder mon supérieur avant de regarder Jackson qui semblait se pisser dessus lorsque Ellis faisait un pas vers lui. Il avait beau être grand, il n'avait pas la carrure ni même les muscles du chef. Je me reconcentrais pour monter à cette foutue corde alors que je voulais réussir à la force des bras sans utiliser mes jambes ce qui ne semblait pas convaincre l'officier. Je savais que je pouvais y arriver mais ma tête était plus sure que mon corps qui, même si je luttais, était fatigué. Je lâchais un léger grognement alors que je tombais une nouvelle fois. Je n'étais clairement pas habituée à l'échec. Je relevais les yeux vers lui, tentant de reprendre ma respiration puisque ça semblait être le problème. J'avais envie de répondre à ce qu'il me disait mais à quoi bon ? J'étais déjà vu comme l'insolente de service alors si, en plus, je répondais quand je me foirais, je pouvais m'asseoir sur ma crédibilité. Je n'avais pas du tout envie d'arrêter et je comptais bien rester ici après le départ des autres, voir même de mon instructeur. Alors que j'allais vers mon sac, je m'arrêtais jetant un regard à Kate avant de me retourner vers Ellis. « Pas moi ? » répétais-je bêtement avant de revenir vers lui. « Je me fiche pas mal de se conn... Pardon. » Ok Lennox, t'es devant ton chef pas devant ton pote. « Vous avez raison. » Voilà, c'est mieux. Je le regardais et regardais la corde avant de m'avancer et de tenter de gérer mon souffle. Je devais y arriver, il était impossible que j'échoue et que je découvre la déception dans le regard de mon chef. Je prenais la corde et commençais à monter en m'aidant de mes jambes et plus précisément de mes cuisses. Je devais me rendre à l'évidence, pour l'instant, je n'étais pas aussi forte qu'Ellis. Je montais sentant tout de même le sang me monter à la tête. Je lâchais à quelques mètres manquant tout de même de tomber sur mon instructeur. « Merde ! » lâchais-je sans me contrôler. Je devais y arriver.
FLASHBACK (2014) - Quantico, Virginia ~ L’académie était faite pour former une élite du pays. Forcément, nous n’allions pas les consoler et les rassurer. J’avais été à leur place quelques années auparavant et j’avais tout fait pour réussir. J’en avais dégouté la plupart de par mon abnégation et ma froideur légendaire. Je ne m’étais fait aucun ami, ils me détestaient tous. Et c’était pour ça qu’en tant qu’encadrant, j’étais maintenant apprécié, parce que je malmenais les recrues pour les préparer au pire. Lennox avait beau être tenace, elle fonçait toujours tête baissée. Elle ne supportait pas l’autorité hiérarchique, ce qui amenait beaucoup de questions dans nos rangs à son sujet. Que faisait-elle au FBI ? Nous n’étions pas au-dessus des lois, et certes un caractère comme le sien pouvait être un avantage, mais son entêtement pouvait lui couter cher car elle ne mesurait pas le danger. Et puis, elle pouvait dire ce qu’elle voulait, elle se laissait submerger par ses émotions. Là encore, Jackson le prouvait bien. Quoiqu’il en soit, il éviterait probablement à l’avenir de se donner en spectacle. A moins que son père ne vienne me trouver pour me faire la morale. Si ça ne tenait qu’à moi, je foutrais sa progéniture au trou jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’il valait mieux qu’il fasse de la politique plutôt que carrière au FBI. Congédiant tout l’effectif sauf l’insolente Canadienne de naissance, je cherchais à trouver un moyen de parvenir à ce qu’elle se surpasse. Je n’étais pas pédagogue pour deux sous. Je n’aimais pas les codes sociaux qui poussait un professeur, un enseignant à conforter les apprenants dans leur médiocrité. Alors que Lennox me rejoignait, elle perdit encore de l’énergie à se défendre contre un fantôme, et j’arquais un sourcil, remarquant qu’elle finit par se couper le sifflet volontairement. Soupirant, je lâchais : « La preuve que non. Tu peux dire que c’est un connard, il l’est. Mais on est tous des connards et ça ne doit pas te détourner de ton objectif. » Nous n’étions pas ici pour être gentils. Les criminels sont pires que des connards, ils possèdent tous les vices. La jeune recrue s’élança de nouveau, essayant de mettre en pratique les conseils prodigués, mais encore une fois, elle échoue, mais à une plus courte distance du haut cette fois. Je me décale alors qu’elle manque de s’écraser sur moi, et croisant les bras sur mon torse, je me passe la main sur le visage, soucieux. Est-elle si fatiguée que ses muscles sont déjà en acidose ? Question résistance, elle a des progrès à faire. « Ok. C’est mieux, mais franchement ma grand-mère ferait mieux. Et si tu peux éviter de me tomber dessus, je t’en serais reconnaissant. » Je ne peux pas me permettre d’être trop gentil. Il faut qu’elle comprenne que ce n’est pas admissible d’être court, il faut réussir, peu importe ce qui lui coute. Je pose un regard on ne peut plus sérieux sur elle, et je la malmène une fois de plus : « Je sais pas pour toi Lennox, mais moi j’ai horreur de l’échec, alors ça me ferait vraiment chier que tu sois incapable de monter à la corde. » Il semblerait que cette femme marche à l’orgueil. Toutefois, il est évident qu’elle ne s’y prend pas de la meilleure des façons, et que la fatigue l’accable. Retirant ma veste afin que mes mouvements ne soient pas entravés par cette dernière, je la pose bien pliée dans un coin avant d’expliquer mon idée à la demoiselle. « Bon. On va monter à la corde tous les deux. Je vais tenir tes poignets et hisser tes bras pour que tu sentes le mouvement jusqu’en haut. Quand je te dis de respirer, je veux que tu expires. » L’inspiration se fait naturellement biologiquement ce qui n’est pas le cas de l’expiration et je pense qu’elle a tendance à se contracter un peu trop qu’elle en oublie de respirer. Je me place alors derrière elle, devant la corde, épousant son corps comme le ferait un instructeur de parachute. Saisissant ses poignets, c’est elle qui maintient la corde. Afin que nous ne tombâmes pas tous les deux, je tiens la corde de mes jambes sous ses jambes. La manœuvre n’est pas simple, mais au moins elle sera maintenue. Nous nous élançons, et j’amène ses bras par alternance toujours plus haut. « Respire. » Cette fois, nous faisons l’exercice lentement, ce qui est d’autant plus dur. Nous progressons et une fois de plus, je cherche à ce qu’elle expire : « Voilà, souffle. » Mais évidemment, la fatigue se fait sentir et je sens ses jambes qui glissent sur les miennes, et je m’efforce de la ramener vers le haut. « Non. Tu ne lâches pas, aide-toi de tes jambes. » J’imagine que le dernier effort est probablement surhumain pour elle. Pourtant sa main droite vient toucher le haut. « C’est bon. » Il n’y a plus qu’à redescendre, et je lui demande de lâcher les mains pour glisser avec les miennes et la ramener en bas. Lui laissant quelques minutes de répit, je lui tends une bouteille d’eau pour qu’elle se désaltère. « Maintenant tu essaies sans moi et j’espère que tu as compris. » Mine de rien, cet effort a été assez complexe à maintenir sur un temps plus long pour moi aussi, car elle a beau être plus légère, la hisser à la corde tout en la maintenant au-dessus de mon corps avait été éreintant. Je me désaltère alors un instant, avant de lui répéter : « Il ne faut pas que tu forces en tirant sur la corde, mais que tu te propulses. » Si elle y parvenait aujourd’hui, elle finirait par montrer l’exemple au prochain cours.
FLASHBACK (2014) - Quantico, Virginia ~ Je lançais un regard à Kate et Jenna avant de laisser mon sac sur le banc et de m'avancer vers mon instructeur. Il me prenait souvent en grippe mais je méritais d'être recadrée, je ne pouvais pas le cacher. Cela dit, ça ne m'empêchait pas de lui en vouloir quand il me maltraitait trop même si c'était pleinement son rôle. Personne n'était ici pour s'amuser et nous étions en passe de devenir des agents du gouvernement, il fallait évidemment que l'on soit impeccable et irréprochable. D'après Ellis, il y avait encore du boulot avec notre équipe mais j'étais persuadée que malgré ses dires, il était plutôt fier de nos résultats qui étaient dans les meilleurs depuis quelques décennies. Malgré ça, il continuait d'appuyer là ou ça faisait mal pour que l'on se dépasse et c'était une assez bonne méthode. Nous étions tous épuisés après ces quelques semaines intenses et personne n'avait envie de l'accepter du moins personne dans la hiérarchie. Pendant que mes camarades allaient se reposer, j'allais continuer à souffrir. « Oui... » répondis-je seulement alors que j'étais tout de même satisfaite qu'il le qualifie de connard. Petite victoire. Je tentais de remonter mais je tombais, encore une fois. Ellis s'écartait me laissant comme une serpillière au sol et je me relevais, agacée. « Vous saviez que j'allais tomber, fallait vous décaler. » répliquais-je sans réfléchir alors que je ne supportais pas être prise en défaut, surtout pas lorsque j'étais plus faible que d'habitude. « Je peux y arriver ! » Mais pas après une telle journée, clairement. Je soufflais alors que je devais contrôler ma colère, voir tous mes sentiments. Je savais qu'il me provoquait pour me faire réagir pour que j'utilise le reste de mes forces pour grimper à cette corde de malheur. Je le regardais alors qu'il me proposait autre chose et je le laissais m'expliquer avant qu'il ne se positionne derrière moi. Nous n'avions jamais été aussi proche physiquement depuis notre rencontre et étrangement, si je n'avais aucun soucis avec les contacts physiques prolongés, je ressentais quelque chose d'étonnant. Est ce que l'effet de ses muscles me faisait de l'effet plus que de raison ? Probablement. « D'accord. » Je m'exécutais, inspirant quand il me le demandait et expirant quand il faisait de même. Je tentais de garder la tête froide mais c'était également un combat interne puisque celui que je menais avec mes bras était celui sur lequel je devais me concentrer avant tout. Je montais avec son aide et ce même si j'avais toujours refusé l'aide de quiconque ici. Je touchais enfin le haut redescendant ensuite, les mains légèrement ensanglantées. Je prenais un peu d'eau et si elle me désaltérait, elle m'aidait aussi à éclaircir mes idées. « J'ai compris. » Mieux vaut tard que jamais. Je recommençais une énième fois, serrant les dents en sentant la corde frotter sur mes mains et je montais en forçant sur mes jambes mais en me propulsant plus qu'en tirant, comme on venait de me conseiller. Une nouvelle fois, je touchais le plafond avant de glisser jusque sur le plancher de nos amies les vaches. « J'imagine que je suis moins une déception qu'il y a quelques minutes, pas vrai ? » demandais-je en le regardant alors que même si la fatigue avait atteint chaque partie de mon corps, ma langue fonctionnait toujours aussi bien.
FLASHBACK (2014) - Quantico, Virginia ~ Lennox était probablement mon antithèse. Lors de mes classes au FBI, j’avais été plus que discipliné, ne remettant en cause aucune règle, me contentant d’appliquer ce qu’on disait et de me surpasser dans chacune des situations pour que chaque mouvement, chaque savoir, chaque situation soient maitrisés sur le bout des doigts. Je passais des heures à m’entrainer, si bien qu’on m’avait toujours dit que j’aurais fait un bon soldat. Face à la pression de mes pairs, je ne cédais jamais, je me contentais de les écraser fièrement, à la régulière. Lennox elle, se défendait bec et ongles, ne supportait pas l’injustice, et si elle jugeait que la situation n’était pas à son goût, elle le faisait savoir. Pourtant, elle avait des qualités indéniables, mais là où j’étais aussi placide que l’eau, ce qui ne m’empêchait pas de tout emporter sur mon passage, elle était aussi vive et ardente que le feu. Plutôt que de tenter d’éteindre cette flamme, notre rôle était d’apprendre à la canaliser, à la contrôler pour éviter qu’elle détruise tout. Alors que la jeune femme semble s’impatienter face à son incapacité, je vois que la moindre contrariété la touche davantage, et croisant les bras, j’eus un léger rire hautain face à son insolence. « Tu t’attendais peut-être à ce que je te rattrape comme un chevalier qui vient à la rescousse de sa princesse ? Change de métier, Lennox. » Ce n’était pas un conte de fées. Nous n’étions pas là pour créer des liens autres que celui de respect envers la hiérarchie et l’entraide entre agents, mais visiblement, ils n’en étaient pas encore là, et je n’étais pas là pour la ménager. On apprend mieux dos au mur. Pourtant, elle se relevait encore, malgré ses dires, elle faisait preuve de courage, et tentait de se persuader qu’elle pouvait y arriver. Mais elle avait beau être téméraire, elle s’y prenait toujours aussi mal, alors je lâchais directement : « Arriver à te blesser, oui c’est certain. » Il ne me restait donc qu’un moyen de la faire réussir et c’était de lui montrer le mouvement en cherchant à faire imprimer ce dernier par l’exécution assistée. Il y a une chose à propos de Lennox que j’ai tenté de taire : elle ne laisse pas indifférent. Elle est différente des autres, elle a ce sale caractère qui prévaut, elle est indomptable, mais elle en devient captivante. Et ça me perturbe. Trop. Notamment quand je me retrouve dans une telle position. Il me faut beaucoup de force mentale pour me détacher de cette symbiose, de sa peau contre la mienne et l’instant de repos est le meilleur moyen pour me chasser la jeune femme de l’esprit. Repoussant mes ressentis, elle m’avouait avoir compris la manœuvre que je lui demandais et de façon désagréable, comme je savais très bien le faire, je répliquais : « J’espère que tu sauras l’expliquer à tes camarades car je vais pas m’amuser à monter avec tout le monde. » De toute façon, je serais incapable de monter Jackson ou un autre mec costaud jusqu’en haut. J’avais beau avoir une très bonne condition physique, je n’étais pas Superman. Un sourire se nicha sur mes lèvres alors que je constatai que Lennox atteignit sa cible en haut, cette fois sans mon aide. Cette esquisse disparut immédiatement, retrouvant ma mine renfrognée alors qu’elle descendait de son perchoir. La demoiselle se mit à fanfaronner, et fixant son regard brun, j’arquai un sourcil face à cette réaction puérile, comme si elle cherchait mes félicitations. Observant sa silhouette un instant, je trouvai de quoi râler en un instant, attrapant une de ses mains, l’attirant inévitablement vers moi : « Hm-hm. Et ça c’est quoi ? Tu ne peux pas tenir une arme avec des mains dans cet état. » Observant ses plaies, ce n’était pas grand-chose, mais elle risquait de souffrir en début de semaine prochaine si elle ne les soignait pas. Elle était trop proche, et m’empêchait d’avoir les idées claires. Aussi, histoire de l’éloigner et de calmer sa prétention, d’un coup de balayette je la fis tomber au sol. « Tu devrais apprendre l’humilité Lennox, ça te ferait du bien. » Moqueur, je lui tends quand même la main pour l’aider à se relever et récupère une trousse de premier secours dans le petit placard attenant, en lui indiquant la pile de tapis pour qu’elle puisse s’asseoir. Je prends ses doigts dans les miens pour pouvoir nettoyer ses paumes et les désinfecter. Elle est couverte d’ampoules et d’entailles. Quand j’eus fini de percer ses ampoules et de désinfecter les plaies, je recouvre ses mains de bandages fins, déclarant : « Au final tu sais te servir de tes jambes, c’est déjà ça. Tu montreras l’exemple. » Ca lui fera probablement plaisir de servir de tête de file. Je pense d’ailleurs inciter Jackson a lui balancer des insanités, histoire de voir si elle a retenu la leçon. « Faudra que tu passes par l’infirmerie si demain matin ça ne va pas mieux. » Je croise son regard, et mon ventre se noue à nouveau, et je remarque que je n’ai pas lâché ses mains. Confus, je m’écarte immédiatement. « Désolé. » Et puis je me racle la gorge, reprenant mon sérieux. « Des questions Lennox ? »
FLASHBACK (2014) - Quantico, Virginia ~ En me lançant dans l'aventure qu'était l'académie du FBI, je ne m'étais pas attendue à tout ce que j'avais vécu depuis quelques semaines. Des infiltrations, des enquêtes sur mes camarades, des mises en situations plus que réelles mais aussi un entrainement sportif à la hauteur des Marines. Heureusement pour moi, j'étais de nature sportive même si j'avais, ici, appris à ma dépasser. Cela dit, je n'étais pas une athlète de haut niveau et quand mon corps ne pouvait plus, j'avais beau avoir le mental, il ne suivait plus. « Je vous rassure, je ne m'attendais à rien et encore moins à être traitée comme une princesse. » D'une parce que je n'avais jamais été fan des princesses et de deux parce que je commençais à connaitre mon instructeur et qu'un signe de bienveillance était surement trop lui demander. Je le regardais alors que ses paroles me faisait serrer les dents et je me retenais de répondre puisque ça ne servait à rien. La fatigue pouvait me rendre plus insolente que je ne l'étais déjà et Ellis n'avait pas la patience de certains autres encadrants. Cela dit, il prenait le temps de me montrer voir même de m'aider et je ne savais pas vraiment pourquoi il le faisait mais peut-être voyait il en moi une future bonne agent spécial même s'il ne me le dirait surement jamais ou pas avant mon départ de Quantico. « Parce que vous n'allez pas le faire avec tout le monde ? Elles vont être déçues. » dis-je en souriant légèrement en coin avant de prendre une gorgée d'eau. Oui, cette petite provocation me plaisait parce qu'il n'avait sans doute pas remarqué comment les femmes de ma promo le dévisageait à chaque fois qu'il nous montrait un exercice mettant en avant sa musculature. Je ne tardais pas à remonter rapidement ne voulant pas qu'il trouve encore quelque chose à me redire mais à peine avais-je posé le pied à terre qu'il reprenait de sa voix si attentionnée. Il attrapait ma main me ramenant vers lui et je tentais de la retirer, en vain. « Je vous l'ai dit, je ne suis pas une princesse, ce n'est pas ça qui m'empêchera de tenir mon arme. » Ça me faisait un peu mal mais rien d'insurmontable, j'avais connu pire. De très proches de lui je terminais au sol et je lâchais un grognement. Je ne savais pas ce qu'il avait avec moi mais son attitude commençait à m'agacer. « J'y penserais. » Sans saisir sa main, je me relevais avant de m'asseoir à quelques mètres pour le laisser me soigner. Je regardais nos mains sans grimacer malgré les picotements procurés. « Il faut que je me prépare à ce que tu me repousses encore ? » demandais-je alors qu'il fallait être aveugle pour ne pas voir que dès que nous étions à moins d'un mètre l'un de l'autre, il faisait ce qu'il pouvait pour mettre de la distance. J'avais toujours vouvoyé mes instructeurs mais tout le monde se tutoyaient depuis quelques temps, étant seule avec Ellis, je faisais donc de même. « Parce que je suis un exemple maintenant ? » Je le regardais, n'ayant jusque là jamais pris le temps de décortiquer chaque parcelle de son visage, de ses expressions et de sa gestuelle. J'approuvais de la tête à son conseil, sans détacher mon attention de ce que je découvrais. Depuis le départ de Derek, je m'étais interdis de penser à l'amour, à l'envie et à tout ce qui allait avec mais fort était de constater que même ici, au FBI, il y avait de la tentation. Nos regards se croisent et je le sentais lâcher mes mains, presque gêné. « J'en aurais surement mais pas sur que je puisse les poser... » dis-je en le regardant toujours. Est-ce que cette proximité le gênait autant parce que je ne le rendais pas insensible ? Je tendais la main pour qu'il m'aide, cette fois j'acceptais pour une bonne raison et je me relevais légèrement projeté contre lui.
FLASHBACK (2014) - Quantico, Virginia ~ J’haussais les épaules à la réponse de l’agent en formation. Lennox ne savait pas se taire quoi qu’on lui dise, c’était plus fort qu’elle. Aussi, je n’épiloguais pas sur le fait qu’elle soit une princesse ou non. Il est vrai qu’elle ne se plaignait pas de ses ongles et qu’elle ne semblait pas passer des heures devant un miroir coquète au possible, mais elle avait encore du mal à accepter certains traitements ici qui n’étaient là que pour les préparer au pire. D’ailleurs, c’était également pour ça que je ne fraternisais pas avec eux et que j’instaurais une distance entre formateur et recrue. Quand ils auraient fini leur formation, ça serait différent. Et encore… Les autres instructeurs ici se plaignaient de moi parce que je faisais cavalier seul, que je ne buvais pas de bière en fin de journée avec eux et que je préférais fonctionner tel un loup solitaire. Je l’avais toujours été, je n’allais pas changer pour leur faire plaisir. J’étais ici pour faire mon travail. Et dans mon travail, je savais reconnaitre le talent, puisque je me focalisais sur ce dernier depuis toujours. Lennox en avait. Elle devait juste apprendre à canaliser ses efforts et éviter d’être trop spontanée, mais elle avait une base solide. Il serait stupide de gâcher une telle recrue en la laissant pousser dans le mauvais sens. C’était la raison pour laquelle je tentais de lui inculquer deux trois choses, mais cela s’avérait plus compliqué que ce que je l’aurais cru. Alors qu’elle mentionne d’un petit air amusé la gente féminine de la promotion, je lève les yeux au ciel. Je me contrefous de leurs états d’âme. Haussant une épaule affichant une petite moue, j’admets une chose : « Une raison de plus pour toi d’être détestée ! » Parce que ce cours particulier, si elle en fait mention lui attirera des convoitises et fera encore plus parler d’elle. Ce qu’on disait sur moi, d’autant plus chez les recrues, ne me touchait absolument pas. Alors que j’inspecte ses mains meurtries, des miennes rêches au possible, mais renforcées par le temps et la pratique, elle cherche à se défendre, à retirer sa main que je tiens trop fermement. Posant sur elle un regard droit, le visage fermé, je la blâme : « Donc tu ne connais pas tes limites. Pas franchement bon pour améliorer ton cas ça… » On ne tient pas une arme avec des mains dans cet état, c’est le meilleur moyen de manquer sa cible et de faire des dégâts. Aussi, je jugeais que la surprendre était le meilleur moyen pour lui faire prendre conscience de ses faiblesses, et alors que je vois bien son agacement, j’en dessine un rictus sur mon visage laissant échapper un hoquet de rire. Soignant ses blessures, la jeune femme me pose une question étrange, et je relève le regard vers elle, étonné. « Je ne vois pas de quoi tu parles. » D’une part, elle s’est mise à me tutoyer, mais en plus elle semble penser que je joue avec elle. Que peut-elle bien croire ? A mon sens, elle se fait des idées. « Je t’apprends à rester sur tes gardes, rien de plus. » Qu’elle s’estime heureuse que je le fasse. A sa question suivante, je ricane, parce qu’une fois de plus, elle me prête des propos qui ne sont pas les miens. « Correction, j’ai dit montrer l’exemple. Tu es la seule à être parvenue à monter à la corde après tout. » Et puis ça serait un moyen de voir si face à la pression de ses pairs, elle pouvait réitérer le succès. Je vois bien qu’elle me regarde, m’observe, et moi qui n’aie d’ordinaire que faire du regard des autres, j’ai l’impression qu’elle me scrute, et ça me met un peu mal à l’aise. Elle admet avoir des questions, sans être sûre de pouvoir les poser, et je ne comprends pas où elle veut en venir. Je la dévisage, elle a quelque chose cette femme. Elle dégage un je ne sais quoi que je n’arrive pas à déterminer, jamais expérimenté auparavant. « Pose-les. Je ne vois aucune raison à ce que je ne réponde pas. » Je ne vois pas ce qui pourrait poser problème, complètement naïf sur ce qu’elle pourrait aborder. D’ailleurs, alors qu’elle me tend la main pour que je l’aide à se relever et que je saisis sa main, et elle finit sans que je sache comment, contre moi, et confus, je ne sais pas trop comment réagir. « Pourquoi tu me regardes comme ça, Lennox ? » C’est tout ce qui sort de ma bouche, tandis que mon cœur a décidé de s’emballer dans ma poitrine. Traitre.
FLASHBACK (2014) - Quantico, Virginia ~ Contrairement à mes sœurs, je n'avais jamais rêvé d'un beau mariage, du grand amour et de la vie de princesse. J'avais toujours été intrépide, indépendante et ce même si j'étais déjà tombée amoureuse. Pour moi, l'un n'était pas incompatible avec l'autre, il suffisait juste de ne pas tomber dans le cliché de la ménagère. J'avais tout laissé derrière moi pour entrer à l'académie et même si ça n'avait pas été forcément facile, je ne regrettais absolument pas. J'apprenais tous les jours sur moi, sur les autres et sur ce qu'allait être mon futur métier. Malgré mon caractère et ce que je pouvais dire parfois, j'étais reconnaissante envers nos instructeurs surtout envers Ellis qui malgré sa froideur savait comment faire pour que je me dépasse à chaque instant. Au début, je l'avais pris pour un sale con mais au final, je réalisais qu'il avait su canaliser ma colère, ma frustration et jouer assez avec mon ego pour que j'oublie ma fatigue et que je me dépasse. « Elles n'ont pas besoin de raison pour ça mais... je peux encaisser. » dis-je avec un léger sourire alors que la jalousie ne m'avait jamais dérangée. Je me fichais de l'avis des autres, parfois trop et savoir que certaines filles parlaient -peut-être- dans mon dos coulait sur moi comme l'eau de pluie sur du marbre. « Je suis là pour les apprendre non ? » Je pensais les connaitre mais peut-être que je me trompais. J'avais envie de lui tenir tête et de tenir mon arme comme une grande même avec les mains en sang mais pouvais-je réellement le faire ? Ellis avait l'expérience que je n'avais pas, je devais -même si c'était compliqué- l'écouter plus souvent que je ne le faisais. Je voyais clairement que quelque chose se passait en lui mais j'étais incapable de savoir ce que c'était réellement. Prêcher le faux pour avoir le vrai ou du moins ce que je ne savais pas pour connaitre ce qu'il ressentait était une technique que je maitrisais assez bien et je n'avais pas eu besoin du FBI pour ça. « Je parle de la proximité qui semble te gêner. » répondis-je en le regardant sans ciller des yeux. « Rester sur mes gardes comme toi ? » Je ne savais pas dans quoi je m'engageais mais je m'en fichais pas mal, je ne faisais qu'exprimer ce que j'avais en tête sur le moment. J'approuvais de la tête au fait que je devais montrer l'exemple sans en être un spécifiquement et je mordais ma lèvre inférieure signe d'une légère réflexion interne. « Vraiment ? » demandais-je avant de finir contre lui alors qu'il m'avait aidé à me relever sans sentir sa force, apparemment. Je le connaissais désormais assez pour savoir que si je m'étais trompée sur ce que j'insinuais, il m'aurait froidement remis à ma place en me sommant de dégager de sa vue, je ne devais donc pas être si loin de la vérité. « Et je te regarde comment ? Comme tu n'oses pas le faire avec moi ? » Jouer avec le feu ne m'avait jamais fait peur et après avoir perdu la personne la plus importante -ou ce que je croyais être la plus importante- je n'avais absolument pas peur de me brûler. Je pouvais presque sentir son cœur s'emballer mais peut-être que c'était le mien, allez savoir.
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Lun 24 Fév - 19:43