Quinze heures trente, la sonnerie du téléphone qui me réveille. J’arrive à peine à ouvrir les yeux et je glisse mon bras partout dans mon lit pour trouver mon portable. C’est pire que de la torture. J’ai la tête qui va exploser et les rayons du soleil à travers les rideaux viennent me frapper en plein visage pour en rajouter une couche. J’attrape finalement mon téléphone et je vois que c’est un de mes clients habituels. “Ouais ?” avec une voix cassée et endormi. “On se retrouve au même endroit dans une heure.” Avec lui au moins, c’est clean et y’a pas de question à poser. Ça me laisse largement le temps de me préparer.
Je saute dans la douche, sans traîner, puis attrape des fringues qui traîne sur mon lit. Il commence à être de pire en pire cet appartement, mais je passe tellement peu de temps ici qu’au final, je laisse toujours le désordre s’accumuler. Sous mon lit, j’attrape une boite qui est fermée à clé. Vu le quartier où je suis, j’préfère être un minimum prudente avec ce genre de marchandise. Je sors un sachet d’herbe de la boite que je dépose sur le lit, puis je remet tout en ordre en dessous. Perfecto en cuir sur le dos et mon bonnet pour être un peu plus discrète, je sors de chez moi et me dirige vers le parc où je dois rejoindre mon client.
J’arrive un peu en avance et je m’installe sur le banc, dans un endroit un peu isolé du parc, ou je viens le rejoindre à chaque fois. J’en profite pour fumer, j’avais prévu le coup avant de partir, de rouler ça et le mettre dans l’étui de mes lunettes de soleil. Le tabac, jamais, mais j’aime toujours fumer cette connerie, ça me permet de m’évader un peu, même si c’est artificiel. Finalement, le mec arrive et s’installe à côté de moi. “Salut.” Un peu froide, comme toujours, mais j’ai du mal avec les gens que je ne connais pas, c’est ma barrière et je ne laisse pas n’importe qui la franchir. Je lui donne discrètement le sachet et lui me fait passer une poignée de billets. “Tiens j’te laisse ça, j’vais être en retard pour le taff.” Je lui donne ce que j’étais en train de fumer et me dirige vers la sortie du parc pour aller travailler.
Une fois devant le bar, j’enlève mes lunettes de soleil et je commence par dire bonjour au reste du personnel. Je pose ma veste dans le vestiaire et me dirige derrière le bar pour prendre ma place. J’en profite pour mettre mon sac sous le comptoir, pour l’avoir pas loin de moi. Plus qu’à attendre les clients maintenant, le bar est assez calme pour le moment donc j’en profite pour faire mes préparations.
Leave no stone unturned, leave your fears behind And try to take the path less traveled by That first step you take is the longest stride.
La fatigue se lit sur mes traits. Trop de choses auxquelles penser. Trop de choses à gérer. Entre les sportifs que je gère, l’emménagement certes terminé mais qui demande quelques ajustements et mes entraînements, ma vie tourne à cent à l’heure. Un peu comme à cette époque où je gérais mes études, mes entraînements, la carrière de Tommy et mon job à la pizzeria. C’est tout de même moins exténuant mais quand même. Particulièrement là, alors que je sors des douches après un entraînement intensif. Avec le match de dimanche en Arizona, pas le choix. Intégrer cette équipe a été quelque peu étrange. Passer de capitaine à simple cheerleader est un changement, surtout que je ne m’occupe pas non plus des chorégraphies et que mon premier contact avec l’actuelle capitaine c’est quelque peu mal passé. Tout ça pour dire que j’ai l’impression de ne pas être encore tout à fait à ma place et que ça me fatigue. Tommy me semble avoir moins de difficulté de ce côté-là, à tel point que je vais passer la soirée seule, mon fiancé ayant promis de la passer avec ses nouveaux coéquipiers. Dans un soupire je ferme mon sac de sport, passe la lanière sur mon épaule et sors des vestiaires. Je n’ai pas envie de rester trop longtemps ici et avoir encore plus l’impression d’être invisible. Je n’ai pas non plus envie de rentrer chez moi et être seule dans notre immense villa. Elle a beau être magnifique, je m’y sens toute petite lorsqu’il n’y a pas quelqu’un avec moi. Donc, plutôt que de prendre l’autoroute vers Malibu, je tourne un peu dans le quartier et m’arrête sur le parking d’un bar. Avec mon humeur un peu ras les pâquerettes, boire un verre ne me fera pas de mal. Porte de mon Audi claquée, elle se verrouille lorsque je suis assez éloignée et je pousse les portes du bar. Il est encore trop tôt pour qu’un monde fou s’y bouscule, j’en profite donc pour aller m’installer au bar et souris à la jolie brune qui se trouve derrière. « Bonsoir. » Loin d’être à l’aise dans ce genre d’endroit – ce qui me donne des airs de petite fille apeurée et m’agace – je tente de rester droite. « Je pourrais avoir un Gin Tonic s’il vous plait. » Une bière aurait été plus soft sauf que je n’aime pas ça. C’est le péché mignon de mon fiancé, par le mien et à vrai dire, je suis surtout du genre à ne pas trop boire mais je vais faire une exception ce soir.
Dos au comptoir, j’entends une quelqu’un qui rentre dans le bar et qui vient s'installer au bar. Un bonsoir, qui vient attirer mon attention et je me retourne quand je tombe nez à nez avec elle. J’ai à peine eu le temps d’entendre sa commande que la panique s’installe en moi. Mes jambes commencent à trembler et une chaleur intense envahit mon corps. Est-ce que c’est vraiment elle ? J’ai l’impression d’être en train de rêver. “B… Bon… Je…” Impossible pour moi d’aligner deux mots, je ne sais pas quoi faire. Je n’arrive pas à supporter ce genre de situation. La petite délinquante se transforme en cette fille, que je n’aime pas. Je suis incapable de reprendre le dessus.
Instinctivement, même si je ne sais pas pourquoi, mon réflexe, c’est de m’accroupir pour me cacher derrière le bar. Je me retrouve là, en boule, la panique qui s’installe de plus en plus. Je suis vraiment en train de passer pour une folle. Je dois reprendre le dessus. Inspire. Expire. Inspire. Expire. Un, deux, trois, quatre, cinq. Je fais le compte dans ma tête puis je me relève rapidement et je retombe en face d’elle. “Désolé…” Je me décale un peu sur le côté pour attraper un verre. “Je fais ça tout de suite.” J’ai au moins réussi à garder mon calme pour dire ça, c’est déjà un exploit.
Je commence à préparer son verre mais je ne peux pas m'empêcher de la fixer. Mon regard reste posé sur son visage comme si j’étais bloquée sur elle. Je ne fais absolument pas attention à ce que je fais, c’est alors que je sens quelque chose de liquide me couler sur les doigts. Le shaker est plein à déborder et je viens de mettre de l’alcool partout à côté. C’est pas possible, je ne peux pas continuer comme ça. Je termine tant bien que mal son cocktail et je viens lui apporter avec la main tremblante. Maintenant, j’ai besoin de savoir, je ne peux pas passer toute la soirée comme ça. Je dois reprendre le dessus et être sûr de moi. Avec tout le courage qu’il me reste, je me mets en face d’elle et je me concentre au maximum pour ne pas dire de connerie. “C’est bien vous Tessa ?” Approche un peu direct mais c’est le mieux que je peux faire pour l’instant.
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Sur bien des aspects New York me manque. J’aimais pouvoir voir les premiers flocons de neige tomber sur la ville, boire une boisson chaude en compagnie de mes meilleures amies en nous échangeant nos derniers potins et j’adorais pouvoir penser à la prochaine chorégraphie de l’équipe. Ce sont des petits détails qui pris séparément pouvaient être abandonnés mais tout ensemble … Ça me déprime. Je devrais pouvoir m’y habituer au bout de quelques mois, seulement la fatigue fait que je rumine énormément. La solitude aussi. J’aurais donné beaucoup pour pouvoir passer ma soirée blottie dans les bras de mon fiancé, oublier le reste du monde avant d’affronter une nouvelle journée. Je suis seule et Los Angeles me parait d’autant plus vaste et inconnue. Je doute de pouvoir faire de véritables rencontres dans ce bar mais au moins ça fera passer le temps avant de devoir affronter le calme de la villa. Installée sur l’un des tabourets du comptoir, je souris à la jolie brune dont les yeux manquent de sortir de leur orbite lorsqu’elle me regarde. « B… Bon… Je… » Enchaîne-t-elle en bredouillant. Elle disparaît ensuite derrière le bar et me laisse perplexe. Est-ce que j’ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas ? J’ai une tête à faire peur peut-être ? Quoi qu’il en soit, je m’apprête à lui poser la question en me penchant par-dessus le bar mais elle réapparaît d’un coup en me faisant sursauter. « Désolé… Je fais ça tout de suite. », « Merci … » Ma voix est fluette de crainte de l’effrayer une seconde fois. J’ignore ce que j’ai qui semble la perturber autant puisque, tandis que je l’observe en train de préparer ma boisson, je la vois qui laisse le liquide déborder. Finalement, elle parvient à me servir et je lui tends le billet pour la payer. Bien face à moi, j’arque un sourcil sans trop savoir la raison pour laquelle elle me fixe de cette manière. « C’est bien vous Tessa ? » Euh … Interdite pendant un instant, je me rappelle ensuite que la demande en mariage de Tommy s’est faite sous les yeux d’un grand nombre d’Américains. Niveau discrétion je peux oublier. D’autant plus avec ma famille biologique. « Oui, c’est moi. C’est … c’est pour ça la réaction un peu bizarre à laquelle je viens d’avoir le droit ? » Je lui demande en sentant mes joues prendre feu. La célébrité, être reconnue dans la rue, ce n’est pas tellement mon monde et pourtant je suis en plein dedans quoi que j’y fasse. Mais des soirs comme celui-ci où j’ai surtout besoin de me détendre, je m’en passerais.
Peu de temps après la mort de ma mère, voulant tant bien que mal essayer d’honorer sa dernière volonté, j’ai commencé à faire des recherches sur son fils. Mon demi-frère… Après bon, je dois dire que ce n’était pas tellement difficile, même avec le peu d’informations que j’ai eu venant de ma mère, il suffit de taper son nom sur google pour trouver de tout à son sujet. C’est sûrement ça d’être un sportif connu dans tout le pays. Puis bien vite, je suis tombé sur elle. La demande en mariage qui a fait le tour de la toile, mais pas que ça. Des choses… bien moins joyeuse. Mais son visage, je ne l’ai vu qu’au travers de certaines vidéos ou même sur des articles de presse, mais je ne m’attendais pas à la voir ici, devant moi, dans le petit bar un peu miteux où je bosse.
Je le sais très bien que je ne suis pas prête à rencontrer Tommy, que j’ai peur de lui faire face, peur de sa réaction, peur de ce qu’il va me dire quand je vais lui parler de maman… Peut-être que c’est mon jour de chance en fin de compte, peut-être que c’est elle, la clé qui va me permettre de débloquer toute cette situation. “Plus ou moins ou… oui.” Et voilà que ma petite voix tremblante revient me jouer un mauvais tour. Je ne vais vraiment pas réussir à me calmer. J’ai l’impression que mon cerveau va exploser tellement qu’il surchauffe, il se passe trop de choses là-haut. Je suis en train de me faire mes meilleurs films dans ma tête. Mais aussi les mauvais. “Je… Disons que… Comment dire…”
Espèce de cruche que tu es Meghan, faut vraiment que j’arrête de passer pour une idiote. Je tourne ma langue dans ma bouche et je cherche vraiment ce que je peux lui dire, mais surtout comment lui dire. Je panique. Beaucoup trop. “J'suis ta belle-soeur !” Et merde… Mais bordel pourquoi est-ce que ça m’arrive ce genre de truc. Je n’arrive pas à me contrôler quand je me retrouve dans cette position. Le vouvoiement s’est même envolé tellement que j’suis proche de faire un coma, là, devant elle. En attendant, la bombe est lancée et j’pense qu’après tout ce que je viens de faire, je m’attends à ce qu’elle explose de rire. Surtout qu'en plus, ils ne sont toujours pas mariés...
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Il va bien falloir que je m’y habitue tôt ou tard. Au début de notre relation, Tommy tenait à me protéger des journalistes et des langues de vipère. Ça ne me dérangeait pas, j’ai toujours préféré vivre dans l’ombre que de trop faire parler de moi. La discrétion est quelque chose que j’ai longtemps chéri, sans doute parce que j’ai un passé qui fait que je n’ai pas très envie qu’on creuse un peu trop dans ma vie. J’ai fait ce que je devais pour survivre et m’en sortir, ça ne veut pas dire que j’aime le crier sur tous les toits. Mais c’est mon lien de parenté avec Michael qui a fait éclater mon nom au grand jour. Du jour au lendemain je me suis retrouvée sous les projecteurs avec l’obligation de m’y faire. Ma relation avec Tommy – bien plus ancienne que ce que tout le monde pense – n’a fait que me plonger un peu plus dans ce monde que j’observais de loin. Je suppose qu’il est presque normal que je sois reconnue même si je ne m’y fais toujours pas. Je n’ai aucune envie d’être l’une de ces célébrités vivant à Los Angeles et aux alentours dont la vie est épiée. Ai-je réellement le choix en réalité ? C’est ce qui me met un peu mal à l’aise quand je saisis que la réaction de la barmaid ait peut-être dû au fait qu’elle a dû voir ma tête quelque part. « Plus ou moins ou… oui. Je… Disons que… Comment dire… » J’en viens à espérer silencieusement qu’elle ne s’apprête pas à me demander un autographe ou un selfie. Je n’en ai pas envie et bien que je n’aime pas refuser quelque chose à quelqu’un, je suis venue ici pour me détendre et passer le temps, pas pour jouer à la petite starlette. Pour faire passer l’angoisse qui me noue l’estomac, je commence à boire ma boisson bien corsée en alcool – plus qu’elle ne devrait l’être. « J'suis ta belle-sœur ! » Et là je manque de m’étouffer, avalant de travers le peu que j’avais dans la bouche. Je toussote un peu, tape ma poitrine du plat de la main et sens mes yeux s’humidifier. « Quoi ? » Couinai-je alors que l’air vient amplifier la sensation désagréable dans ma gorge. Je tousse encore pendant une bonne minute avant de poser mes yeux larmoyants sur elle. « Derek trompe sa petite-amie ? » Ça me surprendrait beaucoup mais je ne connais pas Derek si bien que ça. Et puis je n’ai pas d’autres frères – ou sœurs – aux dernières nouvelles, je ne vois pas comment elle pourrait être ma belle-sœur autrement … si tant est qu’elle le soit réellement. Elle a bien fait de le corsé mon verre finalement.
J’aurais vraiment voulu partir en courant pour aller me cacher dans ma chambre si j’en avais l’occasion, là sur le moment. Qu’est-ce que je peux être idiote… Mais j’aime pas me retrouver dans ce genre de situation, directement, je panique et je ne peux plus me contrôler. Elle doit vraiment se demander dans quel genre d’endroit elle vient d’arriver, avec une folle comme moi pour se donner en spectacle. Mais comment est-ce que je dois faire, pour m’expliquer. Je n’y arrive pas, j’ai tout ça dans ma tête depuis des mois, ça devient de plus en plus lourd. Et c’est au moment même où j’ai la possibilité d’enfin parler de cette histoire que je commence à faire n’importe quoi. “Désolé oui… c’est… quoi ?” La par contre c’est moi qui ne comprends pas du tout de quoi elle parle. “C’est qui Derek ? Tu es bien la petite amie de Tommy non ?”
Plus que ça petite amie, c’est bien pour ça que je me permets de lui en parler. Mais je pense que pour elle, la situation ne doit toujours pas être très clair. Je dois prendre mon courage à deux mains et faire de mon mieux pour lui expliquer, car c’est un peu la seule chance que j’ai et je ne dois pas passer à côté. “Bon…” Je lâche une grande expiration, voulant reprendre le contrôle. “On se calme Meghan, tu peux le faire…” en parlant doucement. J’attrape un shooter devant moi que je viens remplir de tequila, puis le bois d’un coup sans broncher.
Mon visage se relève pour regarder Tessa. C’est le moment, je ne peux plus reculer. “C’est une histoire un peu compliquée. Désolé, j’ai vraiment du mal à gérer le stress, surtout devant toi.” J’ai tellement de choses à dire, mais je dois faire simple pour rester concentrer. “Techniquement, je ne suis pas encore ta belle-soeur, vu que tu n’es que fiancée.” Je sors de derrière le bar pour m’installer de l’autre côté, histoire d’être à côté d’elle. “Je suis la demi-sœur de Tommy… Nous avons la même mère. Et… je ne sais pas comment lui dire…” Difficile, je sens que l’émotion remonte et ça me fait mal. “Elle est morte il y a trois mois environ…”
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Honnêtement, je n’ai pas la moindre idée de ce qui est en train de se passer. J’ignore de quoi elle me parle et la raison pour laquelle elle semble aussi nerveuse à l’idée d’être face à … moi. Je n’ai jamais rien éveillé de tel chez qui que ce soit et si c’est parce que je vais épouser l’un des plus célèbres joueurs de football des Etats-Unis … eh bien disons qu’il va me falloir du temps pour m’y faire. Sauf que, imaginant pour je ne sais quelle raison que mon frère trompe sa petite amie – sans doute parce que le terme belle-sœur me fait immédiatement penser à lui – c’est elle qui semble troublée. « Mon frère. » Répondis-je du tac-au-tac alors qu’elle me demande si je suis bien la petite amie de Tommy. « Fiancée à vrai dire, mais oui … » Pourquoi est-ce qu’il a fallu que je précise, moi ? Et qu’est-ce que mon fiancé vient faire dans cette histoire ? Bon sang, je commence à avoir mal à la tête. Trop de questions qui tournent dans ma tête, se bousculent, alors qu’elle contourne le comptoir pour venir à mes côtés. Pourquoi je suis entrée dans ce bar déjà ? Reprenant, elle m’annonce qu’il s’agit d’une histoire compliquée et que le stress brouille un peu ses capacités. Et puis elle continue son histoire, mes sourcils se fronçant de plus en plus jusqu’à ce que ma mâchoire manque de tomber par terre. « Sa … Tommy n’a pas de … » Je ne termine pas ma phrase. Comment puis-je être certaine qu’il n’en a pas ? Sa mère est partie quand il était gamin pour ne plus jamais donner signes de vie. J’ai détesté cette femme pour cette raison et maintenant j’apprends qu’elle a eu un autre enfant alors qu’elle a abandonné le premier ? Ce n’est pas terrible de penser du mal d’une morte, mais quelle saloperie ! « Partons du principe que je te crois, tu attends quoi de moi ? » Parce que si elle m’en parle c’est bien pour une raison, non ? Je trouve ça parfaitement logique, le souci étant que je ne me vois pas annoncer à Tommy qu’en plus d’avoir une demi-sœur du côté de sa mère, celle-ci est morte. De quelle façon est-il supposé accuser le coup ? Et pourtant je sais qu’il mérite savoir et que je serais incapable de lui cacher ça.
C’est plutôt étrange, mais elle le prend assez bien j’ai l’impression. Enfin, du moins, elle semble calme. Ce qui est une bonne chose, c’est certain. De mon côté, je pense que si jamais quelqu’un vient me dire ce genre de truc, j’pense que c’est même plus de la panique… Mais bon, j’ai l’impression que c’est comme une chance pour moi. D’enfin avoir le courage de faire ce qu’il faut. Malgré tout, quand je termine de lui expliquer ma petite histoire, bien que rapide, je vois qu’elle commence à douter, à se poser des questions. Surtout quand je comprends vite qu’elle n’est même pas au courant, pour la mère de Tommy. Notre mère. Comment est-ce que je vais pouvoir lui expliquer tout ça moi, maintenant. Du mieux que je peux, j’imagine. “Je sais que ça peut paraître difficile à croire. Je suis au courant pour Tommy que depuis sa mort… et je ne sais pas quoi faire.”
De son côté, il a sa vie, il est loin de tout ceci. Peut-être qu’il ne veut pas entendre parler de sa mère, ou même de moi, indirectement. Car c’est sur moi que repose ce fardeau, ce message que je dois délivrer qui commence à être de plus en plus lourd. “Quelques heures avant sa mort, elle m’a demandé de trouver Tommy pour lui dire ce qu’elle avait sur le coeur…” Difficile de dire plus que ça, je sens déjà le mal qui remonte en moi et je n’ai pas envie de me mettre à pleurer devant elle. Pas maintenant. Pas comme ça. “Je suis désolé, je ne devrais pas t’embêter avec tout ça… Mais quand je t’ai vu, arriver ici, dans ce bar, je me suis dit que c’était l’occasion ou jamais d’en parler.”
Et plus je parle, plus ça devient facile de continuer. J’ai l’impression d’avoir regagné mon calme, d’être un peu plus en confiance. Il faut dire aussi que ça me fait le plus grand bien de parler de cette histoire, de pouvoir enfin faire sortir tout ça, qui reste en moi depuis bien trop longtemps. “Je n’attends rien de spécial de toi, mais j’avais besoin d’en parler, je suis désolé d’avoir réagi vraiment bizarrement. De base, je voulais venir à New-York, mais quand j’ai appris son transfert ici… Enfin bref, je suis totalement en panique.”
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Je ne sais pas quoi penser de tout ça, de ce qu'elle me dit, de cette bombe qu'elle vient littéralement de lâcher sur moi. Quelles étaient les chances qu'en rentrant dans ce bar en particulier je tombe sur une jeune femme prétendant être là demi-soeur de Tommy ? Sa vie n'est pas un secret. Lorsqu'on devient aussi célèbre qu'il l'est c'est presque normal. Ses fans savent que sa mère est partie quand il était gamin. Ils savent également que son père est un grand avocat. Ils connaissent quelques détails mais sans trop exagérer non plus. Mais, ils savent pour sa mère. Rien ne me garantit qu'elle n'est pas une groupie prête à tout pour s'approcher de lui. Pourtant, il y a quelque chose dans son regard qui me pousse à la croire. Cette douleur et cette tristesse que j'ai vu dans mes propres yeux pendant des années. Des émotions vivent qu'on ne peut pas simuler. Pas comme ça en tout cas. Mais, bon sang, pourquoi nous ? Pourquoi lui ? Notre installation à Los Angeles est plus compliquée que prévue, je le sais. Je le sens. Tommy n'a pas besoin d'un drame familial en plus. Ma tête va finir par exploser à force de trop réfléchir. Difficile à croire selon elle, je trouve ça gentil. Quant au fait de savoir quoi faire … « Je ne suis pas certaine que tu t'adresses à la meilleure personne pour te donner une solution. » Ma première réaction serait de protéger Tommy en lui cachant la vérité. Seulement je n'en suis pas capable et je sais qu'il me dirait mériter de savoir tout ça. Reste à trouver de quelle façon lui annoncer. Parfois j'ai l'impression d'être bonne qu'à lui annoncer de mauvaises nouvelles. « Ce qu'elle avait sur le cœur ? Je suis désolée si je vais te paraître dure, je sais que c'était ta mère, mais elle l'a abandonné. C'était un gamin, il avait besoin de sa mère et elle, elle est juste partie. Elle a eu des années pour lui dire ce qu'elle avait sur le cœur. » Tommy n'a fait qu'hériter de parents indignes qui avaient un enfant mais ne voulaient pas s'en occuper. Demander pardon sur son lit de mort est presque trop facile. Mais je sais que dès qu'il s'agit de mes proches, j'ai tendance à sortir les griffes. « Désolée c'est seulement … Il a beaucoup souffert des abandons qu'il a subit, je veux juste … le protéger. » Mais est-ce réellement mon rôle ? Je peux le soutenir mais le protéger à ce point ? Bon sang je l'aime tellement que l'idée que tout ceci le bouleverse me révulse. « Je ne suis pas certaine qu'il y ait une bonne façon de lui annoncer ça … Enfin je sais que tu ferais mieux d'y mettre les formes … Euh … Pardon, je crois que j'ai oublié ton prénom. » A vrai dire je ne suis même pas certaine qu'elle me l'ait donné.
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Ven 29 Nov - 20:38