Le manager de Tomas s'était éclipsé avec le téléphone de celui-ci, arrivant au bout de ce qu'il pouvait faire pour tenter de le raisonner. Il accumulait les coups d'un soir, se montrait avec chacune de ses conquêtes, se plongeant dans un torrent médiatique. Ne sachant plus quoi faire et en dernier recourt, il finit par appeler Ben, avec le téléphone de Tomas.

Le bip du téléphone finit par se stopper. Voyant que l'acteur a répondu, le manager prit directement la parole. « Monsieur Patterson ? C’est le manager de Tomas, auriez vous un instant à m’accorder, s’il vous plait ? »

Il n'y croit plus. Cela fait trois semaines, et Benjamin n'y croit plus. Il a tenté. Envoyer des sms. Joint ses proches - enfin, un, plus particulièrement. Mais Tomas ne veut plus lui parler. Et pire, il assiste, impuissant, à ce torrent médiatique autour de la jeune star. Tomas a droit à un article par jour, ou presque. Pour chaque fois le montrer avec une nouvelle personne. Et chaque fois, Benjamin encaisse. Comme il peut. Et avec quelques bonnes bouteilles.

Alors quand sur l'écran de son smartphone apparaît le nom de Tomas, Benjamin met quelques instants à réaliser. Mais dès que c'est fait, il décroche, plein d'un espoir fou... aussitôt doucher par cette voix qu'il connaît un peu, à peine. Et sa propre voix est sans doute trop froide quand il demande : "C'est moi. Qu'est-ce que vous voulez ?" Lui voudrait juste parler à Tomas...

Le manager soupire, il doutait que ce soit une bonne idée, mais il ne voyait que comme ça. Il n'y avait qu'en les confrontant tous les deux. Sa famille pourrait tenter de le calmer mais... Il n'était pas sûr que ça fonctionne. Pas quand ça fait déjà trois semaines que ça dure.

« Que vous veniez réparer vos erreurs. Il se détruit à petit feu et il n'y a que vous qui arriverez à le calmer. »

Il ne s'attendait pas à ça. Il ne s'attendait à rien, il faut dire, trop surpris par cet appel imprévu. Pas eu le temps de s'y préparer, pas eu le temps de poser de question. Mais non, ce qui est certain, c'est qu'il n'avait aucune espèce de chance de s'attendre à ça. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que cet appel, pour le moment, est loin d'être une partie de plaisir : "Ecoutez, Joel, je ne sais pas ce que vous a dit Tomas exactement, mais il refuse actuellement de me voir, mais également de me parler. Je suis désolé, mais vous allez devoir faire sans moi." Ce n'est pas qu'il n'a pas envie de le voir. Il en crève d'envie. Mais Tomas lui a bien signifié que ça ne servait plus à rien désormais...

On pouvait sentir l'agacement de Joel dans sa respiration au bout du fil à mesure de ce qu'il appellera des geignements. De la lâcheté pur et dur. S'il y avait bien un moment où il se devait d'avoir ne serait-ce que du courage, c'était maintenant.

« Arrêtez donc de vous complaire dans votre lâcheté et secouez vous le cul. J'en ai rien à foutre qu'il vous a dit ne plus vouloir vous parler ou vous voir. Portez vos couilles et allez le voir si vous voulez pas définitivement le perdre. »

Les mots l'énervent, mais moins que ne l'énerve la déception de ne pas pouvoir parler à Tomas directement alors qu'il s'y était presque attendu après avoir cru que ça ne serait plus jamais. Alors il lâche entre ses dents, furieux et clairement agacé : "Je ne vous permets pas..." Comme si l'autre avait besoin de sa permission, tiens ! Mais au delà du ton trop brutal, les mots touchent et font mouche. Et après un silence, Benjamin finit par répondre : " Vous voulez que j'essaye ? Très bien. Dites moi quand il est chez lui, je ferai le nécessaire. Mais s'il me jette dehors, je ne pourrai pas aller contre sa volonté." Et il est quasiment certain que ça arrivera. Jamais Tomas ne le laissera s'approcher.

« Oh, me permettez pas, moi je me le permets. » qu'il répond de l'arrogance qu'il pouvait parfois faire preuve. Mais il se mettait surtout au même niveau que lui. « Je me permets parce que Tomas est en train de réduire sa vie en miette, à cause de vous. Vous avez cassé vous réparez. C'est aussi simple que ça » . Voyant qu'il se décidait, il répondit d'un simple « Il est sorti, vous avez qu'à suivre les tabloïds, je suis quasiment sûr qu'il va pas rentrer tout seul. »

"... Je vous préviens. Je vais pas venir s'il ramène quelqu'un chez lui." Ca... Ca, c'est au dessus de ses forces. Alors oui, toute cette situation est de sa faute. Oui, il veut plus que tout, plus que son propre bien être, que Tomas aille bien, enfin. Qu'il arrive à dépasser la douleur qu'il lui a lui-même infligé pour aller de l'avant. Même si ce doit être avec quelqu'un d'autre, oui. Mais aller le voir, aller lui parler, alors qu'il ramène un coup d'un soir ?

Mais il y a une chose qui l'alerte, soudain. Et il demande, inquiet, et peut être même vaguement accusateur : "Pourquoi vous avez son téléphone s'il n'est pas là?"

Il soupire bruyamment à l'entendre encore trouver une excuse. « Bah vous attendez que l'autre parte. Démerdez vous. » qu'il lui balance alors, cherchant pas à y mettre les formes. Il le fait rarement. « Parce qu'on était en train de se disputer sur la situation et qu'il a décidé de ne pas m'écouter, donc il est parti et l'a laissé là. Simplement parce qu'il se fiche d'absolument tout. »

Il insiste et Benjamin ne sait pas comment réagir. Il ne peut pas faire ça. Il ne peut pas le voir avec n'importe qui, comme ça, comme si rien ne comptait. Comme si Tomas pouvait enchainer les histoires d'un soir et que rien n'avait d'importance. Comme si Ben n'avait était qu'un numéro parmi tous ceux qui s'enchainaient maintenant dans son appartement - et ailleurs, peut-être, poiur ce qu'il en savait.

Mais c'est trop grave, et Benjamin n'est pas idiot, il peut très bien le comprendre. Il a lu les articles, déjà, et puis maintenant les propos de Joel... Ca ne ressemble pas à Tomas. Pas du tout. Et c'est tout ce qu'il lui suffit, en réalité, pour se décider : "Très bien. J'arrive. Essayez juste de pas me laisser poireauter dehors sous ce temps pourri." Parce que oui, quitte à venir, il espère au moins que Joel le fera rentrer.