13 avril. Je bossais sur cette mission depuis des mois. Je pouvais littéralement dire que j'avais mangé, dormi et même bu cette affaire. Tout avait commencé par une simple arrestation puis un interrogatoire qui avait soulevé plus que tout ce qu'on aurait pu imaginer. Mon chef m'avait, à un moment, dit que cette affaire pouvait faire tomber de grosses têtes et qu'il ne fallait pas qu'on se plante au risque de perdre nos badges et nos carrières. En somme, ça ne rigolait pas. Le jour J était enfin arrivé et j'oscillais entre l'excitation et l'angoisse... La veille, j'avais passé la journée dans le jardin de mon frère et de ma sœur, a siroter des verres entre deux plaisanteries. Actuellement, j'étais armée jusqu'aux dents avec un gilets par balle qui devait peser la moitié de mon poids. La vie était parfois étonnante. Je jetais un regard à mon équipe alors que nous étions arrivés vers un entrepôt du sud de la ville, là ou un échange d'argent devait se faire entre deux grosses têtes du trafic. Parce que rien n'était simple dans cette affaire, le trafic de drogue avait laissé place au trafic d'argent sans parler des détournements de fond que nous avions vu passer lors de notre surveillance. « Tu verras Rivera, après cette mission, tu ne pourras plus te passer de nous. » lançais-je au flic en esquissant un sourire, enfilant ensuite mes lunettes de protection. Il fallait qu'on se détente un temps soit peu avant d'entrer dans le vif du sujet. Nous risquions nos vies et même si on était payés pour ça, ça n'enlevait pas pour autant la peur. Peur tout à fait légitime d'ailleurs puisque un Homme sans peur n'était qu'un fou. Une fois garés, nous sortions discrètement nous mettant rapidement en position. Je faisais signe à Jane d'avancer et je la couvrais avant de rejoindre Damian. « J'ai un visuel. » indiquais-je à l'équipe via le micro de nos combinaisons. Les hommes étaient là, on ne pouvait pas encore voir leurs visages mais au vu de leurs tenues, ce n'étaient pas des vendeurs de sandwichs. On se rapprochait doucement mais surement, aussi furtivement que ce que nous avions appris lors de notre entrainement pour devenir agent spécial. Ce coup là était le coup de nos carrières, on avait pas le droit à l'erreur.

13 avril. Damian était arnaché comme rarement. Coutumier du simple gilet pare-balles et d'une arme de poing ; aller sur le terrain avec Lennox n'avait rien de la sinécure habituelle. Lui qui bossait généralement selon ses propres règles - ouais même s'il y avait bien son chef - devait aussi conjuguer avec le fait de devoir se plier à la discipline imposé par le FBI. Ils devaient agir conjointement alors ouais, logiquement Damian se retrouvait sous le commandement de Roxy. Tout ce qui importait, c'était que le boulot soit bien fait. Qu'ils tapent dans le mille avec cette intervention en grandes pompes. Si le FBI occupait le terrain avec l'équipe de Roxy et quelques snipers positionnés sur les toits stratégiques ; des collègues du LAPD allaient mettre en place un barrage filtrant selon les directives que leur unité donnerait. Le flic resserra son gilet et chargea son pistolet avec un clic sonore lorsque la cartouche s'enclencha. Toutes autres pensées avaient déjà été chassées de son esprit. Ce frisson qu'il ressentait, c'était un mélange d'excitation et la pleine conscience de ce qu'ils allaient risquer. Leur peau. Assis dans une wagonnette banalisée, le groupe d'intervention avait pris la route jusqu'à un vieil entrepôt situé dans le sud de LA. L'adresse leur avait été fournie quelques jours plus tôt par l'un de leurs contacts. Ils n'avaient eu que peu de temps pour se préparer. « Tu verras Rivera, après cette mission, tu ne pourras plus te passer de nous. » Sourire du flic, assis avec les autres agents sur la banquette arrière. « Ouais, on en reparlera après. » plaisanta Damian en complétant sa tenue. Gilet de protection, casque, lunettes de protection, protège-tibias et plusieurs armes de différents calibres... La liste était à rallonge. Une fois à l'intérieur, il ne pourrait compter que sur cet attirail et ses réflexes de flic. Sa concentration était maximale lorsqu'il quitta le véhicule avec le reste de l'équipe. Il était fixé sur l'objectif : faire tomber ces connards. Damian avançait lentement dans la nuit, arme chargée collée contre lui. Longeant un complexe d'immeubles à pas feutrés, il se rapprochait de l'entrepôt par l'angle est. Jane devant, Lennox le rejoint bientôt. « J'ai un visuel. » Arme en avant pour couvrir Roxy qui n'utilisait plus d'angle mort, le flic demanda. "Combien ?" Elle était les yeux et les oreilles de l'équipe sur ce coup là.

13 avril. Aucun de nous n'avait le droit à l'erreur sur ce coup et il était hors de question que les choses tournent aussi mal que la dernière mission de Blake. Je ne savais pas comment il avait réussi à s'en remettre ou si il s'en était réellement remis mais perdre ses hommes n'était certainement pas quelque chose qu'on pouvait oublier. J'avais bossé comme une acharnée sur cette mission et j'avais même recruté Rivera qui était de loin, l'un des meilleurs flics de Los Angeles avec un réseau qui nous avait été plus qu'utile. Je n'avais pas encore réussi à le faire passer du côté obscure (les fédéraux en soit) mais je ne m'avouais pas vaincu surtout pas si cette opération était une réussite. Il fallait savoir repérer les bons éléments, je l'avais appris très tôt et je ne l'avais jamais oublié. Après les petites plaisanteries, il était temps de se remettre au sérieux et une fois que nous n'étions plus couvert par notre habitacle, tout le monde se concentrait pour se protéger les uns les autres mais surtout pour attraper ces salopards qui nuisaient à notre ville. « Deux... Il y a des hommes sur les côtés, je dirais 6 à confirmer. » répondis-je à Rivera avant d'avancer pour entrer dans l'entrepôt. Dawson et Buchanan prenaient leurs côtés tout comme les autres de l'équipe. Nous avançions toujours aussi bien organisés et petit à petit que ce soit le FBI ou la LAPD, nous formions un cercle autour de ces malfrats et je ne voyais clairement pas comment ils pouvaient s'en sortir. « A mon signal. » soufflais-je alors que l'échange allait se faire sous peu et à peine l'un des hommes avait il donné la valise à son interlocuteur que je criais. « Maintenant ! » puis « FBI, on ne bouge plus ! » Je pointais mon arme vers eux mais avant qu'on ait le temps de cligné des yeux, une énorme explosion retentissait dans l'entrepôt nous projetant tous au sol. La déflagration avait été tellement forte que je n'entendais plus rien, seulement un ultrason plus que désagréable. Je tentais de reprendre mes esprits mais je sentais une énorme douleur à la tête ainsi qu'au ventre. Sans le savoir j'avais un bout de métal planté dans ce dernier et c'était aussi la raison qui m'empêchait de respirer. Je ne voyais plus rien, j'étais là sans être là... Je voyais des gens autour de nous, peut-être des renforts restés dehors au cas où. J'espérais que ce n'était pas les trafiquants à vrai dire sinon j'étais fini même si actuellement je ne donnais pas cher de ma peau. Je glissais des yeux, les posant sur Rivera à quelques mètres de moi. Du sang coulait de ma bouche mais j'essayais d'articuler. « Riv..e...ra... » A peine audible mais c'était ma seule tentative de survie.

13 avril. « Deux... Il y a des hommes sur les côtés, je dirais 6 à confirmer. » répondit Lennox. Ils étaient au moins le double coté FBI et LAPD. Le calcul était plus que rapide, ils les tenaient. D'une manière ou une autre. « A mon signal. » lança Roxy. Ils étaient à quelques minutes de pénétrer dans le bâtiment. Traits figés, Dam' - probablement au même titre que ses collègues - se tenait prêt à faire feu. Chaque muscle opérationnel pour s'introduire rapidement dans l'entrepôt, à compter du Go de Lennox. « Maintenant ! » L'assaut était donné. Des pas rapides, précis. L'arme devant pour couvrir sa progression, l'oeil dans la lunette de son semi-automatique. ça changeait de son Glock habituel. « FBI, on ne bouge plus ! » Le groupe était devant eux, valise en main. Du liquide, de l'argent sale. Gagné au prix d'un vaste trafic dans les rues de la ville et de plusieurs têtes probablement tombées. A commencer par des collègues du FBI et du LAPD. Le flic avait pu rattacher, de près ou de loin, plusieurs affaires à l'enquête en cours. Bande d'enflures.

Une détonation sinistre, violente. Sous l'effet de la déflagration, le flic se retrouva violemment projeté en arrière. Un vol plané de plusieurs mètres avant d’atterrir avec fracas sur le sol en béton. Ses yeux s'ouvrirent, analysant faiblement les alentours. On n'y voyait que dalle à cause de la fumée et de la poussière en suspension. Sa respiration était difficile, sa bouche terriblement pâteuse. Rivera fut pris d'une quinte de toux interminable. Comme une sale impression d'avoir avalé de la poussière en masse, comme si cette merde tapissait toute sa gorge. Il peinait à retrouver son souffle. L'air ne rentrait que difficilement, forçant ses poumons à fonctionner à un débit réduit. Son épaule et son flanc gauche lui faisaient un mal de chien. Des tâches de sang projetées à l'intérieur de son casque signifiait que la tête avait pris. Dans sa chute, son casque de protection avait morflé. Le flic tenta de se relever, au prix d'un déchirant cri de douleur. Arme toujours à proximité, le flic n'avait que deux options. Attendre de crever sur place ou bouger de là. Bougeant difficilement sa jambe droite, Dam' rassembla ses forces pour tenter de bouger la seconde. Glisser. Centimètre par centimètre. Tout sauf rester ici. Chaque avancée le faisait un peu plus serrer les dents. Putain qu'il avait mal.

Lennox. Putain. Tête sur le côté, ses deux yeux vitreux étaient braqués sur le flic. Un frisson le parcourut en devinant le filet de sang qui sortait de la bouche de Roxy. Le flic pouvait sentait la peur se réveiller dans ses tripes. Un sentiment viscéral. Il n'avait pas signé pour cette mission pour qu'ils y laissent l'un des leurs. Dans un ultime effort, lui décochant un long gémissement plaintif, Damian se traîna au niveau de Lennox. La fédérale avait un morceau de verre logé dans l'abdomen. Le flic appuya sur son intercom intra-auriculaire. Celui du gilet était mort.  « Lennox. » lança t-il faiblement, à deux reprises.  « Agent à terre.» poursuivit-il pour alerter les équipes extérieures du bordel ambiant. Le bruit de l’explosion avait déjà dû alerter le reste des unités. Les dents serrés sous l'effet de la douleur, Rivera espérait que ces fils de pute allaient être récupérés par ses collègues au barrage. Il se ferait un plaisir de les confronter dans les bureaux du FBI. Ça, c'était s'ils s'en sortaient.  « Tu m'entends ? » demanda Rivera à l'affût du moindre signe. Bordel, même l'espoir le plus mince qu'elle allait s'en sortir. Et dans le calme presque assourdissant, il lui sembla entendre un faible bruit de respiration. Instable mais bien là, putain.  « Lennox, si tu m'entends. On va te sortir de là.» Il avait du mal à articuler, cherchait ses mots. Le flic avait encore du mal à faire complètement le point sur ce qu'il venait de se passer. Un putain de piège. Voilà à quoi ça ressemblait. Il lui semblait entendre des bruits sifflants, probablement les tirs des snipers en action à l'extérieur.  « Reste avec moi.» ordonna t-il presque à la fédérale en voyant ses paupières se baisser.  « Lennox, reste avec moi.» répéta le flic au prix d'une nouvelle quinte de toux. Un léger craquement. Le flic brandit son arme avec le seul bras encore valide, aussi haut que ses muscles meurtris le lui permettait. Bouge enfoiré et je te tire, songea Rivera. Une silhouette se dessinait. Plus elle se rapprochait, plus le flic se préparait à appuyer sur la détente. Et au moment où le coup allait partir, son doigt relâcha la pression. C'était Ellis.

13 avril. Un témoignage de plus dans une affaire qui touchait à un sujet qui me tracassait. Un mystérieux tueur de garçons hispaniques, tous du même âge, et un horrifiant modus operandi. Je n’avais pas les commandes de l’affaire, on estimait que je devais encore reprendre progressivement, parce qu’évidemment, la mort de mes collègues était encore dans toutes les têtes. Mais je me pliais aux exigences du FBI, sans rechigner. J’avais de la chance d’être apprécié et qu’on ne m’ait pas relégué aux archives. Je regardais instinctivement l’heure sur mon tableau de bord et écoutait la radio du FBI afin de connaitre les avancées de l’affaire dans laquelle ma fiancée s’était investie comme jamais. Et ce que j’entendis me fit rater un battement. Regardant avec effroi mon coéquipier pour essayer de déterminer si j’avais bien entendu qu’il y avait une explosion, je ne réfléchissais pas une seule seconde. Ni une ni deux, je faisais un 360 sur la route, roulant à toute vitesse, si bien que mon collègue se demanda ce que je faisais. « Tu ne poses pas de question, on va là-bas. » Je n’avais aucunement l’intention de demander la permission à mes supérieurs, encore moins de repasser quelque part pour m’équiper davantage. C’était risqué, mais la vie de ma fiancée était en jeu. Inquiet comme jamais, je pouvais sentir les battements de mon cœur jusque dans mes tempes. J’envoyais un message rapidement sur le portable de Roxy en espérant avoir un retour, le temps de me rendre jusqu’à l’entrepôt. Mon collègue tentait de me dissuader en m’affirmant qu’une équipe était déjà sur place et en route. Je ne lui répondais pas. Tant que je n’aurais pas vu Roxy, je ne relâcherai pas la pression. J’appelais le geek de mon équipe, Haynes, pour qu’il me donne des informations, et il m’annonçait que Rivera avait annoncé qu’un agent était à terre. Je le sommais de me trouver le nom, et tout ce qu’il trouva à dire c’était que dans mon état, c’était dangereux d’y aller. Je raccrochais. Personne n’allait me dire ce que je devais faire. Pas de réponse de la part de Roxy et si d’ordinaire, je savais qu’elle n’avait pas son téléphone en mission, j’espérais qu’elle l’ait récupéré pour me rassurer. Arrivant sur les lieux, je sortais en trombe de la voiture, me désintéressant de tout ce qui m’entourait, brandissant mon arme et faisant fi des hurlements qui me sommait de rester en arrière. Je n’étais plus moi-même. Mon collègue me rattrapa pour me tendre un casque sans savoir pourquoi je m’engouffrais dans la fournaise. Je ne pensais qu’à elle, j’avançais au rythme des tirs, dans un épais nuage qui me rendait vulnérable, mais j’étais persuadé que les malfrats vivants avaient pris la fuite. Ce n’était pas eux qui m’intéressaient. Le sol jonché de débris, rendait ma course plus difficile. J’entendais des hurlements de douleur, comme un champ de bataille, et j’essayais d’entendre une voix féminine mais rien, jusqu’à ce que j’arrive devant Rivera et… Roxy. Mon visage se décompose. « Noooooooooon ! » Je me jette au sol, pris d’une émotion que ne parviens à maitriser, et je regarde Rivera, le visage défiguré par la douleur ressentie où je vois le corps de ma fiancée sans vie. Mon coéquipier m’a suivi malgré lui. Je lui hurle dessus : « Appelle 911 ! DEPECHE-TOI ! » Mais ils ont déjà été appelés je le sais. J’observe Roxy, la blessure qu’elle a au ventre. Je ne suis pas médecin, mais l’adrénaline me fait agir. Je retire mon gilet pare-balles, puis ma chemise, la déchirant. Il faut que j’arrête le saignement et vite. « Rivera, c’est ça ? Je vais retirer le bout de métal, je veux que dès qu’il est extrait, tu fasses pression avec tes mains sur sa plaie, et je me fous que tu ressentes une douleur extraordinaire ou que tu tombes dans les pommes, tu ne la lâches surtout pas. » Je contrôle le pouls de Roxy, il est faible, très faible. Je ne sais même pas si elle va survivre, mais je dois tout faire pour ne pas la perdre. Je ne suis rien sans elle. « Rox, si tu m’entends, je veux que tu sois forte… » Je regarde Rivera. « Prêt ? » Je ne veux pas imaginer ce par quoi elle passe. Je retire le bout de métal de son abdomen et prépare un bandage de fortune en espérant la préserver d’une infection et d’une hémorragie. On respire mal ici, une fois le bandage sécurisé alors que Rivera a retiré ses mains au bon moment, je tente d’insuffler tout mon oxygène à ma fiancée, posant ma bouche sur la sienne pour l’aider à respirer. Je ne compte pas pratiquer de massage cardiaque à cause de sa plaie ouverte, sur laquelle je fais pression pour l’empêcher de trop couler. Les secours arrivent, et j’ai du mal à respirer, ma vue se trouble, mais j’essaie de me raccrocher à la réalité. Péniblement, je remercie le flic pour son aide : « Rivera… si elle survit… je te dois… la vie. » Il est mal en point, et pourtant, il s’est démené pour la protéger. Je ne l’oublierai pas.

13 avril. Des missions, j'en avais fait des centaines. Des entrepôt, j'en avais visité en tête d'équipe, tout autant et j'étais toujours ressortie indemne ayant toujours appris de mes erreurs passées. Cette mission aussi importante soit-elle, ne devait être qu'une de plus. On devait bien évidemment tous rentrer chez nous le soir même ou le lendemain matin tout au plus. Ce soir, ce n'était pas des Hommes qui allaient rentrer mais des souvenirs et des médailles. Tout aurait du être parfait, tout aurait du bien se passer. Mais pourquoi les choses avaient aussi mal tourné ? Une explosion qui avait surprit tout le monde autant dans le camp du FBI que des malfrats. Peut-être que tout ça avait été prévu, que quelqu'un avait balancé que les fédéraux seraient sur place et qu'il fallait les éliminer quitte à perdre quelques hommes et deux ou trois cent milles dollars. Il y avait tellement de possibilités quant à cet échec que j'aurais pu en avoir la tête qui tourne. Malheureusement, je n'étais pas apte à penser, juste à tenter de me battre pour ma vie. Ma tête avait cogné si fort contre le sol que j'avais du mal à savoir si je n'avais pas le crâne à moitié ouvert tellement il me brûlait. Je ne sentais plus le reste de mon corps et je savais au fond de moi que ce n'était pas du tout une bonne chose même si la douleur que j'aurais pu ressentir m'aurait surement fait m'évanouir. Cela dit je partais du principe que si j'avais mal, c'est que j'étais encore en vie. « J'ai... ma... mal... » dis-je avec la plus grand difficulté tout en suffoquant. J'essayais de bouger ma main pour le toucher mais je n'y arrivais pas, mes forces m'avaient littéralement quitté. Je regardais Rivera toussant en même temps et même si sa voix était présente, elle était de plus en plus éloignée. Je m'enfonçais littéralement et l'envie de fermer les yeux était tellement puissante que lutter ne faisait que me faire souffrir davantage. Bon sang, j'allais y rester sur le sol d'un entrepôt dans le pire quartier de Los Angeles... C'était surement la pire fin espérée. Est ce que voir défiler sa vie avant de mourir était une réalité ? Non, je ne voyais pas ma vie défiler, je voyais juste ma vie m'échapper. Casey, Oliana, Cameron... ma famille, Blake, l'amour de ma vie que je n'allais finalement pas épouser. Mon cœur ne battait surement plus mais mes dernières pensées étaient pour lui. Elles étaient même tellement fortes que j'arrivais presque à entendre sa voix près de moi. Pourtant, il n'y avait que Rivera avec moi du moins de ce que je me souvenais avant de perdre totalement connaissance, les yeux presque à demi ouvert. J'avais envie de demander pardon à Blake de ne pas avoir réussi à tenir plus longtemps, de ne pas avoir été plus forte pour attendre l'ambulance qui aurait pu me sauver ou pas. Je ne savais pas ou je me trouvais mais je savais que je n'avais plus aucun contrôle sur mon corps, sur mon physique. C'était donc ça, la mort cérébrale. « Bordel, ils sont tous morts ! » lançait une voix non loin de Damian et Blake avant que les secours ne parviennent jusqu'à eux, jusqu'à nous. Ils m'emmenaient sur leur brancard sans réelle espoir au vu de mon état et de la marre de sang que je laissais derrière moi. « Au moins, on aura pas eu a les buter de nous même. » Cet agent montrait le corps des malfrats non loin et son manque littéral de tact allait surement dégoupiller le dernier ressort qui retenait encore Blake ou même Damian de lui en foutre une. Un des pompiers demandait ensuite à Rivera de s'allonger à son tour sur un brancard au vu de son état plus qu'inquiétant. « Rivera tenez le coup ! » le co-directeur du FBI venait d'arriver et il posait une main rassurante sur l'épaule du flic, allongé, avant de se tourner vers Blake. « Ellis, pourquoi je ne suis pas étonné de vous voir ici... Filez à l'hôpital. » Sa voix était sombre et il aurait pu dire, allez dire adieu à votre fiancée, cela aurait été la même chose.

13 avril. Le bras droit du flic trembla très légèrement alors qu'il baissait son arme. Au bord de l'épuisement, ses muscles lui faisaient payer au centuple le moindre effort supplémentaire. Il ne lâcha pas son flingue pour autant, les doigts ancrés sur la crosse. Sa survie ne tenait qu'au calibre qu'il avait dans la main et tant qu'ils n'étaient pas sortis de ce merdier, personne n'était tiré d'affaire. Le spectacle qu'ils offraient était celui qu'un fiasco monumental. Ils avaient foiré leur mission. Purement et simplement foiré. L'assaut s'était transformé en putain de champ de bataille. Et leur unité en chair à canon facile. « Noooooooooon ! Appelle 911 ! DEPECHE-TOI !  » cracha Ellis avant de s'adresser au flic, luttant pour ne pas perdre pied. Sous l'effet de l’afflux sanguin, sa tête commençait à tambouriner par intermittence. « Rivera, c’est ça ? Je vais retirer le bout de métal [...] » Le flic opina du chef, il savait que son propre corps risquait de lui imposer des limites. Pire, il risquait de flancher purement et simplement. Chaque respiration lui demandait déjà un effort considérable. Sauf que s'il y avait une putain de petite chance pour que Lennox s'en sorte ; le flic n'hésiterait pas. Lui s'en remettrait. Et même s'ils avaient eu des différents ; ouais, il espérait pouvoir en dire autant de Lennox. Ironie du sort. Lui risquant sa peau pour une fédérale. « Prêt ?  » Damian serra les dents. Il connaissait la douleur, il avait l'habitude de la gérer. Mais pas celle-ci. Invasive, lente, dévorante. Ses mains placardées sur la plaie béante de Lennox, il commença à sentir une douleur sourde remonter le long de son épaule meurtrie. Comme une impression d'être brûlé vif, de sentir les flammes lécher progressivement chaque parcelle de muscle qu'elle rencontrait. Le visage du flic vira au cramoisi, il lâcha bientôt une plainte incontrôlée, laissant s'échapper de la bile par ses lèvres entrouvertes. Il ne pourrait pas tenir longtemps. La douleur était sourde, violente. Elle le bouffait littéralement. Le flic s'affala au sol proche de l'inconscience, son coeur battant violemment dans sa poitrine. Une course sanguine folle qui troublait sa vue. Il devinait Ellis à genoux près de Lennox, les lignes imprécises de ce qui ressemblait à un brancard et des voix faiblardes. « Bordel, ils sont tous morts ! Au moins, on aura pas eu a les buter de nous même. » « Connards » Le dernier mot qu'il murmura - la colère parvenant à trouver un chemin malgré la douleur - avant d'être récupéré comme un poids mort par des mecs en blouse blanche. « Rivera tenez le coup ! » Une main sur son épaule. Il l'aurait récupérée pour lui foutre dans la gueule s'il avait été en état. « J'ai une nouvelle qui devrait réjouir tout le monde. Une voiture de nos collègues du LAPD a pu coincer l'un de leurs véhicules sur la rapide. Il est évident que vous serez aux premières loges pour l'interrogatoire...  » poursuivit le co-directeur du FBI à l'attention d'Ellis et de Rivera. Juste avant que le flic ne sombre complètement et que l'ambulance quitte l'entrepôt sirènes hurlantes. Lennox allait commencer son propre combat, Rivera allait poursuivre le leur. Les faire tomber, les uns après les autres. La tôle se ferait un plaisir de les accueillir.