La nouvelle année avait été entamée depuis peu que la vie reprenait son cours petit à petit. Les fêtes, comme chaque année, avait été pénible à passer pour Speckles. Il s’était retrouvé à fêter Noël chez la famille de sa chanteuse et le nouvel an avec le restant de son groupe. Autant le nouvel an s’était bien passé, il s’était amusé comme un petit fou, autant Noël avait été une véritable étape à passer. Il aurait préféré mille fois mieux passer la soirée (et le lendemain) seul que devoir se coltiner des gens pas drôles qui n’avait que des intérêts pas fiables vis à vis de lui ou de son amie ou bien il avait dû se coltiner des remarques en tout genre. Déjà, il se faisait passer pour son petit ami, histoire de la couvrir. Sa chanteuse étant lesbienne et sa famille pas (encore?) au courant et pas dans le mood à recevoir un coming-out de quelconque nature, il avait joué le jeu. Déjà parce qu’il était le seul du groupe et de ses amis à n’avoir rien de prévu mais aussi parce que cela ne le dérangeait pas de lui faire ce service. Au final, il aurait peut être dû s’abstenir et la convaincre de fêter l’évènement juste elle et lui. Sa famille n’était pas du genre agréable, ouverte et aimable. Il avait même eu des remarques de papi et mamie sur sa tenue quelque peu… originale. Forcément, quand une fille ramenait un mec (même pour le jeu) aux jeans troués, la chemise (et encore, il avait fait l’effort d’en mettre une) assez ouverte en haut, ses cheveux en bataille et ses cernes aussi grandes qu’un panda et qu’on était confronté à des gens tous habillés d’un pull de noël de merde et un minimum soigné,on pouvait facilement relever la différence. Aussi, sa chanteuse l’avait supplié de ne pas émettre la moindre remarque, de garder sa franchise pour lui et l’avait même suggéré de le payer pour cela. Et bien que l’exercice fut compliqué, il l’avait passé avec brio et gratuitement en prime, parce qu’il n’était pas en manque de thune pour payer sa coke ou son herbe et qu’il aimait les challenge. Néanmoins, il était fort dommage de ne pas avoir pu rabaisser leur grandes gueules de merdeux, parce que ce n’était pas l’envie qui manquait. Au nouvel an, l’ambiance avait été nettement meilleure. Il avait pu être lui même et, la grosse soirée passée dans un club avec les autres l’avait amené à jouer à des jeux stupides sur des paris. Oui, des paris. Pour la première fois de sa vie, Speckles avait parié. Et il avait perdu. Sauf qu’à la place de donner de la moula, il avait obtenu le gage d’accompagner sa chanteuse à une manifestation de prévue en week-end, sur l’environnement, la pollution, le changement climatique, bref, la grosse merde écologique. En soi, c’était un bon combat et il en était parfaitement conscient. En soi, il était même plutôt pour cela, mais Speckles était du genre à ne pas avoir d’opinion pour le coup et ne pas s’engager dans des luttes aussi fermes et définitives. Pourtant, encore une fois, il était là, à cette manifestation, à être à côté d’une de ses meilleures amies, voir d’une sorte de soeur pour lui, mais en faisant uniquement acte de présence. Il était à peu près certain que la presse les avaient repérés et bien que de nombreuses rumeurs le supposait en couple avec elle et qu’ils en jouaient par moment, il n’y avait jamais rien eu entre eux. D’ailleurs, Speckles n’avait jamais rien tenté avec elle, pas même une approche. Déjà parce qu’elle allait travailler avec lui, mais aussi parce qu’il n’avait pas d’attirance sexuelle avec elle. Cela dit, une grande amitié était née entre eux, et bien qu’en règle générale, Speckles ne faisait confiance en personne, il y avait une sorte d’exception pour elle. Et pour son co fondateur, qui occupait la place de guitariste. Il s’entendait bien avec le batteur, malgré quelques conflits mais ça ne lui était pas propre, Speckles avaient des conflits avec tout son groupe par moment. Même sa chanteuse, envers qui il était très proche. Et ça n’était pas toujours facile, mais au moins, ils se réconciliaient. C’était parfois difficile, surtout quand on avait une grande tête comme celle de Speckles et que ce dernier était particulièrement têtu et souvent dans le déni. En effet, Speckles, c’était le genre de mec à avoir du mal à admettre ses torts et à présenter ses excuses. Il ne l’avait pratiquement jamais fait de sa vie, du moins, sincèrement. La plupart du temps c’était des paroles lâchées en l’air mais dont la rancune était encore présente et ses positions toujours aux même places. En revanche, c’était arrivé une fois qu’il le fasse ‘pour de vrai’ et ça avait été à celle qui avait été réellement sa maman. Sinon, rien du tout.
Quoiqu’il en soit, Speckles était bel et bien présent, sur les lieux, à la manifestation. Peut être que cela redorera son image auprès des militants sinon, tant pis. Il allait où il voulait après tout, chaque chose n’avait pas forcément une explication claire, précise et définitive sur ses envies et sur sa vie. Depuis toujours, les gens ont tendance à tout interpréter, d’une manière comme d’une autre, et souvent, ils se trompent radicalement. C’était ce qu’il avait constaté. Au beau milieu de la foule, ils passaient presque inaperçus. Il y avait du monde et bien qu’il était à tête découverte, contrairement à sa chanteuse qui avait sorti le bonnet d’hiver (malgré les températures acceptables) et les lunettes de soleil, on ne l’emmerdait pas. Quelques gens l’avaient reconnus, avait demandé des photos qu’il avait acceptées, mais sinon, pas de mouvement de foule pour sa pomme ou quoique ce soit. Au bout d’un moment, les deux musiciens s’étaient placés sur un des trottoirs, un peu à l’écart, et observait la foule passer. La chanteuse scandait les slogans à plein poumons tandis que Speckles analysait tout ce qu’il y avait autour de lui. Légèrement amusé, il affichait toutefois un air neutre et l’envie de partir était plutôt présente. Finalement, son regard, bien que rapide car il regardait tout et n’importe quoi, se posa sur une jeune femme au trottoir d’en face, légèrement surélevée elle aussi. Au départ, il l’avait vue rapidement étant donné qu’il analysait tout très rapidement. Mais ses yeux revinrent sur elle aussi vite qu’ils en étaient partis. Comme si, en la voyant, quelque chose lui avait échappé. Il se mit à l’observer assez longuement, tandis que la vie poursuivait son cours, que les gens passaient entre eux sur la route et que son amie continuait à mener son combat à sa manière. Cette jeune femme, en face, le regardait également et ils restèrent comme ça à se dévisager un long moment, sans rien afficher de concret, d’émotions ou quoique ce soit. Ils étaient juste là, à se regarder mutuellement et bien que rien ne semblait traduire un quelconque changement dans ses projets, sa vie et tout le reste en général, il n’imaginait pas qu’en réalité, quelque chose de grand était en train de s’opérer. Pourtant, lorsqu’il la vit, il comprit qu’il y avait un truc. Déjà, sa tête, son visage, ne lui semblait pas inconnu. C’était une très belle jeune fille d’ailleurs, dont il ignorait son âge vu comme ça. Peut être le siens, peut être même un peu moins voir même mineure, mais il ne pouvait pas nier le fait qu’elle était vraiment très jolie. Elle n’était pas très grande, la peau brune et l’expression faciale digne d’une princesse Disney.
Il termina la clope qu’il avait au bec, du tabac pour une fois, et décida de s’en débarasser avant d’entreprendre la démarche de rejoindre cette nana. Sa chanteuse cessa de s’égosiller pour le regarder partir avec un air béat tout en se demandant ce qu’il se passait et quand elle comprit qu’il rejoignait une fille, elle n’insista pas et recommença à crier à plein poumons de niquer la race aux pollueurs et maudire les âmes corrompues eux et leur famille sur au moins cinq générations. Quant à Speckles, il rejoignit, comme prévu, cette personne qu’il fixait plus longuement et intensément que prévu afin d’aller à son encontre. Pour lui dire quoi? En fait, il en savait rien. Habituellement, c’était les gens qui venaient vers lui, pas l’inverse. Mais quelque chose le poussait à le faire, comme si une sorte de divinité quelconque l’avait convaincu que son destin, c’était cette fille. Que quelque chose l’attendait avec elle, sans savoir quoi, sans même penser à quelque chose de salaces ou romantique. Mais une sorte d’attraction mentale si on osait dire. Il ignorait totalement si elle allait le rembarrer ou non, si elle jouait à un jeu ou non. Mais s’il ne s’y essayait pas, il n’allait jamais savoir.
Arrivé en face d’elle, il la dévisagea encore un petit moment. Un jeu de regard, comme juste avant, mais en plus insistant. Dans ses yeux, une question sortait et qu’il n’allait pas tarder à exprimer par des mots, de vive voix.
“Hey, dis moi, on ne se serait pas déjà vu par hasard?”
Une phrase de blaireaux qui voulait draguer une nana classique et vieille comme le monde, sauf que pour lui, c’était au premier degré. Il ne le faisait pas pour draguer mais sincèrement, parce qu’elle lui disait quelque chose. Alors certes, elle était mignonne, très mignonne, mais il mettait cela de côté pour le moment.
Cette année encore la période des fêtes se termine avec cette impression d’être épuisé. D’avoir vu trop de gens qui font semblant d’être heureux de se voir, quand le reste de l’année, personne ne fait l’effort de prendre des nouvelles. Encore cette année, je me suis fait demander à de multiples reprises quand est-ce que j’allais leur présenter “ un p’tit gars !” Chose qui devrait être normale à mon âge, de me placer et de faire en sorte de bâtir un avenir. Mais personne ne pense que c’est exactement ce que je fais, que ce n’est pas parce que je n’ai personne dans ma vie que je ne travaille pas sur mon avenir. En ce moment, ce qui compte vraiment pour moi c’est de terminer mes études et de m’impliquer dans des causes qui me tiennent à cœur, pour que le monde soit un peu moins laid pour les générations futures. Je souhaite une planète en santé, en commençant par nos océans, sans compter toutes les injustices sociales. J’aimerais ne pas avoir honte de ce que je laisse derrière moi, que le jour de ma mort je sois fière de ce que j’ai pu apporter comme changement pour ma planète.
J’avais passé une semaine en République dominicaine, dans la famille de ma mère juste après Noël. C’était un temps que j’appréciais, d’être avec eux qui vivaient tellement plus simplement. Qui prenait le temps de savourer le temps et de se parler vraiment. J’étais plus près de la famille du côté de ma mère que de celle de mon père. Ils me ressemblaient plus. J’étais une riche qui n’en a rien à faire, je sais que la vraie richesse se trouve au fond de nos cœurs et qu’il y a des valeurs qui ne pourront jamais être achetées à coup de gros billets vert et sale. L’argent ne peut pas acheter le bonheur et c’est à l’intérieur de nous qu’on peut le trouver, chacun à le pouvoir de fabriquer le sien. Ici, ils semblent l’avoir compris. J’aime venir ici parce que je peux vivre de l’air du temps et en profiter pour savourer un soleil chaud et faire du surf sans avoir d’autres obligations à mon calendrier.
Pourtant, il faut bien qu’il y ait un retour à la réalité. À peine revenue au pays, que je reprends les armes pour les combats qui comptent vraiment. Comme l’école n’est pas recommencer, je m’implique le plus que je peux, passant des journées entière à l’association en préparation d’une grosse manifestation sur les enjeux climatiques. Mes parents n’aiment pas tellement que j’y mettent autant de coeur, ils souhaitent autre chose pour moi, mais je ne veux pas vivre ma vie comme la leur. Travaillant des heures acharnées, récoltent les lauriers alors qu’ils ne font que leur boulot. La petite vie rangée d’une famille parfaite…. Ils sauvent des vies, moi je veux sauver la terre sur laquelle nous vivons. Nos ambitions sont similaires, mais je ne ferais jamais autant d’argent qu’eux. Ils voudraient que je me marie et que j’ai des enfants, moi je veux sauver les gens qui vivent sans toits et sans amour. Je veux aider sont qui n’ont pas la chance de naître dans une bonne famille. Je me souviens encore de Speckles qui restait avec une de nos voisines jusqu’à ce qu’elle meurt. Je me souviens encore de la peine que je ressentais en sachant qu’il n’y avait eu personne avant elle pour l’aimer comme il le méritait. Je ne veux plus voir ce genre d’histoire, je veux que chaque personne puisse avoir un foyer et ce n’est pas en s’enfermant dans nos grosses cabanes et en fermant les yeux que tout ça va finir par changer ! Il faut agir et dès maintenant !
Aujourd’hui, il y a la manifestation pour laquelle je travaille depuis des jours. Il y a beaucoup plus de monde que ce que je croyais au départ et je suis heureuse de voir qu’il y a autant de gens qui sont prêts à faire des efforts pour faire une réelle différence. J’ai laissé ma pancarte à quelqu’un qui n’en avait pas et je me suis installé sur le côté, il y a un petit muret sur lequel je suis monter pour voir le plus de monde possible et alors que j’allais commencer à crier pour encourager les efforts de tout le monde mon regard tombe dans deux yeux bleus. Bien qu’il soit loin, ce regard me dit quelque chose et je referme la bouche en reconnaissant à qui ce regard appartient. Je n’arrive plus à détacher mes yeux de lui, mon coeur rate un battement et je soutiens ce regard qui ne me lâche pas. - Je t’aime Spark… Cette sensation de papillons dans le ventre alors que mes yeux d’adolescente ne pouvait se détacher de lui, les bras autour de son cou. J'espérais tellement que ce moment de parfait bonheur allait durer pour l’éternité. Puis la mort a frappé, emportant loin de moi ce jeune garçon qui avait su se faire une place si grande dans mon cœur. On m’arrachait cette personne, que j’aimais comme seule une jeune fille est capable de le faire. Je ne pouvais qu’espérer qu’il trouve une famille qui pourrait l’aimer, il venait de disparaître de la map et je pensais que jamais je ne pourrais le revoir. Les larmes ont coulé abondamment, des jours durant. Espérant que tout ceci ne soit qu’un rêve et que lorsque j’ouvrirais de nouveaux les yeux il serait là près de moi avec son petit sourire moqueur. Riant de mes larmes et que je pourrais sentir de nouveau ses bras m’enlacer. Je m’étais fait une multitude de scénarios pour me rendre compte que mes rêves ne seraient jamais que des chimères.
Revenant à la réalité, je cherche ses yeux, ne le voyant plus avec aux côtés de la jeune femme. Non, je ne veux pas l’avoir perdu de vue parce que j’étais dans mes souvenirs. Puis, je le voyais qui s’approchait de moi, mon coeur se mit à battre un peu plus fort. Est-ce que c’est vrai ? J’allais enfin le revoir après toutes ces années ? Non, mais j’avais l’air de quoi en ce moment, les cheveux emmêlés, mon t-shirt trop grand noué sur le côté et …. Putain, c’est pas le temps pour que mon cerveau se mettent ;a fourmiller d’idées aussi idiotes que sur mon look. Speckles était là devant moi et il se rapprochait dangereusement. Bon sang ! Pendant sa longue et interminable marche en ma direction, j’ai descendu du petit muret. Faisant en sorte que je devais légèrement lever la tête pour continuer de l’observer, le silence durait encore, mais il n’était pas déplaisant. Je me souviens qu’il y a eu de nombreux moments où on n'avait pas besoin de parler pour se comprendre. Je ne les trouve pas gênant les silences, mais à quoi peut-il penser en ce moment ? Est-ce qu’il me reconnaît ou se souvient encore de moi ?
Sauf que sa phrase brise toute la magie du moment. Je fronce légèrement les sourcils, mordant ma lèvre. C’est comme si j’étais une inconnue pour lui, ou quelqu’un qu’il aurait vaguement rencontré dans son passé et qui n’avait pas eu vraiment d’importance pour lui. Alors que lui, il a occupé mes pensées durant tellement longtemps. Encore récemment j’avais une pensée pour lui, me demandant comment il allait. Maintenant qu’il était une célébrité, il avait probablement toutes les filles qu’il voulait à ses pieds. Il était encore plus beau que lorsqu’il était adolescent. Je secoue légèrement la tête avant de répliquer.
“La célébrité t’aurais donc rendu amnésique à ce que je vois Sparkles ! ”
Il devrait pouvoir comprendre qui je suis avec ce simple surnom. Au départ, je lui donnais le même surnom que tout le monde lui donnait à l’époque. J’avais appris à le connaître et à ne pas le voir comme une tâche, au contraire, j’avais l’impression d’avoir toujours des étincelles dans les yeux et des papillons dans le ventre chaque fois que je regardais en sa direction. J’avais donc décidé que je lui donnerais un autre nom. J’espère qu’il se souvient de moi, ce n’est pas un hasard si on se croise là maintenant ? J’avais bien pensé à aller défier les gardes de sécurité pour aller le voir dans sa loge après un concert. Mais j’avais trop peur des conséquences que ça pouvait engendrer pour le faire vraiment. Essayer de le contacter par les réseaux sociaux ? Trop de risques de me retrouver dans les spams et ou enterrer parmi les tonnes de messages qu’il devait recevoir tous les jours. D’un sens, j’étais contente pour lui, il a réussi à tracer son propre chemin et je peux facilement suivre les actualités le concernant. Comme ça c’est un peu comme si j’avais encore de ses nouvelles.
“ Il faut que je te rafraîchisse la mémoire ? Tu te souviens de la petite brunette là… Tu sais celle qui voulait défendre tout le monde envers et contre tout ? Bien c’est moi… Lee !”
Je lui fais un sourire en haussant les épaules. J’espère ne pas avoir l’air ridicule devant lui. Peut-être qu’il aurait préféré ne pas me revoir ? Garde t’il des bons souvenirs de moi en fait ? Ce regard, cette connexion qu’il venait juste d’y avoir entre nous deux ce ne pouvait pas être un effet de mon imagination non ? J’avais l’impression que le bruit ambiant n’était qu’un bruit de fond, un murmure alors que toute mon attention était sur lui.
“ Tu fais partie d’une organisation ? Je ne savais pas que tu t'intéresse à l’environnement !”
Tout pour qu’il me parle…Juste un peu encore, j'ai envie d'entendre sa voix.
Il y avait beaucoup de gens de passage dans la vie de Speckles. Depuis toujours, sa vie c’était de faire entrer des gens dans la sienne et ils ressortaient tous un jour ou l’autre. Il s’était mis en tête à force de ne pas trop s’amoucher de quelqu’un, bien qu’il restait un être humain et qu’une personne lui avait montré ses capacités et exploité son côté sensible. Il l’avait refoulé désormais, certes, mais ils étaient toujours présents. La preuve, il avait monté un groupe avec un ami et les membres de son groupe était sa seule et réelle famille désormais. Ca ne se passait pas toujours bien entre eux, mais ils connaissaient tous son passif, ils avaient tous été présents lorsqu’il avait frôlé la mort à force d'absorber une quantité astronomique de drogue un soir où il avait eu le besoin irrémédiable de ressentir quelque chose. Sa vie n’avait été qu’un amas de conneries, de négativité, d’auto destruction. Speckles ne vivait que pour une chose en soi : la musique. RIen d’autre. Sans cette putain de musique, il n’était plus rien, il estimait qu’il n’avait aucune utilité dans ce bas monde. Pourtant, il était toujours là, en vie, et si parfois il avait ses réflexion et une attitude ignoble, c’était simplement parce qu’il désespérait et que, d’une certaine manière, c’était un appel à l’aide. Ses seuls amis le savaient et ils prenaient une patience énorme pour le surveiller et faire en sorte à ce qu’il ne se foute pas en l’air. Speckles ne pouvait pas rester seul, sinon c’était la fin, tout simplement. Et pourtant, Dieu seul savait qu’il avait des capacités à exploiter. Il était intelligent, très intelligent même et il était capable de grandes choses. C’était un génie sous estimé, sous exploité. Son comportement faisait foirer pas mal de choses en temps normal et il avait beaucoup de patience pour réparer les pots cassés… ou le convaincre de ne pas en briser. Et puis, on ne pourra pas dire, lui aussi il avait ses convictions, lui aussi voulait réussir et même si par moment (souvent même) il s’estimait être au dessus des lois, il faisait un effort pour pouvoir faire en sorte à ce que ça passe. Mais Speckles était comme ça, il voulait vivre par lui-même, faire les choses qu’il avait envie sans avoir de contraintes administratives ou des conneries de ce genre. Il avait fini par léguer toutes les tâches administratives à leur manager d’ailleurs même si elle devait souvent courir à droite à gauche pour pouvoir toutes les assouvir. Elle lui rappelait aussi souvent qu’il dépensait peut-être un peu trop par moment et qu’il faudrait se calmer. Leur manageuse, c’était un peu comme leur maman, en vrai. Surtout envers Speckles. Elle lui rappelait beaucoup la sienne d’ailleurs, du moins, celle qui l’avait adopté et qui avait pris le temps de le connaître et de le tempérer. Dès qu’ils s’étaient vu, elle savait qu’elle aurait du boulot avec lui et elle n’a pas été déçue. Pourtant, il lui faisait de la peine et c’était une des raisons qui la faisait s’accrocher. Il n’était pas le seul du groupe à avoir des problèmes d’ailleurs, ils avaient tous besoin de voir un psy d’une manière comme d’une autre, mais s’ils devaient faire un concours de la pire vie de merde, Speckles décrochait le gros lot.
Naturellement, lorsqu’une personne marquante entrait dans sa vie, et pas une lambda qui ressortira après l’avoir rejeté comme la merde qu’il était, il s’en souvenait. Cette fille, qu’il avait rejoint après l’avoir dévisagée un long moment parmi la foule qui passait entre eux, faisait partie de ces gens-là. En soi, il avait un petit doute. Elle lui ressemblait énormément et si on y réfléchissait bien, ils s’étaient connus dans son quartier de pré-adolescence et si elle n’avait pas quitté l’Etat, il y avait moyen qu’elle soit celle dont il pensait. Il ne tarda pas à avoir réponse à sa question. Dès les premières paroles qu’elle exprima, son sourire s'agrandit tandis que ses yeux étaient plongés dans les siens pour retrouver cette lueur qu’elle avait autrefois, lorsqu’ils se regardaient. Aussi pour s’accaparer son attention et être totalement honnête avec elle et vice versa. Speckles, c’était le genre de mec à regarder les gens droits dans les yeux pour être certains qu’ils n’allaient pas fuir. Aussi, c’était une sorte de test, à voir s’il la rendait ou non à l’aise. Mais en soi, c’était réellement parce qu’il était ravi de la revoir et parce qu’il voulait absolument lui exprimer des tas de messages, d’émotions, de ressentis dans son regard. Il émit un petit rire nerveux lorsqu’elle confirma qui elle était et fut assez amusé par la manière de le lui faire comprendre. Il la laissa terminer ses taquineries et lorsqu’elle prononça le nom de Lee, comme lorsqu’elle l’avait appelé à défaut Sparkles, il fut plongé dans une vague de vieux mais bons souvenirs. Le temps où il était encore pur et innocent. Celui où les drogues et le sexe ne l’avait pas rongé et qu’il n’était pas aussi taré qu’en ce moment. Enfant difficile, certes, mais il s’était réellement assagi à cette période de sa vie. Jusqu’à ce que sa mère ne disparaisse de ce monde et qu’il fut à nouveau à la merci de la société. Une société soi-disant généreuse et protectrice mais qui, en réalité, était tout l’inverse, en particulier si tu n’avais pas une thune.
“Oh non, tu n’as pas à me rafraîchir la mémoire rassure toi ma très chère Lee. Tu fais partie des gens que même si j’devenais amnésique, j’oublierais pas. J’avais juste besoin de m’assurer que tu étais bien celle à qui je pense” répondit il à la fois amusé et à la fois très sérieux.
Il se remit à rire lorsqu’elle s’étonna de le voir ici et lui demanda donc par la même occasion s’il avait rejoint une organisation et qu’elle ignorait qu’il s’intéressait à l’environnement. Il secoua les épaules et haussa les sourcils, peu convaincant.
“Mhhh. En fait j’ai écouté Earth Song de Mickael Jackson hier et je me suis dit qu’il était temps de faire le nécessaire” répliqua-t-il dès lors. “Toi par contre, je ne suis pas vraiment surpris de te voir là. Enfin, si, parce que tu fais partie de mon passé et que je ne m’étais pas préparé à te revoir, mais te ‘connaissant’, ça n’étonne guère. Toujours l’esprit militant, heh?”
C’était assez marrant d’entretenir une conversation de ce genre au beau milieu de la foule et dans un événement comme celui-ci. C’était ce genre d’imprévu qu’il aimait beaucoup et qui nourrissait son excitation au quotidien.
Enfant, on me considérait comme une petite fille rêveuse qui était toujours dans son monde, à se construire un monde parfait. Étant enfant unique, je n’avais pas de frère et soeur avec qui je pouvais partager mes jeux, je m’occupais donc seule avec mes jouets à créer un monde bien à moi. Il n’y avait pas de souffrance, un monde de licorne et de papillons, où les princesses n’avaient pas besoin de prince pour venir les sauver de leur malheur. Bref, depuis toute jeune, je savais que la vie était injuste et j’aimais me réfugier dans mes idéaux, au moins personne ne pouvait me faire du mal quand je me plongeais dans mon monde à moi.
On m’a souvent aussi répété à quel point j’avais de la chance, d’avoir des parents qui s’aiment vraiment et qui sont encore ensemble après tout ce temps. Qu’ils m’aiment aussi et qui se faisait du souci pour moi et j’ai longtemps cru que c’était la normalité, d’avoir deux parents toujours présent pour nous. Prêt à nous soutenir coûte que coûte. Alors qu’en fait non, ce n’est pas vrai, quand on ouvre les yeux, on voit partout autour de nous des gens qui en fait, n’en ont rien à foutre de leurs gamins. En fait, le monde est tellement cruel. Que ce soit les enfants entre eux, ou encore les adultes qui leur inculquent des valeurs qui ne font aucun sens. J’ai souvent cru que je n’étais pas faite pour vivre dans un tel monde, je trouve de plus en plus que les humains sont désespérant et ce doit être une des raisons qui fait en sorte que je n’ai pas envie de suivre les traces de mes parents, je ne veux pas travailler avec les humains. Ils ne font que s’enfoncer un peu plus dans leur merde à chaque instant, détruisant tout sur leurs passage, ne laissant que désolation derrière eux. C’est pour ça que je m’en fait tant pour l’environnement. La nature ne fait jamais en sorte de s’auto détruire, les animaux ne font pas exprès n’ont plus de détruire leurs environnements, ils s’y adaptent alors que nous animal humain, nous faisons en sorte que l’environnement s’adapte à nous. Maintenant, que nous sommes en train de tout détruire sur notre passage, moi je veux aider ceux qui ne demandent qu'à vivre en paix et qui ne le peuvent à cause de notre bêtise.
Si je suis si vindicative et si je suis si autant à fond dans ces manifestations c’est qu’il est déjà tard pour se réveiller. Il est peut-être même déjà trop tard pour pouvoir sauver tout le monde, mais si on ne fait rien, on se dirige vers un énorme précipice et on y saute les yeux fermés tête première. Dans ce genre de manifestations il y a tous les genres de personnes. Ceux qui croient dur comme fer qu’on va pouvoir faire quelque chose, je me positionne dans cette catégorie, il y a ceux qui veulent vraiment faire quelque chose, il y a aussi ceux qui croient que ce serait bien de faire une différence mais qui ne savent pas par ou commencer. Il y a aussi ceux qui font ça pour bien se faire voir sur les médias et qui veulent augmenter leur popularité, on pense souvent aux gens qui font de la politique et qui font en sorte de bien se faire voir sur les premières pages des journaux. Eux, ce sont les gens qui me puent au nez le plus, parce qu’une fois le flash passé, ils retournent à leurs occupations sans bouger le petit doigt. Finalement, il y a ceux qui sont là par curiosité, ceux qu’on pourra peut-être tenter de convaincre de poser un petit geste pour rendre le monde meilleur. Eux je les aimais bien en vrai, parce qu’on pouvait les convaincre d’embarquer avec nous. Par contre, il ne faut pas oublier les détracteurs, ceux qui nous ridiculisent et qui se moquent de nos idéaux, ceux-là il faut les laisser parler et se foutre d’eux. Ils ne font que me convaincre de continuer et de faire ce que je pense qui est le mieux.
Dans une telle foule, on ne pense jamais aux gens qui ont disparus de notre existence, on ne pense pas croiser un fantôme de notre passé, même si cette personne était celle qui faisait briller notre existence pour l’espace d’un instant. Pourtant, c’est bien un regard connu que j’ai croisé. Un regard que je n’ai jamais pu oublier malgré les années sans nouvelle. Je ne pensais pas pouvoir le revoir ou même pouvoir lui parler, c’était une vedette maintenant et je ne suis qu’une étudiante activiste. Je n’ai rien d’exceptionnel alors que lui, tout le monde le veut et tout le monde ne souhaite qu’une chose, pouvoir lui parler ou le faire sourire.
Sauf qu’il est là, il m’a vu et maintenant il marche dans ma direction alors que mon cœur se met à battre de façon désordonnée dans ma poitrine. Maintenant qu’il est face à moi, je peux plonger mon regard dans ses yeux au couleur de l’onde. Je me sens nerveuse, comme si c’était la première fois que je le voyais alors que je me souviens encore de comment je pouvais me sentir lorsque ses bras m'entourent. Je me sens encore comme une gamine qui découvre l’amour pour la première fois, parce qu’il a été le premier que j’ai vraiment aimé et peut-être même le seul. J’étais peut-être encore trop jeune et naïve à cette époque, pourtant je me souviens de la plénitude que je ressentais quand il était avec moi. Maintenant, un homme, il n’est plus cet adolescent pré-pubère, il est grand, beaucoup plus que dans mes souvenirs et ça m’arrache un sourire, je me sens petite à côté de lui malgré mon mètre soixante-treize. Mon sourire s’étire davantage, il se souvient de moi. Il n’a pas oublié la petite fille que j’étais. Ses paroles me vont droit au coeur et même que je sens mes yeux devenir humide, je retiens bien évidemment les larmes, qu’elles soient des larmes de plaisir ne change rien, je n’ai pas envie de pleurer alors que je retrouve mon premier amour après tout ce temps. Je ne veux pas me ridiculiser ici sur la place publique. Même si ce n’est qu’un brouhaha incohérent autour de moi.
“J’ai eu peur que je sois quelqu’un qu’on puisse oublier si facilement ! ” Je fais mine d’être soulagé en laissant échapper un petit rire par la même occasion. Je ne quitte pas ses yeux, je ne veux pas cesser de les regarder. J’ai envie de toucher son visage pour m'assurer qu’il n’est pas qu’un mirage.
Sa réaction ne m’étonne pas vraiment, le voir en tant que militant me surprendrait vraiment. Tout n’est pas perdu par contre. Je souris et lève les yeux au ciel en secouant la tête. “Tu ferais bien d’écouter cette chanson plus souvent alors. Avec ta popularité, tu pourrais aider la cause facilement tu sais ! ”
J’hausse les épaules. “On ne change pas une recette gagnante à ce qu’on dit, pourquoi j’arrêterais de militer alors que les humains continuent de polluer la terre et les océans. Il faut bien que quelqu’un prête sa voix pour ceux qui n’en ont pas ! Pour être honnête avec toi… Je ne m’attendais pas du tout à te croiser ici, mais ça me fait vraiment plaisir, tu n’as pas idée ! ”
Je jette un regard autour de moi et je dois me rapprocher de Speckles pour éviter qu’on me fonce dedans. Mes mains contre son torse de délicieux frisson me parcourent le corps. Je relève la tête. « Je crois qu’avoir une conversation ici est un peu dangereux ! On risque de se faire rentrer dedans à tout moment ! » Je ris doucement avant de reculer de quelques pas. Je n’ai pas envie qu’il s’envole ou de le laisser partir quand je viens à peine de le retrouver. Je mordille ma lèvre doucement. “Est-ce que tu crois qu’on pourrait aller ailleurs pour qu’on puisse prendre le temps de savourer ses retrouvailles inattendues ? Tu sais, j’ai souvent penser à toi depuis…. depuis ton départ et j’ai pas envie que tu reparte en fumée sans avoir pu au moins te parler un peu. ” L’inquiétude pouvait probablement se lire dans mon regard. Il était hors de question qu’il parte à nouveau. Il doit bien y avoir une raison pour laquelle on se retrouve là maintenant non ? Parce que s’il y a bien une chose sur laquelle je suis convaincue, c’est que rien n’arrive pour rien dans la vie. Surtout pas quand il s’agit de retrouver une personne qui a marqué notre vie au point que lui l’a fait pour moi.
Revoir Lee ne le laissait absolument pas indifférent. D'une certaine manière, cette jeune femme avait été son tout premier amour. Le seul véritable, si on y réfléchit bien. Il était encore jeune à ce moment là, tout ce qui était sexualité et ce qui tourne autour n'était qu'en éveil et forcément, vu leur âge, ils n'avaient pas été plus loin que de simples bisous enfantins. Les premiers baisers de jeune gens, des choses marquantes dans une vie. Son tout premier véritable baiser, c'était Lee qui lui avait pris. La revoir, plus grande, plus mature, physiquement et sans doute mentalement lui donnait une envie irrésistible d'aller à sa rencontre. Ils ne s'étaient même pas quittés en mauvais termes après tout, ils avaient dû juste être séparés étant donné qu'il était retourné en centre d'adoption et qu'il avait, à ce moment là, peu de moment où il pouvait sortir. A la limite lors des cours dans le collège minable où il avait appris à lire à écrire et un peu compter, mais ce n'était pas vraiment le genre d'établissement scolaire où on ressortais de là avec des connaissances incroyables. Les professeurs ne considéraient pas les élèves comme étant capables d'être intelligent et vu la considération qu'il s'était reçu, il avait préféré dormir la plupart du temps quitte à totalement quitter le système dès qu'il a pu. Speckles était comme ça, sans diplôme, sans rien. Pas même le diplôme de fin d'études secondaires, il était sans RIEN. Un minable, comme le dirait la société. Son seul talent, c'était la musique et sans la musique, il n'avait réellement aucun raison d'exister.
Là, elle était très proche, juste devant lui. Il ne pouvait pas s'empêcher de l'observer comme si c'était la première fois qu'il la voyait. Elle avait bien grandi. La jeune adolescente qu'il avait connue était désormais une femme accomplie. Elle était toujours aussi jolie, peut être même encore plus et elle semblait forte en personnalité. Au moment où elle s'exprima, il le comprit aussitôt. Il eut une sorte de rictus au bout des lèvres et la joie qui l'émanait de la revoir avait du mal à être contenue. Il gardait tout de même son sang froid puisque môssieur avait une certaine fierté mal placée, mais en vérité, il était vraiment heureux de la revoir. Elle lui avait énormément manqué et il n'avait plus espérer la revoir, pensant que c'était totalement la fin, qu'elle aurait fait sa vie ailleurs ou ce genre de connerie là. Au final, elle n'était pas allé si loin. Elle n'avait pas vraiment changer d'endroit non plus, toujours à LA, comme lui. Certes, il était sorti plus d'une fois de la ville pour se produire sur scène à travers tout le pays voir même autour du monde entier et là, précisément en cet instant de petite pause histoire de recharger les batteries et d'écrire de nouvelles chansons, il la revoyait. Une chance inouïe. Elle avait peut être dû entendre parler de lui, mais l'inverse n'était pas là. Il ignorait tout d'elle, de sa vie depuis le dernier jour où il l'avait vue.
Lorsqu'elle lui dit qu'elle avait eu peur d'être le genre de personne qu'on oubliait facilement, Speckles exprima un petit rire, amusé. Les yeux toujours rivés dans les siens, comme il le faisait avec chaque personne dont il tenait à avoir l'attention, il chercha un moment les mots pour lui répondre. Ils ne tardèrent pas à arriver d'ailleurs.
"Le truc c'est que, tu n'es pas le genre de personne qu'on oublie facilement, Lee."
Il plissa des yeux lorsque, plus impulsive, Lee lui "conseilla", sous un ton presque d'ordre, qu'il devrait profiter de tout ceci pour pouvoir délivrer des messages qui aideraient à son combat. Il éclata de rire et s'approcha davantage d'elle et de son visage.
"Je n'ai pas d'ordre ou conseil à recevoir de ta part, ni de quiconque d'ailleurs" répliqua-t-il. Non pas qu'il soit en colère ou ce genre de chose, non. Il détestait simplement qu'on lui dicte ce qu'il devait faire. D'une manière personnelle, puis plus étendue. Sa chanteuse était déjà sur le coup pour ce combat là, lui ne voulait pas prendre position pour n'importe quoi. Il ne voulait pas non plus être un leader à la con qui devait donner des leçons de morales, dire à des gens ce que eux devaient ou ne devaient pas faire. Surtout que, Speckles avait un peu cette mentalité de trouver une graaaaande partie de la population totalement stupide, des moutons de panurge dont la plupart ne réfléchissait pas par eux même, totalement obnubilé par des discours de Sophistes qui sauront mieux que n'importe qui ce qu'il faut ou ne pas faire dans la vie.
Lorsqu'elle poursuivit son discours en exprimant le fait qu'elle prêtait sa voix pour ceux qui n'en avaient pas, il haussa les sourcils et l'interrogea du regard. Il voulut à nouveau répliquer quelque chose mais prit la décision de ne pas le faire. Pas immédiatement en tout cas. L'heure et l'endroit n'était pas en moment pour cela. S'ils renouaient réellement, peut être en apprendra-t-il plus et vice versa, en parlant et en donnant différent point de vue. Si ce n'était pas le cas... alors tant pis, autant garder ses propres opinions. Il n'avait pas tête à cela à cet instant même et ce n'était absolument pas ce qui l'intéressait pour le moment.
"Tu es surprise de me voir ici, en revanche, ce n'est pas le cas de l'inverse. Ca ne m'étonne guère, du coup. Je suis quand même surpris de te revoir, ça c'est clair. Et... d'une certaine manière... tu m'as manqué." admit-il tout de même d'une manière assez neutre mais honnête.
Un premier contact physique se produisit lorsque Lee s'approcha davantage à cause de la foule. Elle releva la tête pour pouvoir le voir droit dans les yeux, comme ce depuis tout à l'heure et lui suggéra d'aller ailleurs, trouvant l'endroit dangereux et pas idéal. Elle poursuivit en lui disant qu'elle avait souvent pensé à lui depuis son départ et qu'elle n'avait pas envie de le revoir partir dans la nature, sans nouvelle. Speckles exprima un grand sourire de satisfaction et de reconnaissance à la fois.
"Je te suivrais jusqu'au bout du monde Leanore Payne" finit-il par dire. "On va tenter de s'écarter de la foule et trouver un endroit tranquille, loin de tout... ça. Attends trente secs."
Il sortit son téléphone de sa poche et envoya un message à sa chanteuse pour lui dire qu'il ne restait pas et qu'il partait. Il prit une main de Lee et se fraya un chemin parmi la foule en s'éloignant d'elle au mieux possible. Une fois dans une rue proche mais épargnée par la manifestation, il s'arrêta devant ce qui semblait être une sorte de café à la Starbucks et où se trouvait à l'intérieur qu'une petite poignée de personne. Tout le monde était en train d'aller exprimer sa colère dans les rues visiblement. Il enfila sa casquette pour être le moins reconnaissable possible puisque, la plupart du temps où il la portait, il se faisait moins reconnaitre puis il se tourna vers son amie.
"Si tu préfères aller ailleurs, ça me va aussi. Je connais pas l'endroit, mais il m'a l'air d'être le plus crédible aux alentours. La décision est entre tes mains."
Il haussa les sourcils, le regard dans le siens, attendant sa réaction.
Il était la surprise que je n’attendais plus, j’ai cru longtemps que le destin faisait bien les choses et que si on devait se retrouver un jour on aurait cette histoire qui n’avait pu se terminer. Nous étions jeunes, encore innocents et mon coeur de jeune fille amoureuse ne pouvait accepter cette séparation dans laquelle on avait pas eu notre mot à dire, nous n’avions pas eu le choix et on nous imposait une décision qui n’allait pas en accord avec mon coeur. Souvent les adultes se foutaient bien de ce que l’on pouvait ressentir, nous disant simplement que nous allions finir par oublier ou qu’il serait un beau souvenir que j’allais chérir plus tard en me souvenant de mon premier amour. Que même, j'ai eu de la chance, parce que tôt ou tard, cette histoire aurait fini et peut-être pas d’une manière aussi douce. C’était un choix qu’on m’imposait et un choix que je n’aurais jamais pris. Alors j’ai cru, pendant longtemps, qu'on se reverrait, mais plus les années passaient et moins j’y croyais. La jeune fille naïve que j’étais à l’époque à ouvert les yeux sur un monde qui n’est plus aussi doux ou rose que je le croyais. Le destin, j’ai bien du mal à croire que ces conneries existent encore, mais une partie de moi voulait continuer d’y croire. Mais je pensais que Sparkles ferait partie de ses personnages rencontrés et que je ne reverrait plus jamais.
À cet instant pourtant, je me noie dans ses yeux si bleu, comme l’océan, un océan que j’ai envie d’explorer, de retrouver. Pourquoi j’ai l’impression d’être de retour dix ans en arrière. Cette impression d’être une gamine devant lui. J’ai envie de découvrir le monde selon son regard, de connaître tout ce qui s’est passé pour lui au cours des dernières années. J’ai envie de l’entendre parler et de me laisser bercer par le son de sa voix, jusqu’à ce que la lune se lève et qu’elle fasse son parcours. Je sais bien que ce n’est que très peu probable, il est devenu une star, pourtant une chaleur se propage dans mon ventre quand il me dit que je ne suis pas facile à oublier. Je mord l’intérieur de ma lèvre, heureuse d’apprendre que mon souvenir est encore aussi vif à sa mémoire que le sien l’est à la mienne. “Tu m’en vois ravie alors… ” Mon coeur bat plus vite et ce n’est plus à cause de cette envie de militer, ni pour la cause que j’appuie et soutien de toute mon âme, non cette fois c’est mon souvenir qui revient à la vie.
Son visage est près du mien, mon souffle se coupe. J’ai dû parler encore trop vite, comme je le fais souvent lorsque je parle de la cause que je soutiens. Je secoue la tête doucement de gauche à droite. “Je crois que c’est l’excitation qui m’a fait parler, jamais je ne t’obligerais à faire quelque chose auquel tu ne crois pas vraiment. ” Je souris à ce visage que j’étudie, pour me souvenir encore mieux de lui. Son souvenir commençait à devenir un peu flou, je ne me souvenais plus de la manière dont ses yeux se plissent lorsqu’il sourit ou encore de l’éclat de ses prunelles lorsqu’il parle.
J’ai l’impression que je dois me dépêcher de dire tout ce dont j’ai envie de parler avec lui, que je dois le faire avant qu’il ne s’évapore à nouveau comme un rêve inachevé. J’ai envie de savoir ce à quoi il rêve le soir quand il est dans son lit, à quoi il pense lorsqu’il compose ses chansons. Je voudrais savoir si nous allions pouvoir nous revoir en une autre occasion, ou si nous étions simplement destiné à nous croiser de temps à autre, sans que nos vies ne s’accordent pour un instant…. Il ne faut pas que je rêve trop, le monde est plus cruel qu’on ne le croit. Il faut que je profite de cette rencontre et que je laisse les choses aller, ne rien forcer ou espérer de plus. Quelques minutes c’est mieux que rien après tout non ? Je souris en secouant la tête. “On peut sortir la fille de la cause, mais pas sortir la cause de la fille ! D’une certaine manière ? ” Je ris en le regardant. “Je suis heureuse de l’apprendre, mais j’imagine que ta vie est quand même très occupée… ” Cette fois, j’admet que le contact ne me déplaît pas, même s’il a été forcé, je peux prendre le temps de sentir son odeur.
Il nous fallait sortir de cette foule, se parler, se retrouver. Je ne lui demande quand même pas de me suivre au bout du monde, même si l’idée est alléchante, je me contente de lever les yeux au ciel en riant. “Toujours aussi charmant à ce que je vois ! ” Je le laisse écrire à je ne sais pas qui, mais je m’en fou parce que c’est dans ma main qu’il pose la sienne pour m’attirer à l’écart de tout ce bruit. Je n’ai même pas pris la peine d’aviser les autres organisateurs que je quittais l'événement, rien ne m’importe d’autre en ce moment.
Arrivé à l’écart de la manifestation, je regardais la devanture du café. L’endroit semblait crédible bien que quelconque. Ce n’était pas un bord de plage, ni un endroit ultra populaire. Pourtant il semblait bien pour un début, après tout, nous avons des années à rattraper. Sa main quitta la mienne lorsqu’il enfila sa casquette et je sentis une fraîcheur au manque de son contact. Mais là, je reconnaissais vraiment son petit air canaille adolescent. “Là y’a plus de doute, c’est vraiment Sparkles que j’ai devant moi ! ” Je regarde le café et le jeune homme, mouais, ça peut le faire.
“Quelle décision difficile tu mets entre mes mains, j’ignore ce que je dois faire maintenant. Si cet endroit est nul tu pourras mettre la faute sur mon dos et tu garderas un mauvais souvenir de moi ! ” Dis-je en faisant mine d’être choqué, mais je laisse couler mon rire rapidement. “En vrai, l’endroit m’importe peu, tant que je peux passer un moment avec toi ! Ici ou ailleurs ce sera parfait ! ”
Elle fait les quelques pas qui la sépare de l’entrée du café et ouvre la porte et pénètre dans cet endroit qui semble silencieux après le bruit de la manifestation. Une petite musique se dégage des hauts parleurs créant une ambiance un peu plus intime et agréable. Je cherche des yeux un endroit qui pourrait être plus confortable et je montre une table libre au fond, personne n’est autour. “Celle-ci te convient ? Je peux aller nous commander à boire si tu veux. ” C’était une chose que de parler avec lui entouré de tous ces gens, mais maintenant j’ai l’impression que tout le monde peut nous entendre et je trouve ça plus intimidant. Il est quand même devenu une vedette, quelqu’un qui a une notoriété. Il semble avoir cette part de lui qui date d’avant, mais je me sens nerveuse et confiante à la fois. Quel sentiment étrange ! Je me retourne pour lui faire face, attendant sa réponse, prête à m’éclipser vers le comptoir !
Il serait très hypocrite de dire que les retrouvailles avec Lee ne lui faisait rien. Lee avait.. grandi. Lui aussi, d'ailleurs. La dernière fois qu'ils s'étaient vus, ils étaient jeune adolescents, ils avaient eu une relation d'enfant, quelques bisous échangés et bien que c'était dans ces âges là que la puberté se réveillait, ils n'avaient évidemment pas été plus loin tous les deux. Il aurait suffit de quelques années de plus et une relation beaucoup plus stable et sérieuse pour que tout puisse se passer avec elle. Peut être que s'il n'avait jamais dû retourner en centre d'adoption il serait encore là avec elle, peut être même qu'ils se seraient mariés, voir même avec un premier mioche à ce moment là. Sa vie aurait été sans doute tout autre. Plus joyeuse, probablement. Non pas qu'il se plaignait de celle ci, mais il aurait enduré moins de coups durs, c'était certain. Sa mère aurait été encore en vie, elle aurait assisté à tout son développement sentimental et peut être à faire de lui une personne encore meilleure qu'elle l'avait rendu.
Sauf que, évidemment, le destin l'a voulu autrement. Il pouvait faire son fier autant qu'il le voulait, en la revoyant, il se rendait compte que Lee lui avait beaucoup manqué. A vrai dire, il avait longuement hésité à la retrouver même après avoir changé d'environnement, mais il avait été beaucoup trop en colère contre le monde entier à l'époque pour cela. La mort de sa mère avait été quelque chose de difficile à avaler, une étape très compliquée à franchir et même maintenant, il n'était pas certain de l'avoir totalement dépassée.
L'avoir devant lui lui procurait une sensation de bien être absolu. Tous les bons souvenirs, les rares de positifs qu'il avait dans sa vie, remontait aussitôt à la surface. Elle ignorait peut être l'impact émotionnel qu'elle avait sur lui, et d'ailleurs, jusqu'à maintenant, il l'ignorait aussi mais c'était simplement évident. Assez ébloui par cette vague d'émotion qui le submergeait, il avait du mal à gérer toute l'émotion qui s'emparait de lui à cet instant. Alors, peut être en serait-il désenchanté ou encore plus émerveillé? Il était intrigué sur le coup. Il avait toujours eu une image très positive d'elle, sauf peut être au début où les premiers échanges avaient été compliqués, jusqu'à ce qu'ils apprennent à mieux se connaitre et finalement, éprouver une sorte de sentiment amoureux. Les premiers amours, en soi. Speckles devait admettre que, si on lui demandait s'il était déjà tombé amoureux, ce serait à ce moment là. Même si c'était des sentiments encore d'enfant, ils avaient déjà été importants pour lui.
Lorsque Lee décida de se raviser lorsqu'il lui fit comprendre qu'il était libre de ses choix de pensée, il se culpabilisa légèrement. Autant avec n'importe qui d'autre au monde, ça ne le gênait absolument pas de montrer immédiatement ses limites, autant pour Lee, il se dit qu'il aurait pu s'y prendre autrement. Il l'observa un instant, déplaçant légèrement sa tête sur le côté en essayant d'étudier la réaction à avoir suite à ce qu'elle venait de lui dire. Il finit par prendre une expression joyeuse et tirer un grand sourire sur son visage.
"Je t'en suis fort aise." finit-il par lui dire.
Inutile de préciser davantage qu'il ne lui imposera jamais sa manière de penser également et que si son combat c'était ça, il en était très fier pour elle. En soi, c'était quelque chose qui lui semblait juste. Mais il n'avait pas envie de s'en faire un porte parole. Il ne voulait être le porte parole de personne d'ailleurs, hormis de lui même. Il lui avoua qu'elle lui avait manqué. C'étaient des paroles sérieuses et remplies de sincérité, qui sortaient tout droit de son ressentiment. Il émit un rire nerveux lorsqu'elle lui fit part de ses supisicions sur sa vie occupée.
"Eum... pas mal, en effet. Mais ça va, je m'en sors pour avoir du temps libre quand même. Même si, avant de te revoir, j'avais le vague sentiment de le perdre. Heureusement que tu es là pour sauver ma journée."
Néanmoins, rester là avec des gens qui criaient, exprimaient leur colère et ainsi de suite n'était peut être pas la meilleure idée du siècle. Il avait envie de partir d'ici, et pouvoir être seul à seul avec Lee, afin de pouvoir avoir des retrouvailles avec elle digne de ce nom. De pouvoir avoir des nouvelles depuis tout le temps où ils ne s'étaient pas vu et peut être renouer avec elle? Lorsqu'ils décidèrent de partir et qu'elle lui fit la réflexion comme quoi il était toujours aussi charmant, Speckles émit un nouveau rire avant de secouer les épaules, par évidence.
"Il y a des chances qui n'ont pas changées. Mais profites, ce n'est pas avec tout le monde que ça arrive" admit-il dès lors.
Puis il lui tendit la main pour l'emmener ailleurs, comme promis. Il s'était armé de sa casquette pour passer un peu plus inaperçu, même s'il avait certainement déjà dû faire sensation sur les réseaux sociaux, il voulait se faire le plus discret possible pour la suite. D'ailleurs, l'idée de se fondre dans la masse et redevenir une personne comme les autres étaient en général plutôt efficace. Certes, son groupe était du genre connu, mais ce n'était pas non plus au niveau du top des années des grands groupes qu'il admirait comme Queen ou encore Guns'N'Roses. Il n'était pas insensible au surnom qu'elle lui avait donné, un surnom de son surnom déjà donné à l'époque et qu'il arborait désormais comme un véritable prénom. Ils avaient fini leur course devant le premier café croisé, assez loin de tout l'ébranlement dans lequel ils avaient été avant de s'y échapper. Il lui mit un petit coup de pression pour lui faire se rendre compte de l'importance du choix, ce qui la fait réagir. Une réaction qui l'amusa.
"En toute sincérité Lee, il y a peu de chance que je sois déçu. A moins que le café soit vraiment immonde, mais dans tous les cas, j'en garderais un souvenir indélébile."
Un nouveau sourire de reconnaissance apparut sur son visage quand elle lui fit comprendre qu'ici ou ailleurs, l'important c'était d'être ensemble.
"Alors ce sera là" finit-il par décider puisqu'ils étaient visiblement tous les deux consentant pour fêter leurs retrouvailles dans cet endroit. Ils entrèrent finalement à l'intérieur et Lee suggéra de s'installer à l'une des tables libres qui se proposaient non loin d'eux. Puis elle entreprit d'aller leur prendre à boire. Il ouvrit d'abord la bouche pour protester, avant de se raviser et réagir.
"D'accord. Tu prends ce que tu veux, TOUT ce que tu veux" lui dit-il en sortant sa carte et en la lui tendant. "Je te défend de refuser Leanore Payne. Ceci est une invitation de ma part et on ne refuse pas les invitations, en particulier, les miennes" acheva-t-il finalement. "Je compte sur toi pour la suite. Profites."
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Ven 7 Jan - 20:38