Je déteste cette question. Je déteste entendre quelqu’un me demander si j’ai besoin d’aide. J’ai toujours su me débrouiller seul et entendre cette question depuis l’accident me rend plus à cran que jamais. Pourtant je ne devrais pas l’être aujourd’hui. Je devrais être détendu et penser à ce qui m’attend ce soir, à ce premier rendez-vous qui n’en est pas réellement un. A vrai dire ça m’angoisse plus qu’autre chose. Je crains tellement de faire quelque chose de travers, de tout gâcher, que j’ai eu du mal à dormir cette nuit. Sans doute est-ce la raison pour laquelle je suis exécrable pour le moment ? Zack à l’habitude, ça n’est pas une excuse pour l’envoyer promener comme je n’arrête pas de le faire. Après tout, il voulait seulement me donner un coup de main – que j’ai, bien évidemment, refusé. Sortir de chez moi, prendre le risque d’être vu par les journalistes, c’est déjà un grand évènement, je n’ai pas envie qu’on me voie en plus avec une sorte de baby-sitter. Handicapé, certes, mais encore capable de me débrouiller par moi-même. C’est ce que j’ai fait comprendre à mon bras-droit en ajoutant moins gentiment d’aller se détendre en bonne compagnie plutôt de me casser les pieds. M’habituer à ma nouvelle Audi, adaptée pour mon handicap, a été plus rapide que je le pensais, pourtant conduire me file une trouille bleue. Je le cache du mieux que je le peux, prends tout de même ma voiture, mais je sais que si un jour je peux retourner sur le circuit je risque de me figer. Je chasse rapidement cette pensée de mon esprit, me focalise sur ma route et me gare en bas de l’immeuble de Roxy. Faisant abstraction du potentiel regard des autres, je parviens à gagner l’entrée de son bâtiment grâce à la rampe d’accès. Comme un idiot, je n’ai pas cherché à savoir si elle est chez elle ou non. Il y a un risque que je frappe pour rien mais j’aurais fait l’effort, celui que j’aurais dû faire il y a quasiment deux mois. Certes un peu nerveux d’avoir cette conversation avec ma sœur, je donne tout de même quelques coups contre sa porte une fois face à celle-ci – à défaut de pouvoir atteindre le bouton poussoir de sa sonnette. L’oreille tendue, du bruit me parvient de l’intérieur et je ne saurais dire si ça me rassure ou m’inquiète. Enfoncé contre le dossier de mon fauteuil, j’ai à peine le temps de souffler un bon coup que le visage de Roxy apparait, surprise de me voir là. « Salut … » Dis-je simplement en me retenant de croiser les bras. Me donner un air fermé d’entré n’est pas une bonne idée. « Je te dérange ? Est-ce que je peux entrer ? » Demandai-je prudemment. Rien ne l’y oblige. Elle est en droit de me claquer la porte au nez pour m’être comporté comme un con ces dernières semaines, à elle de décider ce qu’elle veut, moi je ne l’obligerais à rien.

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Si je devais analyser ces dernières semaines, je pouvais largement dire qu'elles avaient été chaotiques. Entre le retour de Derek dans ma vie, mon agression et les soucis que j'avais rencontré avec Cameron et Ollie, j'aurais probablement pu me pendre ou aller me noyer dans l'alcool pour oublier si je n'avais pas eu de force mentale. Peut-être que ce que j'avais appris à l'école de police m'avait aidé à tout encaisser ou alors j'étais tout simplement plus forte que ce que je ne croyais. Si je faisais face devant tout le monde, il m'arrivait tout de même de craquer lorsque je me retrouvais seule. Après tout, je n'étais pas une super héroïne, loin de là, je n'étais qu'une pauvre petite humaine se faisant passer pour un rocher insubmersible. Avec les jours qui avaient passé, j'avais appris à mieux cacher mes bleus et mes blessures avec du maquillage et j'avais aussi l'astuce de détacher mes cheveux pour couvrir mon cou même lorsque je ne sortais pas de chez moi. A vrai dire, je préférais ne pas avoir les yeux dessus et c'était évidemment purement psychologique puisque même si je bloquais mon cerveau, ses traces restaient là, sur mon corps. Un toque à la porte me faisait sortir de mes pensées et je repoussais le miroir devant lequel je ne cessais de me juger. J'allais vers ma porte et l'ouvrais légèrement, pas réellement prête à ouvrir grand ma porte à n'importe qui. Je me détendais en voyant mon frère même si nos relations n'étaient pas réellement au beau fixe. En ces périodes de fêtes, les familles étaient censées se retrouver et tout se pardonner mais chez nous, ce n'était pas vraiment d'actualité. « Salut… » répondis-je simplement alors que le voir dans son fauteuil roulant n'était pas quelque chose à laquelle je m'habituais. « Non tu ne me déranges pas, entre. » enchaînais-je en ouvrant la porte pour lui faciliter l'entrée à mon appartement. « Je suis étonnée de te voir, je ne te le cache pas... Tu veux boire quelque chose ? » Autant être honnête et j'étais aussi connue pour ça, je ne savais pas ne pas dire ce que je pensais même si pour parler sentiments plus ouvertement, j'étais la dernière de la classe, je le reconnaissais. Je regardais Cameron prête à lui servir ce qu'il voulait et ce même si je lui en voulais de son comportement dernièrement. Malgré tout, j'avais tenté de lui trouver des excuses et son état actuel en était une, selon moi. Comment Casey ou moi-même aurions réagi si nous avions subi ce qu'il avait subit ? Je n'en savais rien et rien ne prouvait que nous aurions été plus faciles à vivre.

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Honnêtement, je n’ai pas la moindre idée de ce que je vais bien pouvoir lui dire ou de comment lancer la conversation. Il y a tellement de choses que je dois dire, tellement de choses pour lesquelles je dois me faire pardonner, qu’il est compliqué de savoir par où commencer. Je sais qu’elle m’en veut. Je connais Roxy depuis des années maintenant, je ne sais peut-être pas lire en elle, mais je parviens facilement à deviner ce qu’elle pense au regard qu’elle me lance. C’est cette facilité à anticiper les actions des autres qui m’a permis de m’en sortir dans mon milieu, même lors d’une course. Ça reste moins facile lorsqu’il s’agit de la famille. Elles ont toutes les raisons du monde de m’en vouloir. Avec leur père, je suis celui qui a insisté pour ne rien dire à Oliana. De cette façon, j’étais persuadé de la protéger et surtout de ne pas la perdre. C’était égoïste, j’en ai pris conscience, mais je n’aurais pas pu continuer dans un monde où elle n’était plus. Malheureusement, j’ai fini par me fermer. Plein de colère et de culpabilité, j’ai refusé de parler d’Oliana, de parler de ce que je ressentais et j’ai laissé ma colère m’éloigner de mes sœurs. Quant à leur père … Je me connais assez pour savoir qu’il me faudra du temps pour accepter qu’il m’ait forcé la main comme il l’a fait. Il a profité de ma vulnérabilité pour m’obliger à mentir et je n’étais pas assez bien pour réfléchir comme je l’aurais dû. Cela dit ça n’excuse rien, pas même la froideur dont j’ai fait preuve après mon accident en septembre. Alors, oui, il y a un tas de raisons qui font que je dois me rattraper. « Salut … Non tu ne me déranges pas, entre. » La remerciant d’un mouvement de la tête, je fais habilement entrer mon fauteuil dans l’appartement. Tout une question de perspective, de calculs et d’anticipation … Comme en voiture. « Je suis étonnée de te voir, je ne te le cache pas... Tu veux boire quelque chose ? » Mon regard qui balayait les lieux pour y trouver un changement ou autre se repose sur Roxy. « De l’eau ça m’ira, merci. » Je vais déjà prendre le risque de boire un verre de vin rouge ce soir, avec mes médicaments je préfère ne pas trop déconner. « Il parait que c’est le bon jour pour se rattraper. » Je suis presque ironique en disant ça, c’est plus fort que moi. « Au début je voulais seulement te prévenir que je ne viendrai pas au repas de Thanksgiving ce soir mais … Je pense qu’il est temps qu’on parle, non ? » Surtout moi, bien sûr. Logan et elle passent leur temps à tout me pardonner alors que je suis coupable de bien des choses, mais il temps de mettre les choses à plat.

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Je n'étais pas le genre de personne à garder ses pensées pour soi, si j'étais pudique sur mes sentiments, je ne l'étais toutefois pas sur mes avis et pensées. De plus, rien n'était plus important pour moi qu'une bonne communication, je savais à quel point le manque d'échanges pouvaient tuer une relation qu'elle soit amicale, familiale ou amoureuse. Evidemment, cet exercice n'était pas des plus simples et il fallait parfois mettre son égo et sa fierté de côté. Je n'avais pas vraiment de mal à le faire avec ma famille même si mes autres émotions comme la colère par exemple pouvait me pousser à fuir la discussion... Cameron avait fait l'effort de venir jusque chez moi et je me devais de le recevoir. D'une parce que c'était mon frère et de deux parce que malgré tout, je n'avais pas envie que l'on reste distant l'un avec l'autre. Casey et moi avions du faire face à un raz de marée lors de l'accident d'Ollie puis celui de Cam et les dégâts collatéraux avaient été assez conséquents. Etant la plus âgée, je m'étais donnée comme devoir de soutenir tout le monde et d'encaisser pour tout le monde ; autant dire qu'être le tampon des soucis familiaux n'était pas aussi facile que ce que j'avais imaginé.

Cameron était entré et m'avait demandé de l'eau. J'avais approuvé et j'étais allée chercher un grand verre d'eau avant de revenir vers lui et de lui faire signe de prendre place dans le salon. Certes il ne pouvait pas s'installer confortablement dans le canapé mais une discussion dans cet espace était moins solennel que sur une table à se regarder dans les yeux tel un entretien d'embauche. « Tu attendais donc Thanksgiving… » répondis-je sur un ton aussi ironique que lui. « Toi non plus alors… » soufflais-je en tentant de ne pas m'agacer. Une partie de moi comprenait ce choix mais l'autre était en colère de voir notre famille se déchirer ainsi. « Je pense aussi oui, on ne peut pas continuer comme ça. » Clairement c'était impossible et j'attendais ce qu'il avait à me dire. J'avais des défauts mais au moins, je savais écouter les gens lorsqu'ils parlaient ou qu'ils tentaient de s'excuser. Est ce que Cameron allait s'excuser ? Je n'en savais rien, je m'attendais à tout mais j'avais surtout espoir d'avoir une conversation constructive.

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Ma fierté a souvent été un frein. Reconnaître mes torts et m’excuser, ça m’a souvent demandé beaucoup. Mon côté écossais ou les épreuves de ma vie, je ne saurais pas dire ce qui m’a conduit à être ainsi. C’est mon mécanisme de défense. Lorsque les choses ne vont pas, que je sens que je perds le contrôle, je revêtis le rôle de ce pauvre type qui pense avoir toujours raison et je ne m’excuse pas. C’est le meilleur moyen de créer des conflits, mais aussi celui de veiller à ne pas laisser mes émotions être trop visibles. De toute manière, je n’ai jamais prétendu être parfait, je ne vais certainement pas commencer maintenant. Ça ne veut pas dire que je ne dois faire aucun effort avec mes sœurs qui subissent toute cette histoire depuis trop longtemps. Néanmoins, je sais qu’avec Roxy ça risque d’être particulièrement difficile. Elle qui a toujours pris son rôle d’aînée au sérieux – malgré notre petit mois d’écart – je sais qu’elle vit mal tout ça et qu’elle ne tiendra pas sa langue. Ce qui ne devrait pas me faire de mal. « Tu attendais donc Thanksgiving … » Je ne fais aucun commentaire sur toute l’ironie que je sens dans sa voix pour en avoir fait moi-même preuve il y a moins d’une minute. « Toi non plus alors … » Bien, il faut croire qu’Oliana a fait passer le message. Est-ce que je dois lui dire que si nous ne nous rendons pas au repas familial, nous serons tous les deux en revanche ? « Je lui ai proposé de manger chez moi. » Je décide de jouer la carte de la franchise, même si ça ne plait pas, ça ne peut que jouer en ma faveur. La suivant dans son salon, je ne fais pas l’effort d’aller m’installer sur son canapé. Non seulement je vais avoir du mal mais en plus de ça j’apprécie cette légère distance qui me permet de ne pas laisser ma paniquer m’envahir. « Je pense aussi oui, on ne peut pas continuer comme ça. » Au moins, là-dessus nous sommes d’accord. « Je ne suis pas certain d’être prêt à me trouver dans la même pièce que lui avant un moment. » Dis-je en parlant de son père. J’éprouve une telle rancune et colère envers lui que je ne pourrais pas contrôler mes mots. « En revanche, je n’avais pas à vous rejeter Casey et toi. Je suis fatigué de tout ça, Rox. Je luttais avec ma culpabilité avant l’accident et vous passez votre temps à me pardonner alors que vous ne le devriez pas. Je suis loin, très loin, de mériter votre pardon et votre inquiétude. Avec l’accident je n’aurais pas été capable de supporter ça et votre pitié. » Je ne le suis toujours pas mais j’accepte doucement le risque de devoir passer le reste de ma vie dans ce fauteuil. Il est trop tôt pour que des progrès soit visibles de toute manière.

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Ollie et Cameron allaient donc passer Thanksgiving tous les deux, chez Cam. J'approuvais légèrement de la tête alors que même si je leur en voulais de ne pas venir, je pouvais aussi comprendre ce qu'ils ressentaient vis à vis de notre père. Bien sur, égoïstement je n'avais pas envie d'être privé de ma sœur et de mon frère mais il fallait se rendre à l'évidence, notre famille ne surmontait pas aussi bien les épreuves que les Reagan de Blue Bloods. « Te rate pas. » dis-je simplement alors que la bienveillance couvrait mes paroles. Ollie méritait d'être heureuse, comme elle l'avait été ces dernières années. A mes yeux, seul Cameron pouvait lui apporter ce bonheur et si je pouvais comprendre que séduire une deuxième fois sa fiancée pouvait être difficile à vivre, il avait au moins la chance de ne pas l'avoir définitivement perdu.

Une fois dans le salon, je m'asseyais dans le canapé posant mon regard sur lui, comme pour lui lancer le feu vert des explications tant attendues. Mon père n'est clairement pas tout blanc dans cette histoire, c'était une évidence. D'ailleurs, je m'étais pris la tête avec lui plusieurs fois au réveil d'Ollie et encore aujourd'hui, je savais que quelque chose s'était brisé entre nous même si je ne le faisais pas ressentir à mes petites sœurs. « Tout comme Ollie, je peux comprendre… » Je pouvais comprendre même si je n'en avais pas très envie mais encore une fois c'était mon côté aînée de la famille, ce côté qui voulait avant tout fédérer. « On ne le devrait pas ? Mais Cam, t'es notre frère. Même si on en avait pas envie on finirait toujours par te pardonner même quand t'es qu'une sale tête de mule.… » Je ne pouvais pas être plus sincère. « Je t'en veux de nous avoir repoussé comme ça mais on était pas à ta place pour comprendre et ressentir ta peine alors même si ça nous a fait du mal, on a accepté la distance que tu as mise. » Même si accepter était un bien grand mot, on avait pas eu le choix et autant l'une que l'autre, nous en avions souffert. « De toute façon que ce soit pour toi, Ollie ou Casey, mérité ou non, je m’inquiéterai toujours pour vous plus que pour n'importe qui d'autre. » C'était un fait, c'était ainsi et rien ne pouvait changer ça. « Mais si tu agis de nouveau comme un con, je te laisserai sur le pas de la porte, sache le. » Je n'avais pas envie de ressassée toute cette année, les engueulades concernant Ollie, les déceptions des comportements de chacun... J'avais aussi fait des erreurs et je refusais d'être blâmée pour ça toute ma vie, je ne pouvais donc pas le faire en retour.

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« Te rate pas. » J’aurais pu mal le prendre. Oui, ça aurait pu être le cas si une autre personne que Roxy me l’avait dit. Je me contente seulement de froncer les sourcils pour lui faire comprendre sans une parole que ce n’est pas dans mes plans. Je pense que niveau échec, j’ai pas mal donné ces derniers mois, repasser par là ne me tente pas plus qu’avoir un autre accident de voiture. Il s’agit là de la bienveillance de ma sœur, de son habitude à nous protéger, nous ses cadets. Cet amour dont elle déborde pour nous est touchant bien qu’il la mette également dans une situation délicate assez souvent. Surtout dès qu’il est question d’Oliana et moi. Cela dit, je ne compte pas me rater. Je vais tout faire pour me rattraper et, surtout, pour récupérer ma fiancée, ce que j’aurais dû faire il y a un moment. Ce n’est pas la raison de ma présence ici. Je tenais à lui dire la vérité concernant Thanksgiving mais je suis là pour autre chose. J’attends seulement qu’elle me donne l’autorisation de me lancer comme un petit garçon bien sage qui écoute sa grande sœur. Je l’écoute m’affirmer que parce que je suis son frère, je mérite d’être pardonné, même quand j’agis comme un crétin. Je serre les dents pour ne pas répliquer immédiatement et la laisser terminer. Il est évident que je ne suis pas d’accord avec elle. « Être votre frère ça ne pardonne pas le fait que je vous ai mis dans une situation dans laquelle vous n’auriez pas dû vous trouver. » Je commence en soupirant. « Je lui ai menti pendant des mois, Rox. Je vous ai forcé à en faire de même et bien que l’idée ne venait pas de moi, je l’ai approuvé. Je lui ai volé sa vie et je vous ai obligé à me suivre. Frère ou pas, je n’avais pas à faire ça et je n’ai pas à être pardonné aussi facilement. » Je me punis, je le sais. C’est idiot d’avoir besoin d’être blâmé comme ça mais pourtant c’est ce qu’elles auraient dû faire. Leur père l’est bien lui et je ne suis pas mieux que lui quand on y regarde de plus près. Je voudrais que mes sœurs le comprennent mais peut-être suis-je un peu masochiste. « Tu sais que tu es trop bonne avec nous ? Je ne suis même pas capable de te le rendre correctement. J’ai préféré être un véritable connard avec vous plutôt que de vous laisser une chance. Tu comprends que je juge ne pas mériter votre pardon ? Je passe mon temps à être un salaud avec vous … » Ce qui ne veut pas dire que je ne serais pas là pour mes sœurs si elles ont besoin, mais je continuerai d’être assez hypocrite pour les repousser lorsqu’elles tendront la main pour m’aider. Simplement parce que je suis trop fier pour l’accepter et que je n’ai toujours pas digéré d’être désormais incapable de marcher.

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Je savais pertinemment que je pouvais parfois me montrer dur avec les gens, on me l'avait souvent reproché à l'académie. Cela dit, je ne savais pas le faire avec ma famille ou tout du moins avec mes frères et sœurs. Je ne savais comment expliquer mais j'étais incapable -ou presque- de jouer la distance, la froideur ou l'indifférence comme je pouvais le faire avec d'autres personnes ou même avec mes parents parfois. Peut-être était ce, ce lien si différent qui unie les frâteries d'une façon qu'aucun parent ne peut l'expliquer. D'ailleurs mes différents avec les miens sont sans doute la source de pas mal de problèmes... Ils m'avaient toujours mis une certaine pression sur les épaules, être l'exemple, toujours irréprochable. C'était amusant de demander ça à son enfant quand on est l'opposé en tant que parent.

Je regardais Cameron et l'écoutais à mon tour. Je comprenais son point de vue mais d'un autre côté, il ne pouvait pas nous forcer à le détester pour soulager sa conscience, ça ne se passait pas comme ça.  « Je t'en ai voulu et j'en veux encore à papa pour ça. Je suis pleinement consciente qu'on aurait pu perdre Ollie définitivement. Heureusement ça n'a pas été le cas... Mais si elle n'était pas revenue, on ne serait pas là à en parler. En l’occurrence, les choses sont différentes et dieu merci. Tu as merdé, papa aussi, Casey et moi aussi... On a tous merdé à divers niveaux. Aujourd'hui, je n'ai pas envie de te jeter la pierre en continu, je ne vois pas comment Ollie peut se reconstruire si on te rabâche ton erreur, si on avance pas ensemble. » dis-je sincèrement prenant quelques secondes pour reprendre mon souffle.  « Je ne te demande pas de me le rendre alors ce n'est pas grave. Je pense que tu es trop dur avec toi-même Cam. Et ton plus gros soucis actuellement c'est que tu ne t'es pas pardonné à toi même alors bien sur tu ne peux pas comprendre qu'on l'ait fait. Tu es mon frère et même si tu merdes, même si tu me fais mal, j'aurais toujours la force de te pardonner. Je ne dis pas que je t'excuserai de tout, et preuve en est ces derniers mois... Mais je sais qui tu es et même si tu n'es pas d'accord avec ça, tu es quelqu'un de bien Cameron MacLeod. » On faisait tous des erreurs, mais si les membres de notre famille ne pouvait nous pardonner alors qui le pouvait ? Il n'y avait rien de plus important pour moi que ma famille et même si il allait falloir encore quelques temps pour que j'oublie l'enfer des derniers mois, la dispute et la colère que j'avais ressenti lorsque ils avaient décidé de mentir à Ollie, je savais que rien n'était insurmontable surtout pas quand je voyais le sourire de ma petite sœur quand elle évoquait le nom de l'homme qu'elle aimait.

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Il est difficile de se pardonner lorsqu’on a une tendance à commettre erreur sur erreur. Ça ne m’a pas empêché d’accepter les choses avec les années. J’ai commencé ma vie – à dix ans près – avec des merdes, les accumuler est devenue une habitude, comme une vieille amie. Dès mon adolescence j’ai joué avec le feu. Les courses de voiture dans les rues de la ville, une fois la nuit tombée, étaient devenues mon passe-temps. A croire que je cherchais à me brûler les ailes, à narguer la mort. Peut-être était-ce le cas. J’étais ce gamin qui avait perdu sa famille sans comprendre pourquoi lui était toujours là. Le complexe du survivant. Et j’aurais continué encore longtemps si on ne m’avait pas remis dans le droit chemin en m’offrant la chance de piloter pour une bonne raison. Mais là encore j’ai continué d’être le chanceux, le type qui s’en sort toujours sans trop de casses, y compris lors de l’accident avec Oliana en janvier dernier. Pourtant, craindre de la perdre elle aussi a été un électrochoc et cette culpabilité que je le relayais dans un coin s’est abattue sur moi. Depuis tout ce temps elle ne me lâche pas et je n’arrive pas à saisir pourquoi mes sœurs ont été capables de me pardonner, elles. C’est ma punition. Mon besoin de payer de leur avoir imposé ce choix mais aussi d’en avoir fait des idiots pendant des années qui auraient pu blesser d’autres personnes. Roxy est celle qui devrait le plus m’en vouloir. Elle qui nous a toujours semblé être droite dans ses bottes, mon opposé le plus complet, elle devrait me considérer coupable puisque je ne l’ai jamais fait. Une logique caduque qui ne semble pas tellement l’être pour mon esprit détruit. Malgré ça, l’entendre admettre qu’elle m’en a voulu me fait mal au cœur. Je ne baisse pas les yeux et je ne laisse rien paraître, néanmoins ma poitrine se compresse et je me déteste d’avoir été aussi égoïste. Je ne peux pas m’empêcher de penser que si je n’avais pas eu mon accident, jamais Oliana ne serait rentrée. Je n’aurais jamais eu de seconde chance et, très franchement, je ne suis pas sûr que je serais encore là à l’heure actuelle. La dépression peut mener à faire des choses insensées. « J’ai sans arrêt peur de la tirer vers le bas. Si ça n’avait pas été pour moi, elle n’aurait jamais eu l’accident qui lui a causé sa perte de mémoire et elle n’aurait jamais eu à vivre dans un mensonge. A vrai dire, aucun de vous n’aurez été dans cette situation. » Je suis un poison. Une affirmation que je me trimbale depuis mon réveil fin septembre. Je n’apporte que le malheur et la mort autour de moi. C’est le cas depuis toujours et malgré ça je suis assez égoïste pour m’accrocher à mes proches plutôt que de m’en éloigner. « J’ignore si je serais capable de me pardonner un jour … » Admis-je en soupirant. « Faire en sorte d’accomplir de bonnes actions et être réellement une bonne personne, ce n’est pas la même chose. J’essaye en quelque sorte de contrebalancer toutes les merdes que je peux cumuler … Je ne sais pas si j’irais jusqu’à dire que je suis quelqu’un de bien. J’ai plutôt l’impression d’être opportuniste et calculateur. » Si être opportuniste n’est pas forcément une si mauvaise chose, le côté calculateur à quelque chose de péjoratif. N’ai-je pas fait tout ce que j’ai fait seulement pour qu’on oublie mes mauvais actes ? Je ne saurais le dire.

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Cameron et moi avions toujours été très différent l'un de l'autre. J'avais toujours eu une certaine ligne de conduite, j'avais suivi un chemin assez tracé depuis longtemps et si j'avais fait quelques bêtises, je n'avais jamais été vraiment border line. Cameron, lui, avait toujours cherché à jouer avec le feu, volontairement ou non. Je savais pertinemment pourquoi il agissait ainsi et la réponse se trouvait dans son passé, dans la perte de ses parents. Ce n'était pas de la psychologie à deux balles que je faisais là, mais lorsque j'avais commencé à déraper, j'avais compris pas mal de choses. Personne ne savait ce que j'avais fait à mes débuts dans la police, et je comptais bien à ce que mes agissements restent un secret à jamais. Malgré ça, et sans qu'il ne le sache, cela m'avait rapproché de mon frère et évidemment ça m'avait ouvert les yeux sur pas mal de choses. Peut-être que ma réaction aujourd'hui était aussi du à ça et c'était donc surement difficilement compréhensible pour lui. « On ne peut pas refaire le passé Cam, ça ne sert à rien de te faire du mal avec ce qui aurait pu se passer ou non et surtout de qui tout ça est la faute. Ollie est en vie et c'est tout ce qu'on doit retenir. J'aurais aimé que ça n'arrive pas, c'est évident. J'aurais aimé qu'elle n'oublie pas et surtout qu'on soit honnêtes avec elle... Je ne peux pas le nier, mais par contre ce que je sais, c'est que tu ne la tires pas vers le bas au contraire. Ollie est différente mais au fond, c'est la même personne, la même fille géniale, tendre, passionnée... Ce qu'elle a ressenti pour toi est encore là. A deux vous êtes plus forts que tout, alors ne doute pas de toi, s'il te plait. » Le temps m'avait appris qu'avoir des remords, des regrets, des 'et si' ne servait strictement à rien. On pouvait se lamenter, se faire du mal, c'était humain mais il fallait réussir à relever la tête, pour soi-même en premier lieu, et ensuite pour les gens qu'on aimait. Evidemment, il m'arrivait de ne pas suivre cette ligne de conduite, j'étais loin d'avoir toujours autant de recul. « C'est peut-être trop tôt mais tu y arriveras... Parce que sinon ça te consumera et ça consumera notre famille. » Il fallait être honnête et mettre des mots sur la situation. Notre famille, et je ne parlais pas de nos parents quand j'utilisais le terme famille était fragilisée et nous devions rester soudés. « Je suis d'accord, beaucoup de personnes se font passer pour des gens bien parce qu'ils font une bonne action dans l'année mais ne te compare pas à ce genre de personnes Cam. Tu es vraiment dur avec toi même... On fait tous des erreurs, on merde tous, ce n'est pas parce que tu merdes et que tu tentes de réparer tes erreurs que tu es un manipulateur. Tu es humain, et on apprend tous les jours... J'ai fait aussi d'énormes erreurs mais heureusement pour moi, vous n'avez pas arrêté de m'aimer pour ça, et c'est pareil pour toi. » La famille c'était un peu tout ce qui nous restait lorsque le monde nous tournait le dos.

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