Je crois que je n’ai jamais autant paniqué de ma vie. Même lors de la signature de mon premier contrat dans le monde de la musique, je pense que c’était moins pire que maintenant. Est-ce que je suis en train de faire une grave erreur ? Mais maintenant que je suis sur la route, qu’elle sait que j’arrive, je ne peux pas revenir en arrière. Je suis obligé de lui en parler. Le stress me fait perdre mes moyens, je pense que j’aurais mieux fait de fermer ma bouche. Trop tard, je dois maintenant assumer et aller au bout. Je ne sais pas du tout dans quoi je m’embarque, mais quoi qu’il arrive, j’ai tout de même le sentiment que cela risque de changer beaucoup de choses pour le futur. Et ça va être soit en bien, soit en mal. Je ne me fais pas de fausses idées, dans un sens, je pense que je sais déjà comment elle va réagir. Est-ce que je suis idiot au point de foutre en l’air des années à ses côtés ? Il faut croire que oui et je pense que je vais m’en vouloir après ça. J’arrive juste devant chez elle et je coupe le moteur de la voiture. Je n’arrive même pas à sortir, je reste bloqué, j’ai tout simplement peur d’y aller. Mais je dois le faire, je dois être courageux. Je passe mes mains sur mon visage, prend une grande expiration et laisse tout sortir doucement. Je me dirige devant sa porte, marque un léger temps d’hésitation, mais finalement, mon doigt vient appuyer sur la sonnette. Il est temps de laisser sortir tout ce que j’ai en moi.
Je me sens mal. Depuis qu’il m’a envoyé quelques sms, je me sens mal. Parce que ça a l’air de lui tenir à cœur et qu’en tant que meilleure amie, je ne l’ai pas vu venir. Ce qu’il doit me dire ? Je n’en ai aucune idée. Visiblement, c’est assez important pour qu’il se déplace jusqu’à moi, et ne pas le faire par messages. Ce qui est je crois pire que tout. Qu’est-ce que j’ai loupé ? Qu’est-ce que j’ai vraiment loupé dans la vie de mon meilleur ami ? Bon, faut dire qu’avec l’arrivée de Jaxon dans ma vie, tout s’est un peu compliqué dans ma vie. Ou améliorer, je ne sais pas. Je tente de trouver des repères, je crois, du moins assez pour me dire que cet homme n’a pas changé totalement toute ma vie. Mais à vrai dire, quelque part si. Si j’avais délimité des règles, en commençant à le connaître, je me rends compte qu’elles étaient peut-être inutiles. Ou du moins, que je l’avais jugé comme tout le monde, aux premiers abords. Enfin bref, ce n’est pas là une soirée concernant Jaxon, je le sais, c’est pour Alec. Alec que j’attends avec nervosité dans mon petit salon, sans arriver vraiment à me concentrer sur mes cours. Lorsque la sonnette retentit, j’ai soudainement le cœur qui bat fort. Trop fort. Je me lève, comme si j’étais sur des ressorts, et vient rapidement lui ouvrir : « Ok, je flippe totalement de ce que tu vas me dire. J’aime pas ça, et je… » Je le laisse entrée, ce qu’il fait rapidement. « J’suis désolée si j’ai fait quelque chose de mal, ou si j’ai loupé quelque chose. Je voulais pas » Mais ses mains sur mes épaules me rappellent rapidement à l’ordre : « Désolée. Je panique totalement. »
Rien que de voir son visage, quand la porte s’ouvre devant moi, je sens que la panique s’installe encore plus. Elle ne se doute pas un seul instant de ce que je veux lui dire et j’imagine qu’elle risque de changer d’humeur, voir même sa façon de penser à mon sujet. Le pire, c’est qu’en étant si mystérieux par message, elle pense même que c’est quelque chose qui pourrait venir d’elle. Je la connais par cœur et j’imagine qu’elle doit se poser des millions de questions. “Tu ne devrais pas, ce n’est rien de grave, t’en fais pas.” Je rentre à l’intérieur, avant de continuer. “Mais non ce n’est absolument pas de ta faute, tu n’as rien fait de mal, loin de là.” Et quand elle pose ses mains sur mes épaules, je viens l’enlacer, pour lui dire bonsoir. “Je n'imagine pas ta réaction après ça du coup…” Le simple fait de me retrouver ici, dans ses bras, durant ce court instant, ça me fait tellement bizarre. D’ordinaire, je n’y prêterai même pas attention, mais comme je sais ce que je vais lui dire, ça change tout. J’ai le cœur serré, prêt à exploser. C’est tellement difficile, presque impossible, de contenir tout ça. Je l’attrape par la main, tout en avançant en direction de son salon. “Je ne sais pas pourquoi mais je pense que c’est pas plus mal si tu as quelque chose à boire. Ça risque d’aider, autant pour moi que pour toi.” Mais surtout pour moi, comme ça je vais peut-être réussir à lui dire plus facilement.
« Tu ne devrais pas, ce n’est rien de grave, t’en fais pas. Mais non ce n’est absolument pas de ta faute, tu n’as rien fait de mal, loin de là. » Quelque part, ça me rassure, parce que je ne sais pas du tout ce qu’il va me dire. Obnubilée par Jaxon, il faut avouer que je l’avais un peu délaissé. Pas par intention, mais plus parce que mon esprit était ailleurs. Dans les yeux intenses et ténébreux de Jaxon. Avec la soirée de mardi, je ne sais plus où j’en suis. Je lui ai promis d’être sienne, mais la peur d’être jeté une fois utilisé me bouffe de l’intérieur. « Je n’imagine pas ta réaction après ça du coup. » Malgré le câlin qu’il vient de me procurer, ça ne m’apaise pas du tout. Mais, je ne dis rien de plus, préférant de quoi il s’agit, et me laisse embarquer dans le salon où je finis par m’asseoir, en jouant avec mes mains par nervosité. « Je ne sais pas pourquoi mais je pense que c’est pas plus mal si tu as quelque chose à boire. Ça risque d’aider, autant pour moi que pour toi. »« De fort ? » A son regard, je sais que cette question est stupide, et je me lève aussitôt pour passer dans la petite cuisine. J’arrive avec son alcool préféré et du rhum arrangé pour moi. Deux petits verres, je nous verse et lui tends mais je bois le mien d’une traite. « Je sais pas ce que tu vas me dire, mais tu me fais vraiment peur, Alec. » Il ne lui arrive presque jamais de réagir comme ça, et après le yoyo que j’ai fait ces derniers jours avec Jaxon, l’enlèvement de Kalia…je suis perdue.
Comment est-ce que je vais faire pour lui en parler maintenant. Déjà que sur la route, la panique avait commencé à me bouffer, c’est encore pire maintenant que je suis ici, devant elle. “Oui, vraiment fort.” Le pire, c’est que j’ai tellement du mal à lui dire que ça laisse tout un moment ou elle doit se demander pourquoi je suis chez elle. Je laisse beaucoup trop de suspens, alors que je ne devrais pas. La période n’aide pas du tout en plus de ça. Je ne voudrais pas qu’elle pense que je vais lui dire ça juste parce que Kira est de retour dans ma vie, ou quelque chose du genre. C’est vrai que ça chamboule pas mal de choses pour moi, mais les sentiments que j’ai pour elle sont présent depuis bien plus longtemps que ça. Et ne parlons pas de ce qui arrive à Kalia… Moi je suis juste celui qui va en rajouter une couche. Quand elle pose le verre devant moi, je décide de suivre directement son mouvement, pour le descendre d’un coup à mon tour. “Tu n’imagines pas comme c’est difficile pour moi de te parler de ça…” Je pose le verre devant moi, la main tremblante. “Et je suis désolé, si je vais te faire du mal, mais ce n’est plus possible, je ne peux plus le cacher.” Je relève la tête, pour planter mon regard dans le sien. “Je t’aime Romy, bien au-delà d’une simple amie. Je suis amoureux de toi, je… Merde !” Je m’en veux, de lui avoir dit. Je le sais que c’est une erreur, qu’elle risque de mal le prendre, d’être distante avec moi. J’attrape la bouteille, pour me servir un autre verre, que je bois d’un coup, encore une fois, avant de continuer. “Je sais que ça doit te faire un choc, d’apprendre ça, comme ça, subitement. Mais je ne pouvais pas continuer sans t’en parler.”
La distance qu’il met entre nous m’est déjà difficile. Ce n’est pas volontaire, ou peut-être que si, mais le fait qu’il parle de quelque chose qu’il ne m’a jamais dit me surprends. Avec Alec, nous n’avons aucun secret. Ou du moins, je supposais qu’on n’en avait aucun. Maintenant, j’ai un énorme doute. Qu’importe ce qu’il me dit, ça me vexe qu’il ne m’ait pas assez fait confiant pour ça. « Tu n’imagines pas comme c’est difficile pour moi de te parler de ça… » Il boit son verre d’une traite et le pose devant lui. Mon cœur bat déjà à tout rompre, sans arriver à comprendre mon meilleur ami. Qu’est-ce qui lui arrive ? « Et je suis désolé, si je vais te faire du mal, mais ce n’est plus possible, je ne peux plus le cacher. » Merde, mais…accouche, Alec ! « Je t’aime Romy, bien au-delà d’une simple amie. Je suis amoureux de toi, je…merde ! » C’est là que je ne saisis pas encore tout ce qu’il vient de me dire.« Qu’est-ce que tu racontes ? » Il se serre deux verres, qu’il boit cul sec, et son attitude dévastatrice me met mal. Ou peut-être est-ce enfin l’écho de ses paroles que je viens d’encaisser ? Il m’aime ? Oui. Je le savais. Mais…plus ? Amoureux ? Quoi ? Tout s’accélère dans ma tête sans que je n’arrive à comprendre. Je me rejoue certains moments à deux, et je comprends doucement qu’il dit vrai. Ces moments où son regard avait changé, où il m’observait sans rien dire, à sa dévotion parfois. Merde ! « Je sais que ça doit te faire un choc, d’apprendre ça comme ça, subitement. Mais je ne pouvais pas continuer sans t’en parler. » Je m’avachis dans le canapé, sans arriver quoi dire ou quoi faire. Je le regarde, il attend que je réagisse. Mais je n’y arrive pas. Moi qui ait toujours défendu l’amitié homme-femme parce qu’il y’avait Alec et moi, et que nous étions moi et lui contre le monde entier. Tout s’effondre. Tout. « Je… » Non, je ne sais pas quoi dire, ce qui me fait me redresser et passer mes mains sur le visage.
Est-ce que je viens de faire l’erreur de ma vie en lui parlant de ça ? Je ne sais pas du tout à quoi je m’attendais. En soit je savais très bien qu’on allait être loin du conte de fée et j’avais bien raison, car sa réaction ne semble pas du tout encourageante pour la suite. Je suis vraiment un idiot, je viens de prendre le risque de perdre ma meilleure amie, celle que je considère comme une sœur depuis tout jour, juste parce que je ne suis pas capable de garder mes sentiments pour elle de côté. “C’est…” J’en ai même du mal à trouver mes mots, je ne sais plus quoi faire. “Je suis vraiment désolé de te faire ça Romy, tu n’imagines pas combien ça me bouffe depuis un moment…” Et j’ai surtout l’impression que maintenant, ça va bouffer ce qu’il pouvait y avoir entre nous deux. Je n’arrive plus à rester en place, je me lève, commençant à tourner dans la pièce, ne sachant pas ou me mettre. “Je n’aurais jamais dû te parler de ça, je suis vraiment trop con…” Mais maintenant, je ne peux plus revenir en arrière et j’ai l’impression que la suite ne va pas du tout me plaire, avec cette impression que je ne peux faire disparaitre. Celle d'être un égoïste sans cœur.
Je suis sur le cul. Parce que ça, je ne l’aurais jamais vu venir. Alec est comme il est, il a ses relations, ses amours, et même s’il n’a pas été l’homme le plus chanceux, il restait actif de ce côté-là. Et moi...et bien, je suis un peu pareille. Du genre chaotique, mais bien trop occupée pour me soucier de ça. Là…je saisis pas, comment toutes ses années ont pu engendrer des sentiments non réciproques. Enfin…Je crois ? Oh, je sais plus rien. Comment ? Comment est-ce que j’ai pas ne pas voir ça ? « C’est…Je suis vraiment désolé de te faire ça, Romy, tu n’imagines pas combien ça me bouffe depuis un moment… » Je le regarde se lever, faire les cents pas, et si j’ai envie de dire ou faire quelque chose pour l’apaiser, je n’en fais rien. Parce que je ne saurais pas comment il le prendrait. Penserait-il que c’est vraiment réciproque ? Que je l’aime ? Merde, c’est censé être Alec et Romy. Romy et Alec. « Je n’aurais jamais dû te parler de ça, je suis vraiment trop con… » « Arrêtes… »Je chasse mes cheveux de mon visage, en me remettant un peu plus droite. « Dis pas ça…t’es pas con pour me dire ce que tu ressens, Alec.. » Je tente de retrouver mes esprits, mais c’est difficile. Cette nouvelle est difficile à encaisser. « C’est…juste trop pour moi. » Pour le moment. Mais ça, je n’arrive pas à le sortir, et à ses mots, je sais qu’il va finir par partir, parce qu’il regrette déjà ce qu’il vient de se passer. Mais je serai incapable de le retenir, parce que je suis juste…sur le cul.
Tout devient difficile. Le fait d’être dans la même pièce qu’elle, ou même de sentir sa présence non loin de moi. De voir cette réaction, son visage, qui en dit long sur ce qu’elle pense en ce moment même. Je viens sûrement de faire l’un des plus grosses erreurs de ma vie en lui parlant de mes sentiments, je me suis ouvert à elle mais maintenant, tout ce que ça va m’apporter, c’est de la souffrance. Encore plus que d’habitude. J’ai cru, pendant un instant, que ça pourrait me soulager de lui en parler mais au fond, j’aurais bien dû me douter que ça n’allait pas se passer comme prévu. Ce n’est pas le genre de chose que tu viens annoncer à ta meilleure amie, que tu connais depuis si longtemps. C’est comme si, pendant tout ce temps, je lui avais menti. Je me suis pitoyable pour ça, mais est-ce que c’est pire, comparé à cette situation dans laquelle je viens de nous mettre, tous les deux ? Je n’arrive plus à réfléchir, mes pensées sont totalement brouillé, l’alcool qui n’aide pas plus que ça. Je la regarde, toujours installé dans le canapé, elle n’a pas bougé, comme si ce que je venais de lui dire l’avait paralysé. “C’est pas vrai Romy, je suis celui qui vient de provoquer tout ça. Je sais très bien que je ne pouvais pas prévoir ta réaction en avance, mais maintenant, je regrette de l’avoir fait…” Pour quoi je suis en train de passer ? J’ai vraiment l’impression d’être un monstre en disant ça. C’est affreux, de venir dire à une femme que tu l’aimes, mais derrière de lui dire que tu aurais préféré ne rien dire. Plus les minutes passent et plus je sens que je vais la perdre, qu’elle va s’éloigner de moi. “J’imagine que tu dois être déçu de moi, je le mérite. C’était idiot de te le cacher durant tout ce temps.” Mais je suis un idiot, donc on va dire que c’est dans ma nature. Je m’approche de la table et attrape la bouteille. Tout ce que je veux, c’est me servir un autre verre. Peut-être que l’alcool va être mon unique compagnie dans les semaines à venir, autant prendre l’habitude le plus vite possible.
J’encaisse…pas. Peu. Ou mal. Je ne sais pas trop à vrai dire. C’est comme se réveiller un matin et ne être certaine de son chez soi. Croire qu’on a vécu toute une vie, pour au final, ne plus reconnaître les murs, les photos et les objets familiers. C’est peut-être poussé, mais c’est ce que je ressens. Je connais Alec, par cœur même. Mais en le regardant là, j’ai l’impression que ce n’est plus le cas. Je panique à cause de ça. Je panique de voir qu’il a creusé ce fossé qui continue d’augmenter sous nos pieds tout seul, et que je ne peux pas le rattraper. Parce que trop d’années ont coulées, que trop a été construit, et qu’une fois les bases soufflées, tout s’effondre comme un château de carte. « C’est pas vrai Romy, je suis celui qui vient de provoquer tout ça. Je sais très bien que je ne pouvais pas prévoir ta réaction, mais maintenant, je regrette de l’avoir fait… » Bam. Encore une autre blessure qu’il m’inflige en l’espace de quelques minutes. M’avouer ça pour au final, le regretter. Dans quel but l’avoir fait alors ? Je ne sais pas. S’il savait déjà ma réaction ? Ou le pensait ? Je baisse les yeux, encore plus blessée et déçue sans arriver à comprendre mon meilleur ami. Mais a-t-il au moins été sincère ne serait qu’une fois ? « J’imagine que tu dois être déçu de moi, je le mérite. C’était idiot de te le cacher durant tout ce temps » Je le regarde prendre la bouteille et commencer à se servir un autre verre. Je découvre un Alec, désespéré et blessé, aussi. Mais je ne sais pas comment l’aider, parce que je me sens trahie et incomprise. Je soupire, en passant une main dans mes cheveux. « Tu devrais partir, Alec » Son regard s’arrête sur moi, presque trop misérable. Mais j’ai l’impression d’être dans une impasse. « J’ai…besoin de temps pour digérer. Et t’as pas les idées claires. Tu peux pas me dire m’aimer et regretter à la seconde. C’est… » Je chasse le mot que je voulais dire d’un revers de la main imaginer, avant de me lever et de prendre la bouteille pour la ranger, d’une manière agacée. Tout me chamboule. J’ai envie de crier et de pleurer à la fois. Mais, je veux juste qu’il parte pour pouvoir le faire. « Vraiment, sors d'ici... »
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