« Tu vas en avoir besoin. » Je ne réagis pas lorsqu’il me dépose de l’aspirine près de verre de jus de fruit et de café. Je suis littéralement perdue dans un souvenir difficile parce que ça a été l’une des disputes les plus violentes qu’on avait pu avoir. Et l’une des premières en son genre, avant de se disputer de mon opportunité et de sa non-implication pour je-ne-sais-quelle-raison. Je n’ai jamais réussi à le percer, et pourtant je connaissais tout de lui. Là, je le sentais à des kilomètres de moi, comme s’il souhaitait que ça en soit ainsi. Progressivement, j’en ai eu marre et décidé de saisir cette opportunité avec ou sans lui. C’était pour moi surtout un dernier espoir, qu’il réagisse enfin et qu’il me revienne vraiment. Mais ça n’a pas été le cas. « Kalia ? T’es toujours avec moi ? » Je sursaute sa voix me ramenant à la réalité. Mes mains passent sur mon visage puis dans mes cheveux, avant d’acquiescer doucement. L’omelette devant moi, le café, le jus de fruit devant moi, je les regarde sans arriver à avaler quoi que ce soit. Mais je me force, en saisissant le doliprane et le café, ma tête me martelant trop. J’ose croiser son regard une fois avalé, alors qu’il prend la parole : « Je ne suis pas ce qu’on considère de stable. Depuis que je t’ai laissé partir pas mal de femmes ont partagé mon lit. » Mes épaules se tendent, mes mains agrippent la tasse. Je ne veux pas en entendre d’avantage. L’imaginer avec une autre m’est déjà difficile, comprendre qu’il y’en a eu des tas c’est insupportable. Il le voit bien puisqu’il ajoute très rapidement : « Tu veux entendre la vérité, laisse-moi te la donner. C’est pas joli et je n’ai que ce que je mérite mais je fais toujours attention. La mère de Naël était supposée être sous contraceptif, quand le préservatif a lâché, j’ai pas paniqué. Jusqu’à ce qu’en avril dernier, elle débarque et me le mette dans les bras en me balançant d’assumer mes responsabilité avant de se tirer je ne sais où. » Mon regard ne supportant pas le sien, je fuis, regardant cette omelette qui me donne envie de gerber une nouvelle fois. Ou est-ce peut-être ses paroles ? Je veux continuer à le détester parce que je ne veux pas retomber dans quoi que ce soit qui me fasse mal, mais en imaginant ce petit abandonné sur le bas de la porte comme un tronque un panier, ça me révolte. Je ne veux pas de pitié envers lui, il l’a dit lui-même : il n’a ce qu’il mérite. « Je n’ai pas refait ma vie, Kalia et…je ne compte pas la faire de sitôt » C’est sensé dire quoi ça ? Qu’il n’a jamais eu l’envie de se poser ? Même avec moi ? Ou depuis moi ? J’ai mal à la tête de réfléchir autant. Mal à la tête de devoir l’affronter alors que mon estomac fait encore des montagnes russes, que j’ai juste encore envie de dormir et que j’aimerai simplement un peu de répit. Mais faut croire que même ça, je ne choisis pas. Je finis par détourner la tête lorsque Naël rigole face à jeu débile devant lui. Tout se mélange dans ma tête, mais une simple question persiste. « Pourquoi tu voulais tant me dire ça, Shiloh ? »
C'est le seul point sur lequel je compte m'appesantir, sur lequel je vais être totalement franc avec elle. L'autre doit resté un secret pour la protéger. Sa sécurité compte bien trop à mes yeux, même après tout ce temps. Ça sera le cas à tout jamais si je dois être tout à fait franc. Je sens qu'elle n'apprécie pas tout ce que je raconte, particulièrement lorsque je parle des femmes qui ont été dans mon lit – ou que j'ai baisé chez elles. Il n'y a pas de quoi être fier, c'est sûr, mais ça m'a permis de me vider la tête autant que les couilles sans jamais laisser le moindre sentiment prendre place dans ma vie. Très peu pour moi depuis elle. Les souvenirs de nos dernières disputes me reviennent en mémoire. Ces disputes contre lesquelles j'ai vite arrêté de lutter. Je faisais de mon mieux pour l'éloigner, pour qu'elle prenne ses distances. J'étais déjà tellement lâche à l'époque. J'aurais pu simplement rompre, ça aurait évité que nous souffrions mais à chaque fois je lui cédais. Impossible de lui résister. Je l'aimais trop pour la rejeter, alors je repoussais le moment autant que possible jusqu'à ce qu'elle décide de partir et que je ne la retienne pas. J'ai pas mal bu après ça, j'aime même couché avec toutes les femmes baisables ou non qui croisaient mas route. J'étais prêt à tout pour me changer les idées et avec le temps la douleur a fini par diminuer mais pas la culpabilité. Elle est restée là, à me ronger jour après jour. Maintenant c'est la douleur qui revient, qui m'empêche de dormir convenablement la nuit. Je bois plus – moins en tout cas – mais je baise encore comme un véritable queutard. Certaines femmes ont essayé de m'amadouer sans succès. Parce qu'aucun d'elles n'étaient Kalia. « Pourquoi tu voulais tant me dire ça, Shiloh ? » Je pince lèvres puis soupire. Me détachant du plan de travail, je croise les bras contre me torse et m'appuie contre le meuble à côté. « Que tu me détestes, je peux vivre avec. Je le fais depuis des années mais que tu penses que j'ai simplement rayé notre relation de ma vie … Non ! J'ai fait des choix que je ne peux pas t'expliquer et que tu ne pourrais pas comprendre, mais je ne les ai pas fait avec plaisir. Je t'ai laissé partir, oui, mais je ne compte pas te remplacer. J'en suis incapable. »
lovers death.
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Je sens que la tournure de la discussion va me déplaire rapidement. Ou du moins que je ne veux pas l’entendre, ça sera au dessus de mes forces actuelles. Pas après que Danny m’ait brisé comme il l’a fait. J’ai sans doute besoin de soutien, pas d’un énième coup qui va me mettre beaucoup plus à terre. « Que tu me détestes, je peux vivre avec. Je le fais depuis des années mais que tu penses que j’ai simplement rayé notre relation de ma vie…non ! » Je l’ai toujours pensé, parce que c’était plus simple dans mon deuil. De le haïr pour ça, d’avoir tiré un trait sur moi sans une once d’hésitation. Le blâmer pour tout, c’était plus simple. Parce qu’au début, je m’aventurais dans des questions qui me brisaient un peu plus : Et si, c’était moi qui n’avais pas fait assez d’effort ? Et si c’était moi qui n’avais pas été à la hauteur de ce qui l’attendait ? Et si c’était moi qui n’avais pas essayer de le retenir ? Non, non et non. J’avais vite pris le plus de me dire que c’était lui à blâmer et lui à haïr. Parce que c’était plus simple. Mais entendre ça me ramène toute cette culpabilité en pleine gueule. Une culpabilité qui va m’asséner un coup encore plus fatale, je le sais. Encore pire que celle de ne pas avoir réussi à repousser Danny, maintes fois. « J’ai fais des choix que je ne peux pas t’expliquer et que tu ne pourras pas comprendre, mais je ne les ai pas fait avec plaisir. Je t’ai laissé partir, oui, mais je ne compte pas te remplacer. J’en suis incapable. » Ma tête retrouve mes mains alors que j’essaye d’encaisser ces propos dans un soupire. Qu’attend-t-il de moi ? Qu’est-ce qu’il veut que je fasse de cette information là ? Savoir qu’il ne m’a jamais remplacé, jamais oublié, qu’il ne refera jamais sa vie parce qu’aucun…n’est moi ? Alors pourquoi diable m’a-t-il abandonné hein ? Qu’est ce que je ne pourrais pas comprendre et qu’il ne peut pas m’expliquer ? Je sais que lui poser toutes ses questions seraient inutiles, parce que je me heurterai à un mur. Malgré toutes ses années, j’ai l’impression qu’il est resté bloqué sur ce même aspect. Je ne sais plus quoi dire ou penser, et si lui dire quelque chose pour lui faire du mal aurait été mon premier abord, aujourd’hui, je ne suis pas certaine que j’en ai réellement envie. La vie est drôle toute même. Il n’a jamais refait sa vie en sachant qu’aucun ne serait à ma hauteur. J’ai refais la mienne en sachant que Danny ne sera jamais Shiloh. « T’aurais du me laisser te détester, c’était plus facile. » dis-je toujours dans mes mains, alors que Naël parle tout seul en fond. « A quoi ça rime tout ça ? » J’ose lever la tête enfin vers lui, le regard fatigué. « Qu’est-ce que tu veux que je te dise, Shiloh ? T’es incapable de surmonter tes peurs et de te dépasser. Après toutes ses années, t’es encore à refaire ses mêmes erreurs. Tu m’as jamais fait confiance, en tout cas assez pour me parler. » Je repousse mon assiette, incapable de manger maintenant, et finit par me lever, même si j’ai du mal à tenir vraiment droit. « Tu veux que je te dise que j’ai tenté de t’oublier d’en les bras d’un autre, et que même me marier n’a rien changé ? Bah tiens, visiblement, on aura jamais ce qu’on désire tous les deux. » Je décide de me mettre en marche, mais je tourne légèrement de l’œil, trop faible pour marcher correctement.
Je regrette ma si célèbre fierté, elle me serait bien utile en ce moment. Avec elle je suis trop naturel, trop ouvert et c’est le cas depuis que je la connais. Elle était qu’une adolescente à l’époque mais je suis tombé pour elle si vite que je savais qu’elle était faite pour moi. Rien ne pouvait expliquer mon envie de l’avoir sans arrêt à mes côtés, la facilité avec laquelle elle parvenait à me faire sourire et cette aisance qu’elle avait de me comprendre. J’étais aussi certain que nous étions destinés l’un pour l’autre que je le suis du fait que la Terre tourne autour du Soleil. Et je l’ai chassé de ma vie. Je me suis privé de ce qu’elle m’apportait, de mon bonheur, pour m'assurer que les ténèbres ne viendraient pas l’engloutir. Ça m'a tué de le faire, je reste toutefois persuadé que c’était la bonne décision à prendre pour elle. Mais maintenant qu'elle est là, chez moi et dans un état pitoyable ? Je ne sais plus. Ça m'agace de réaliser qu'elle a encore une telle emprise sur moi et elle ne semble même pas le réaliser. Elle pourrait me détruire si elle le souhaitait et je la laisserais faire sans même lever le petit doigt. Je voudrais tant être capable de rester neutre et détaché, ne pas ressentir l’envie de m’expliquer quant à l'existence de mon fils. Je le fais malgré tout et ma langue se délie trop vite. Il faut que je sois stupide au point de lui dire que je ne ferais jamais ma vie avec une autre qu’elle. Dans le genre belle connerie à lâcher on ne fait pas mieux ! Je pourrais tout autant me jeter à ses pieds et la supplier de me reprendre, l’effet serait probablement le même. « T’aurais du me laisser te détester, c’était plus facile. » Voilà une chose dont je ne doute pas ! Je suis convaincu que j’aurais mieux fait de me taire. En fait, j’aurais dû la laisser se réveiller et lui payer un taxi pour chez elle au lieu de lui préparer un petit-déjeuner auquel elle ne touche pas et de me confesser comme une mauviette. « A quoi ça rime tout ça ? Qu’est-ce que tu veux que je te dise, Shiloh ? T’es incapable de surmonter tes peurs et de te dépasser. Après toutes ces années, t’es encore à refaire ces mêmes erreurs. Tu m’as jamais fait confiance, en tout cas pas assez pour me parler. » J'encaisse ses critiques sans broncher. Du moins, je le fais quand il est question de cette lâcheté qui nous a mis dans cette situation en premier lieu. Par contre je refuse qu’elle doute de la confiance que je pouvais ou non avoir en elle. « Il n'a jamais été question de la confiance que j’avais en toi. Il y a des sujets dont je ne peux pas te parler même si j'en meurs d’envie. Mais t'as raison, je suis pas capable de surmonter la peur que j'ai toujours eu de te perdre indépendamment de ma décision. » J'ai l’impression de déjà trop en dire. Elle ne sait pas à quel point ça me coûte de lui cacher la vérité … A elle comme à bien d’autres personnes. Je le regarde qui repousse son assiette et descend de sa chaise. « Tu veux que je te dise que j’ai tenté de t’oublier dans les bras d’un autre, et que même me marier n’a rien changé ? Bah tiens, visiblement, on aura jamais ce qu’on désire tous les deux. » Alors qu'elle va pour s’éloigner, son corps faibli et en moins de temps qu’il ne faut pour le dire je suis déjà près d’elle et la rattrape avant qu’elle ne rencontre le sol. « J’aurais préféré que tu me dises l’avoir fait, m’avoir oublié grâce à ton mari, ça m’aurait permis d’accepter plus facilement ton retour. Ça m’aurait permis de ne pas me laisser bouffer par des remords que j’étais parvenu à faire taire. » Lui confié-je en secouant la tête. « Il faut que tu manges ! » Insisté-je en la gardant contre moi une fois redressée.
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« Il n’a jamais été question de la confiance que j’avais en toi. Il y a des sujets dont je ne peux pas te parler même si j’en meurs d’envie. » C’est comme ça que je le perçois, moi. Il n’a pas assez confiance pour se confier et parler de ses fameux sujets. Qu’importe ce que c’est. Sa famille ? Lui-même ? Une double vie ? Un addict ? De la prison ? Pire ? Je ne saurai dire. Mais Il n’a clairement pas eu les couilles de m’avouer ce qui lui pèse. Et c’est ce fossé qui a fini par nous séparer. Parce que j’ai eu beau tout lui donner de moi, lui, ne donnait pas tout. « Mais t’as raison, je suis pas capable de surmonter la peur que j’ai toujours eu de te perdre indépendamment de ma décision. » C’est contradictoire, parce que c’est totalement ce qu’il a fait. Il m’a perdu, d’un coup net comme on arrache une tête. Mais je ne comprends pas. C’est bien lui qui m’a laissé partir et qui n’a jamais donné de nouvelles non ? Comment peut-il finalement me dire que ce n’était pas sa décision ? Ça ne rime à rien. Tout ce que je vois c’est qu’encore aujourd’hui, il n’est pas capable de se confier. Et moi…. ? Eh bien, je suis pathétique parce que je me rends compte à quel point je n’ai jamais pu passer à autre chose. Danny me donnait ce dont j’avais besoin, mais il n’a jamais été Shiloh. Il n’a jamais été mon grand amour. Et il est devenu aujourd’hui mon bourreau que je fuis comme la peste. Décidée à partir d’ici, mes jambes me lâche, ma vision se brouille un peu mais ce sont ses bras qui me rattrapent brisant cette infime distance. « J’aurais préféré que tu me dises l’avoir fait, m’avoir oublié grâce à ton mari, ça m’aurait permis d’accepter plus facilement ton retour. Ça m’aurait permis de ne pas laisser bouffer par des remords que j’étais parvenue à faire taire…Il faut que tu manges ! » Sa proximité a raison de toute la persévérance qu’il me reste, et je me colle un peu plus à lui. Il m’a manqué. Son parfum. Sa présence. Sa simple voix. Son regard. Son sourire et sa manière de me faire rire. Sa protection. J’ai beau me dire que jamais je n’y aurais le droit à nouveau, que quelque part tout est brisé, pendant une seconde je m’accroche à lui, incapable d’effacer ce réconfort que j’y trouve, étonnement. Ma voix se tremble lorsque j’ajoute, les yeux fermés contre son torse : « T’étais l’homme de ma vie…comment aurais-je pu t’oublier ? » Je craque, en proie à des nouvelles larmes en songeant à tout ce que je viens de vivre toute seule ces dernières semaines. Ma vie aurait bien été différente si je m’étais un peu plus battue pour lui, si je n’étais pas monté dans cet avion, si je l’avais au moins aussi recontacté. Je prends conscience qu’en fait, je suis aussi fautive. Je mérite tout ce qui m’est arrivé alors que tout… « Tout ce que je voulais, c’était toi… » Mes larmes tombent, mouilles son t-shirt et que je sente ses bras venir se renfermer un peu plus autour de moi. Est-ce juste notre adieu ? Celui qu’on aurait dû avoir pour vraiment clôturer notre relation il y’a maintenant six ans. Peut-être qu’il avait raison, nous avions tous les deux besoin de se parler pour passer à autre chose…mais maintenant que c’est fait, j’ai juste peur de réaliser que je n’en ai pas envie.
Apprendre à me taire parfois ne me ferait pas de mal. Ça pourrait m'éviter des situations dérangeantes ou des regrets. Vais-je en avoir après cette discussion qui ressemble à des règlements de comptes ? Quelque chose me dit que oui mais pas pour les bonnes raisons. Les regrets de l'avoir laissé partir et d'avoir eu si peur pour elle vont avoir raison de moi et de ma bonne humeur. Non pas que je l'ai été ces derniers jours mais ça va être pire, je peux l'anticiper. Je connais mon caractère de chien et ce dernier est pire depuis que nous nous sommes revus pour la première fois. Tout me revient en pleine tête et je déteste ça. Je ne supporte pas la perte de contrôle sur ma vie, sur mes émotions qui prennent le dessus. Habituellement j'arrive à les refouler et même à les faire taire, avec ce que je fais pour le compte de mon père ce n'est pas plus mal. Il y a bien longtemps que je serais devenu fou autrement mais quand il s'agit d'elle, de Kalia, c'est à croire qu'une autre personne prend possession de mon corps. Une personne qui tient à me rendre faible et idiot. J'en fais des conneries lorsque je suis avec elle, comme trop parler. Elle n'a pas besoin de savoir que je n'ai jamais été heureux de la laisser partir et que j'en suis venu à me comporter comme un enfoiré avec les femmes. J'en trouve une à mon goût et je la baise avant de passer à autre chose. Inutile de me souvenir de son prénom, ce n'est que l'histoire d'une nuit pour me vider les couilles. On a déjà fait plus romantique mais aucune femme n'est aussi douce, aimante et parfaite que l'était mon ex.M'est-il arrivé de penser à elle pendant l'acte ? Oui, surtout les premiers mois qui ont suivi son départ. J'imagine que je vais devoir repasser par-là à partir de maintenant. Je pourrais aussi ne rien faire mais mes couilles ne le supporteront pas, pas plus que mon humeur. Alors oui, je regrette amèrement d'avoir ouvert la bouche.
Encore une fois j'aurais mieux de lui donner un petit-déjeuner et de repartir m'occuper de Naël jusqu'à devoir lui appeler un taxi. A la place je préfère parler. Quel abruti, putain ! Ça lui aurait probablement évité de se sentir plus mal même si je ne parviens pas à regretter notre proximité. Son parfum me fait autant tourner la tête que par le passé et son corps contre le mien m'électrise. Je n'arrive pas à penser à autre chose que ces années où elle venait se caler contre moi et que nous restions de longues minutes comme ça, dans le silence, à seulement profiter de notre étreinte. C'était simple alors. Putain de nostalgie à la con ! Je m'attends à ce qu'elle me repousse, elle fait tout le contraire et ajoute : « T’étais l’homme de ma vie … comment aurais-je pu t’oublier ? » Ces mots sont un coup de massue qui finit de me rendre pitoyable. J'ai brisé une femme merveilleuse et je vais devoir vivre avec ça. Mes bras la serrent contre moi et je dois me faire violence pour ne pas déposer un baiser contre sa tête. « Tout ce que je voulais, c’était toi … » Que suis-je supposé répondre à ça ? Si je lui dis que moi aussi j'ai peur de ce que ça peut amener, de ce que je peux lui faire subir de plus. « Je sais … » C'est tout ce dont je suis capable. Je ne peux pas ne rien dire mais je ne peux pas non plus trop en dévoiler. Passant une main dans ses cheveux, je les caresse avec tendresse. Les yeux fermés, je profite de l'instant convaincu qu'il s'agit du dernier. Nous restons ainsi de longues minutes avant que je ne me penche pour pouvoir encadrer son visage et regarder ses yeux rougis par les larmes. « Tout ce que je veux c'est que tu sois heureuse, même si c'est sans moi. » Je la fixe quelques secondes de plus, efface ses larmes et me penche pour embrasser son front puis la ramène contre moi.
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J’ai tout qui me revient en mémoire. Ces 8 ans passés ensemble. Nos toutes premières fois, nos premières embrouilles, les premiers moments compliqués parce que nous étions jeunes et avaient quand même six ans d’écart, nos familles qui ont tenté de nous séparer au début, surtout ma mère. Mais je l’aimais trop pour l’écouter. J’aimais cette impression d’être une reine à ses côtés, la façon dont il m’offrait le monde et avait des rêves plein la tête. J’aimais refaire le monde, nos vies, allongés tous les deux, en regardant le ciel étoilé. J’aimais ne faire qu’un avec lui – surtout ça. Je n’avais pas envie de connaître autre chose, ni quelqu’un d’autre. J’avais simplement envie de lier ma vie à la sienne, à jamais. Très peu de personne rencontre son âme sœur aussi vite. Moi ? J’étais certaine que c’était lui. L’autre moitié de moi-même, qui rendait hommage à tout mon être. Bordel, qu’est-ce que je l’aimais ! J’aurai tout donné pour lui, franchement tout. J’aurai abandonné mon rêve, mon opportunité, ma famille, ma propre vie juste pour rester avec lui. « Je sais… » Comment peut-il savoir à quel point tout ce que j’étais prête à lui céder juste pour être avec lui ? Comment peut-il savoir combien je l’aimais ? Savoir qu’il était mon tout, mon oxygène, mon passé, mon présent, mon futur… ? Oh non, il ne sait pas ce que cette rupture à provoquer chez moi. Tout a changé ce jour-là, vraiment tout, et il n’a pas une seule idée de cette descente aux enfers progressive que j’ai vécus. Mais je préfère chasser ces pensées négatives et m’accrocher à cette étreinte. Cette dernière étreinte. Parce que c’est tout ce que c’est non ? J’en ai déjà le cœur à nouveau brisé. Pourquoi est-ce que ça fait encore aussi mal ? Je profite de sa proximité pour me calmer, et de son souffle chaud que je ressens sur mon visage avant qu’il ne bouge légèrement, venant prendre mon visage entre ses deux mains. Mon regard glisse de ses yeux à ses lèvres. Ais-je le droit d’y goûter une dernière fois ? Une seule petite dernière fois ? Putain, on dirait une pauvre addicte. « Tout ce que je veux c’est que tu sois heureuse, même si c’est sans moi. » J’encaisse cette phrase qui brise les derniers morceaux de mon cœur en sentant ses chaudes lèvres sur mon front et qu’il me ramène contre lui. Je souffle, dans un murmure : « Si seulement, c’était possible… » Mais il ne dit rien, de plus, profitant de cette dernière proximité. Alors, c’est ça ? La fin ? Je vais devoir enfin passer à autre chose même si je vais devoir le côtoyer chez Red Records ? Suis-je au moins assez forte que ça ? J’ai une soudaine envie de fuir cette maudite maison, et tout ce qui vient de se passer. « Je…vais y aller. » Je me recule à contrecœur de lui, frissonnant de cette fraîcheur qui me pénètre déjà. J’évite son regard, incapable de l’affronter à nouveau. Tout a été dit, et pourtant la seule chose que je pense est à un dernier baiser. Mais je me fais violence pour ne pas arriver sur ce terrain. « Où sont mes affaires ? » Je suis fatiguée, affamée et prête à pleurer de nouveau, mais je veux d’abord être chez moi pour m’écrouler vraiment.
« Si seulement, c’était possible … » Cette phrase, pourtant simple, me donne l’impression de me prendre à la fois un coup de poing dans le ventre et un poignard dans le cœur. J’encaisse sans rien dire. J’encaisse parce que je ne peux pas me permettre d’emprunter cette route bien trop glissante. Si je le fais, je vais finir par la laisser revenir. J’ignore comment mais je le ferais. J’ai été accro à cette femme pendant des années. Je l’ai aimé, protégé, choyé et parfois mise sur un piédestal parce que ça me semblait normal. Elle avait seize ans que le pseudo adulte que j’étais ne pouvait plus penser à autre chose qu’à son sourire capable d’illuminer le monde. Petit à petit, j’ai eu le privilège de découvrir ses courbes et de pouvoir en profiter à ma guise autant qu’elle profitait de mon corps. Honnêtement, j’étais le plus heureux des hommes. Jusqu’à ce que mon père me tienne une conversation qui m’a brisé. Son aveu quant à la véritable raison du décès de ma mère m’a fait paniquer. Je me suis immédiatement imaginé Kalia dans la même situation et j’ai surtout imaginé ma réaction ainsi que celle de sa famille. J’aurais été haïs de l’avoir mise en danger et je me serais détesté d’avoir laissé la vie m’arracher celle que j’aimais. Je me suis mis en tête de l’éloigner sans pour autant lui donner d’explications. Comment étais-je supposé lui expliquer que ma famille blanchit de l’argent depuis des années pour la mafia italienne et certains gangs de Los Angeles ? Comment lui dire que la fortune des Falcone s’est d’abord basée là-dessus ? Elle m’aurait regardé comme un monstre et ça aurait été plus difficile que n’importe quoi d’autre. J’avais confiance en elle et une partie de moi continue encore maintenant, mais je n’ai pas le courage de la mêler à tout ça. Je protège déjà mes sœurs et ma meilleure amie de la vérité, je ne peux pas l’impliquer elle là-dedans. Alors oui, savoir qu’elle ne se sent pas capable d’être heureuse sans moi est douloureux. Ça l’est parce que j’aimerais tellement lui dire de me laisser une seconde chance, d’oublier mes erreurs, mes demandes, et de me laisser lui donner cet amour auquel elle a le droit. Je ne peux pas le faire. Je me tais et la garde contre moi pour une dernière étreinte. « Je … vais y aller. » Pour ne pas changer, je ne la retiens pas. Nous nous sommes dit ce que nous avions à nous dire même si je n’aurais pas été contre la garder ici, dans mes bras un peu plus longtemps. « Où sont mes affaires ? » Il me faut quelques petites secondes pour parvenir à me souvenir de ce que j’en ai fait hier et je me racle la gorge pour répondre sans que ma voix ne déraille. « Je te les apporterai au studio, elles sont dans la machine. Tu pourras me rendre les miennes à ce moment-là. » Ou les garder si elle le souhaite mais j’en doute. « Je vais t’appeler un taxi. » Aucun contact visuel ne se fait entre nous. Je m’éloigne pour prendre Naël dans mes bras qui commençait à chouiner dans son parc puis sors mon portable de ma poche. Encore une fois ça se termine par elle qui s’en va et moi qui n’agit pas. Prévisible.
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Dim 9 Fév - 21:35