Je ne comprends pas ce qu’il a pu se passer. Pour un ancien des forces de l’ordre, se faire traiter comme un criminel, c’est plus que déroutant. Et pourtant, même si on m’a embarqué comme un malpropre, m’arrachant à mon nouveau job sous les regards ébahis des avocats, je restais digne. Je n’avais pas pipé mot, j’avais laissé les agents du FBI autrefois sous mes ordres me bousculer jusqu’à la voiture, menotté alors que je savais très bien que je n’avais rien fait. On ne me laisserait pas passer d’appel à Roxy avant un moment, et évidemment, elle allait se faire un sang d’encre. Moi qui avais eu des regrets quant à mon choix de passer du côté du barreau, je ne ressentais soudainement plus la même chose. Il était évident qu’on essayait de me faire porter le chapeau pour quelque chose que je ne risquais pas d’avoir commis. J’étais intègre, jamais je n’aurais fait quelque chose de répréhensible de mon propre chef. Il était évident que j’avais sous-estimé mes détracteurs. Je pensais qu’en démissionnant du FBI j’aurais la paix, mais même loin, on trouvait le moyen de me polluer l’existence. Et, parce qu’il s’agit du FBI, certaines procédures vont plus vite que d’autres, et très vite, on me place en détention provisoire parce que je refuse de parler. Je n’ai pas besoin d’un avocat, je peux me représenter moi-même, mais je ne sais même pas ce qu’on me reproche. Lors de l’interrogatoire, on prend soin de ne rien me dire. Je connais le processus, je sais pourquoi on prend toutes les précautions, parce qu’on veut éviter que je prouve mon innocence. Le système est pourri jusqu’à la moelle, j’en ai bien conscience. Après de longues heures à m’interroger sans obtenir un mot, je ne demande même pas à parler à ma femme. Pourquoi ? Ils sauraient que c’est une faiblesse à exploiter. Très vite, je découvre la place de prisonnier, l’odeur exécrable venant de la cellule, vêtu d’un habit orange que je n’aurais jamais cru revêtir. Je ne sais pas combien de temps je serais détenu ici, mais en tout cas, ils ont la sérieuse intention de m’y faire enfermer pour longtemps. Pourquoi ? Je ne sais pas. Quel tort ai-je causé ? Est-ce une vengeance liée à ma mort feinte pour éviter que la CIA ne s’empare du FBI ? C’est possible. Je n’ai aucune réponse, et je m’inquiète pour Roxy. Sans le savoir, un de mes collègues, Javier, s’est déplacé jusqu’à chez moi, pour prévenir ma femme de mon arrestation. Aussi, après avoir passé une nuit derrière les barreaux, parmi certaines personnes que j’y ai fait enfermer, je me retrouve au parloir, devant les yeux emplis d’incompréhension de mon épouse et je la regarde sans en savoir plus qu’elle. « Je ne sais pas ce que je fais ici. » Je sais qu’elle me croira. J’ai l’air fatigué, je n’ai pas fermé l’œil de la nuit. Je pose la main sur la vitre qui nous sépare et je poursuis : « Ils sont venus me chercher au travail, sans me dire ce qu’on me reproche si ce n’est une haute trahison envers le FBI. » Je m’étais fait piéger, et je ne savais pas comment me sortir de là. « Comment va James ? » J’imagine que ce n’était pas le plus à plaindre.
C'était incompréhensible. J'avais l'impression que j'étais dans un mauvais rêve mais que je n'arrivais pas à me réveiller. Javier, un agent du FBI que j'avais autrefois côtoyé était venu sonner à ma porte pour m'avertir que Blake avait été arrêté. Il avait vu à mon visage que je m'attendais à tout sauf à cette information. Comment un homme aussi intègre que mon mari pouvait être arrêté pour haute trahison envers son pays ? Je n'avais pas douté une seconde de lui, mon cerveau avait fait les connexions en moins de quelques secondes. C'était un coup monté. Tout ça n'était qu'une couverture pour des manigances bien plus importantes. Quelqu'un au sein du FBI voir de la CIA avait besoin de faire tomber des têtes pour parvenir à ses fins. J'étais dans une colère noire et j'étais prête à tout pour blanchir Blake ainsi que toutes les personnes qui allaient être concernée par cette mascarade. La nuit avait été longue et on m'avait refusé le parloir prétextant que les heures étaient passées mais ils étaient mal tombés, en tant qu'adjointe du procureur, je connaissais la loi mieux qu'eux, dommage. Cela dit, si je les avais recadré, je n'avais pas insisté ne souhaitant pas aggraver le cas de mon époux, après tout, je n'avais aucune idée de l'influence de la personne responsable de tout ce bazar. J'avais emmené James chez mes parents pour la nuit et la journée qui suivait, il était impossible que je gère mon fils et les soucis de Blake en même temps, je devais impérativement me concentrer sur le dernier afin qu'on retrouve aussi vite que possible une vie normale. « Je vous conseille de bien respecter les règles lors de cette garde à vue... » Je regardais le badge de l'officier et arquais un sourcils. « Officier Mackenzie. » Il semblait peu sur de lui, un peu blafard aussi. Jouer la carte du procureur avait fonctionné sur lui, il marchait sur des œufs, la peur au ventre que je ruine sa carrière. Tant mieux, si je pouvais avoir un atout dans ma manche, ce n'était pas vain. J'entrais finalement au parloir et je sentais mon cœur se serrer en voyant Blake vêtu d'une combinaison orange. Je soufflais doucement posant ma main sur la sienne, puisque seuls nos mains pouvaient se toucher, une vitre nous séparait. « Je sais. » Je n'avais pas douté de lui, jamais et ça n'allait certainement pas commencer maintenant. « C'est un coup monté, j'en suis persuadée et je te promets que je vais le prouver, tu ne resteras pas ici longtemps. » J'allais devoir me battre de toute mes forces pour le faire sortir et sans doute traverser quelques montagnes mais ça ne m'effrayait pas. « Ça va, il est chez mes parents... Je n'ai rien dit à personne, pas besoin de tous les inquiéter. » James avait senti l'absence de son père, je le savais. Malgré tout, je l'avais rassuré comme je le pouvais sans pour autant lui mentir. Il avait beau être encore un bébé, il était important de lui dire les choses de façon à ce qu'il comprenne sans embellir la vie non plus. Je fonctionnais ainsi depuis toujours, la vie n'était pas un monde de fées et de licornes et je refusais que mon fils grandisse dans un cocon dorée pour se prendre une violente claque d'ici quelques années. « Comment tu te sens toi ? Est-ce que ça va avec les autres détenus ? » On en avait enfermé pas mal, lui plus que moi et je redoutais qu'il puisse se passer quelque chose de dramatique sans que je ne puisse rien faire.
Je ne parvenais pas à déterminer si on cherchait à me causer du tort parce que j’avais quitté le FBI, ou parce que j’y avais fait tomber quelques têtes. La corruption était à son comble, et il m’apparaissait toujours plus difficile d’accepter que l’organisation que j’avais tant chérie, pouvait vouloir mon annihilation. Pourquoi ? J’avais justement quitté les miens dans l’optique de pouvoir mettre ma famille et moi à l’abri. Il semblerait que je m’étais fourvoyé. Je ne savais même pas si je pouvais contacter quelqu’un au bureau, ça pouvait jouer contre moi. Je savais que s’ils m’avaient arrêté, ils avaient un dossier en béton qu’il serait difficile de réfuter. Quoi qu’ils me reprochent, il allait falloir que je surmonte les accusations, et si je m’étais engagé dans le pénal, ce n’était pas pour défendre ma propre tête. Ca me paraissait insensé. Mais en même temps, je ne faisais plus confiance à quiconque. Ebranlé comme jamais, je voulais me terrer dans mon cocon familial et ne plus en sortir. Sauf que j’étais coincé ici, avec des prédateurs qui ne me lâchaient plus du regard, comme si j’étais une gazelle esseulée au milieu de la savane. Evidemment que certains d’entre eux voulaient me faire payer mon affront, mais ce n’était pas ce qui m’inquiétait le plus. A vrai dire, j’étais plus concerné par les faits qui m’étaient reprochés et qu’on me dissimulait pour le moment, plutôt que par l’attitude des criminels au sein de la prison. Je ne rasais pas les murs, mais je me méfiais de tout, même de mon ombre. Heureusement, mon compagnon de cellule n’était pas une de mes anciennes victimes, mais un gamin dealer de drogues, qui comprit qu’il ne servait à rien de me poser des questions pour tenter de me faire la conversation, je ne répondrais pas. J’étais déjà en train de me préparer à me défendre. Je voulais les laisser faire la première erreur pour me permettre de rebondir, mais ils avaient dû être briefés sur ma façon de faire car jusqu’à présent, ils avaient été aussi secrets que moi. Si retrouver ma femme me soulageait parce que ça me permettait de calmer les pensées négatives qui avaient commencé à faire leur apparition dans mon esprit au moment où on m’avait enfermé, je ne savais même pas quoi dire pour lui expliquer la situation. Il n’y avait qu’une seule chose que je savais : « Ils ont quelque chose à me reprocher de solide apparemment. » Ils disaient que tout m’accablait, mais je ne risquais pas de leur demander de quoi il s’agissait. Sinon, ça voulait dire que je questionnais mon innocence. Comme d’habitude, Roxy était animée par un esprit revanchard qui comptait faire payer toute personne qui comptait s’en prendre à nous. Ca me fit sourire. Je lui signifiais que je n’avais rien dit qui pourrait être retenu contre moi, bien qu’elle le sache probablement. « Je n’ai pas ouvert la bouche. » Mais j’étais inquiet qu’elle veuille gérer le dossier, parce qu’elle portait mon nom, et je ne voulais pas qu’on puisse l’associer à moi, encore moins dit qu’elle était de mèche et qu’elle était complice. Elle ne pourrait de toute façon pas intervenir officiellement en étant ma femme. « Ne te mouille pas, ça pourrait affecter ta carrière. C’est David contre Goliath. » Il fallait s’armer de patience, que je traine longtemps ici ou non. Mieux valait ne pas s’affoler. Rassuré de savoir notre fils en sécurité, je hochais la tête, avant de lui recommander : « Vaut mieux le laisser là-bas quelque temps, sait-on jamais. » Je ne voulais prendre aucun risque, et puis Roxy ne pouvait pas gérer tout à la fois, ça allait être éreintant. Le moins sa famille en savait, le mieux c’était. Roxy s’inquiétait de mon état, et si elle avait raison de le faire, il était inutile de l’inquiéter en nourrissant son appréhension, aussi, je temporisais en omettant que déjà, certains avaient cherché à me provoquer, et que la vengeance pouvait survenir à tout moment. « Ca va. Mais je sais que certains sont ravis de me voir là et qu’ils s’en donneront à cœur joie. Je ne peux pas aggraver mon cas alors je vais essayer d’éviter les ennuis. » Je lui adressais un sourire, cherchant à me convaincre tout autant qu’elle que ça ne durerait pas que bientôt, je serais dehors avec elle.
Toute cette histoire n'avait pas de sens pour moi et je devinais qu'elle n'en avait pas plus pour Blake. Il n'avait pas sa place en prison, bien au contraire. Il était l'homme le plus droit que je connaissais alors la possibilité d'un complot contre lui, pour le diffamer, était la première chose qui m'était venu en tête. J'allais me donner corps et âme pour le défendre et pour trouver les responsables de cette injustice. Je n'avais peur de personne, surtout pas quand on touchait à ma famille ou à mon mari. Nous avions traversé énormément de tempêtes et pourtant, nous avions toujours fait front ensemble. Ça n'allait pas changer aujourd'hui. « Ils n'ont rien, ils ont créé quelque chose et ils ne vont pas gagner, ça je te l'assure. » C'était sans doute plus facile pour moi de dire ça étant donné que j'étais à l'extérieur mais je voulais lui donner un peu d'espoir quant à la suite des événements. Blake m'avait sauvé plus d'une fois, alors si il s'avérait que je devais épuiser mon énergie pour le sortir de là, j'allais le faire. J'étais prête à y consacrer mon temps voir ma vie même si je n'espérais pas qu'on en arrive là. « Je n'en doute pas, tu sais comment ça fonctionne. » Il était intelligent et il était le maître des interrogatoires, les officiers allaient devoir s'accrocher. « Je t'ai trouvé le meilleur avocat du pays. » Parce que si il était innocent, il allait tout de même devoir se défendre surtout face à une institution comme le FBI. Heureusement, j'avais plus d'un tour dans mon sac, tout n'était pas perdu pour lui. « Est-ce que tu laisserais quelqu'un gérer si j'étais à ta place ? Je ne crois pas. Je ne vais pas mettre en péril ma carrière et quand bien même, tu passes avant, notre famille passe avant. » J'étais catégorique sur le sujet mais je n'étais pas non plus une tête brûlée qui ne réfléchissait pas avant d'agir. Je n'allais pas me buter contre des portes, j'allais respecter la loi et faire les choses correctement pour blanchir définitivement Blake. « Tu ne me feras pas changer d'avis, je suis une Lennox doublée d'une Ellis. » tentais-je de plaisanter pour adoucir un peu le sujet qui était tout même assez sérieux. « Oui, il va y rester un peu le temps qu'on règle tout ça, tu lui manques. » James aimait son papa plus que tout, il lui vouait une vraie passion et fierté, c'était admirable à regarder et sans doute le tableau le plus craquant qu'il m'était donné de voir. « A croire qu'ils t'ont mis ici pour éviter le procès et l'annulation des charges... Ils veulent que ces tarés te finissent ici. » C'était macabre mais j'étais presque certaine de ma théorie. Sans procès, personne ne pouvait savoir qu'il n'avait rien fait et des doutes subsisteraient toujours sans que rien ne soit dévoilé... alors que si tout était mis en lumière, il serait plus facile à prouver que Blake n'avait rien fait de mal. C'était sacrément tordu. « Fais attention à toi... Je sais que c'est facile à dire mais je m'inquiète vraiment. Je ne veux pas qu'il t'arrive quoi que ce soit. » Je resserrais nos mains et je prenais une inspiration comme pour me donner du courage. Je n'étais pas dans mon meilleur état et il était évident que si mon mari ne ressortait pas vivant d'ici, j'allais mettre l'état à feu et à sang, plus rien ne pourrait m'arrêter. Si il y avait des choses que je ne supportais pas sur terre, l'injustice était sûrement la pire surtout quand elle venait de notre propre camp.
Si je m’étais toujours efforcé de faire mon travail de la meilleure des façons, je ne pouvais pas dire que j’étais irréprochable et je trainais certaines affaires derrière moi. Notamment celle qui avait vu toute mon équipe se faire éradiquer. Il s’agissait d’une plaie que j’aurais du mal à refermer, et même si ma seule faute avait été de mal juger le terrain sur lequel on était, les personnes à mes trousses pouvaient en décider autrement. Après tout, pourquoi avais-je eu la vie sauve ? « Roxy, tu sais comme moi qu’ils peuvent se servir de certaines des dernières affaires… » Il y avait celle aussi, où pour coincer un des gangs les plus connus de LA, je m’étais mis dans leur peau, voire la dernière en date, qui m’avait fait quitter le FBI, parce que j’avais feint ma mort pour coincer la CIA. Tout cela n’était pourtant pas de la haute trahison envers son pays, mais je n’étais plus étonné par la corruption qui avait pris possession de la justice. Je savais que Roxy n’allait pas rester plantée là sans rien faire, toutefois, je ne tenais pas à ce qu’elle s’en mêle non plus, ne serait-ce que pour la protéger elle et notre fils. Evidemment, c’était peine perdue, elle avait déjà pris les devants, et m’annonçait qu’elle m’avait déjà choisi le meilleur avocat du pays, et je fronçais les sourcils, un peu sceptique face à ce choix. Certes je serais probablement bien représenté, mais je voyais également les frais s’élever. « Je peux me défendre seul. Ca va nous couter une fortune… » Me défendre seul était risqué, parce que je n’aurais accès à toutes les pièces étant le mis en cause. D’autant plus que je savais très bien que bon nombre d’innocents étaient prisonniers dans notre pays sans possibilité de prouver leur innocence. Alors peut-être que Roxy avait raison. Elle essayait d’ailleurs de me convaincre de la laisser faire, sachant que dans le cas inverse, j’aurais fait la même chose. Je soupirais. Je savais que le temps nous était compté et je voulais me dire que toute cette mascarade prendrait bientôt fin, mais je n’étais pas sûr de moi. « Je sais, mais je ne sais pas bien de quoi ils sont capables, je ne veux juste pas qu’ils s’en prennent à toi. » J’acquiesçais alors que Roxy ne me laissait de toute façon pas le choix, et je ne pourrais rien faire pour l’en empêcher en étant enfermé ici. « Une Lennox surtout. Je suis pas aussi borné que toi ! » Tentais-je en souriant malgré tout. Je n’étais pas accablé, si la prison n’était pas un environnement agréable, pour l’heure, je m’accrochais à cette possible sortie. Je déchanterais si les choses n’évoluaient pas dans le bon sens. Pour ce faire, il m’était facile de songer à des sujets plus réjouissants, comme notre fils, qui avec les mois qui passaient, m’étonnait toujours plus. « A moi aussi il me manque. » D’ailleurs, depuis que j’avais changé de travail, je rentrais toujours plus tôt pour profiter de quelques heures à ses côtés. Je balayais les insinuations de Roxy en secouant la tête, persuadé que si le FBI avait bien des vices, il n’avait pas celui-là à me jeter dans la fosse aux lions. « Non, c’est la procédure, détention provisoire. S’ils n’ont rien contre moi d’ici vingt-quatre heures, ils me relâcheront, mais ils trouveront bien une parade. » Surtout que s’il m’arrivait quelque chose ici, cela ferait scandale et ils n’avaient pas besoin de ça. Ils étaient vicieux mais pas stupides. Je lui offrais un sourire, sentant qu’elle n’était pas rassurée, et je cherchais de quoi la faire rire : « Il ne m’arrivera rien. Je sais me défendre. Et puis s’ils espèrent sortir un jour, il ne vaudrait mieux pas qu’ils s’en prennent à un avocat pénal. » L’exercice était plutôt difficile, j’en convenais. Aussi, il me fallait réfléchir à comment retourner la situation en notre faveur. « J’aimerais juste que tu contactes Haynes si tu peux… Il doit être en mesure de savoir ce qu’on me reproche et c’est le seul en qui j’ai confiance. » En dehors d’elle évidemment, mais elle n’était plus au FBI.
« Je suis certaine que non. Tout ce que tu as fait, c'était pour le bureau et Jones le savait. » J'étais convaincue que même si les méthodes du FBI étaient parfois douteuses, Blake n'avait rien à se reprocher. Il n'avait rien fait qu'on ne lui avait pas demandé et tout se justifiait si on y regardait bien. J'étais agacée qu'on en soit là, surtout après nos départs du bureau qui auraient du signer la fin de nos soucis mais qui en fait ne semblait que nous en apporter davantage. « Tu n'as aucune chance si tu te défends seul, surtout pas d'ici. Fais moi confiance s'il te plaît et ne te préoccupe pas des frais. » Je n'allais pas vendre notre maison non plus, il fallait qu'il se rassure mais il fallait également qu'il ne se tracasse pas trop avec ce genre de détails que je gérais. Depuis mon arrivée au bureau du procureur et bien qu'elle soit récente, j'avais acquis quelques beaux contacts et mon statut me permettait de pouvoir les utiliser. Je ne faisais rien de répréhensible, bien au contraire, Blake était innocent, on devait le sortir de cette mauvaise passe. « Ils ne s'en prendront pas à moi. » On ne pouvait pas en être surs mais si vu à la vitesse ou ils avaient tenté de rayer l'ancien directeur de la carte, si j'avais été dans leur ligne de mire, j'aurais été mise sur la touche depuis un moment, moi aussi. « Hum, ce que tu crois... Tu es têtu, Blake Ellis. » J'esquissais un léger sourire alors que je me voulais rassurante. On s'était toujours sortis de tout, je ne voyais pas pourquoi cette affaire ferait exception... Je n'allais rien lâcher jusqu'à son acquittement, je m'en étais fait la promesse. Je n'étais pas étonné que James manque à son père, notre petit bout de chou était un ange tombé du ciel même si ses premières semaines avaient été difficiles, nous avions réussi à nous apprivoiser et à prendre un rythme. Je m'inquiétais que l'absence prolongée de Blake casse un peu ce qu'on avait mis en place mais les enfants avaient une capacité d'adaptation incroyable, il n'y avait donc aucune raison pour que James ne s'en remette pas, rapidement. Je regardais mon mari alors qu'il ne pensait pas qu'il avait été mis en prison pour qu'on s'occupe de son cas ici... C'était naïf mais il avait le droit de penser ainsi surtout si ça pouvait l'aider à tenir le coup. « Je suis au courant de la procédure... Mais je reste convaincue que tout ça n'est pas juste une application de la procédure et qu'ils ont autre chose en tête. » Aussi horrible que cela puisse être. Le FBI était corrompu par quelqu'un, ou plusieurs personnes, je ne savais pas mais le bureau que nous avions connu n'était plus, c'était une évidence. « D'accord... Espérons que cet argument ait du poids. » Ce n'était pas dit vu le peu d’intellect de certains détenus mais on pouvait y croire quand même. « Je vais le contacter et tenter d'en savoir plus. En espérant qu'ils ne l'aient pas mis sur la touche... Je vais faire ce qu'il faut et dès que j'en sais plus, je reviens te voir. » Je resserrais nos mains et je soufflais légèrement. Cette situation n'était pas habituelle ni même normale, nous étions la loi, Blake faisait ce qu'il pouvait pour l'appliquer depuis tant d'années, que se retrouver de l'autre côté n'était pas légitime. « Les gardiens sont sympas au moins ? Je veux dire, ils ne sont pas corrompus ? » Parce que si c'était le cas, j'allais monter au créneau plus vite qu'il ne fallait de temps pour le dire. Je souhaitais m'assurer que son incarcération se passe au mieux si mieux il y avait.
Jones le savait oui, mais Jones avait pris sa retraite, probablement las de devoir trouver un digne successeur après ma reconversion, nous n’avions plus échangé depuis. Je pouvais le comprendre, mais ce que je ne saisissais pas, c’était la raison pour laquelle le FBI en avait après moi. « Ils le feront, ils n’ont pas de scrupule. Je déplore le FBI d’aujourd’hui… » Est-ce que j’avais été aveugle ? Le FBI possédait une lourde histoire en termes de corruption, il n’était pas impossible que je me sois fourvoyé à leur égard. J’avais peut-être même alimenté cela malgré moi. Lucide, Roxy pensait que j’allais droit dans le mur si je souhaitais me défendre seul. Et je tiquais légèrement, pensant qu’elle n’avait pas confiance en moi, mais ce n’était pas ça, je le savais. C’est que je n’avais pas les armes pour lutter. « Je te fais confiance, j’ai pas confiance en les autres en revanche. » Et je ne savais pas quoi m’attendre avec le meilleur avocat du pays, surtout que je n’avais rien fait de répréhensible. Je soupirais, un peu fatigué de devoir me battre pour rien, parce que je ne savais pas d’où tout ce cirque venait. J’espérais que Roxy allait pouvoir me faire sortir et que je puisse reprendre le travail sans encombre. Elle avait toujours su s’entourer de bonnes personnes – sauf son ex Derek – dans le travail en particulier, même si elle avait eu certaines erreurs de parcours. Je ne doutais pas qu’elle connaissait les personnes qui étaient capables de me sortir de là. Mais je ne voulais pas non plus qu’elle utilise ce ‘pouvoir’ acquis parce qu’elle travaillait pour le procureur. Parce que je n’en serais que moins crédible par la suite dans mon travail, et parce que je condamnais ces jeux de pouvoir. Et, il y avait une chose que je voulais éviter à tout prix : qu’elle devienne une cible privilégiée pour eux en se mouillant pour me faire sortir. Elle semblait confiante, et je me promettais de devenir une vraie déflagration ambulante si du mal lui était fait. « Ils n’ont pas intérêt, ou je détruis tout. » Roxy n’appréciait pas quand mon regard s’assombrissait, elle m’avait déjà vu à l’œuvre, et si j’étais capable de me contrôler, quand il s’agissait d’elle, je ne répondais plus de rien. Mais de l’avoir devant moi, m’apaisait, comme si elle seule avait le pouvoir de faire taire le monstre qui grondait en moi. Je lui souris amusé par sa petite remarque, parce que je me sais têtu, mais face à elle, je baisse bien vite les armes. « Pas quand je sais que je ne gagnerais pas face à toi. » Elle m’a toujours eu à l’usure. Et j’estimais que personne était de taille à l’affronter alors je souhaitais bien du courage à quiconque qui se mettait en travers de sa route. Roxy avait l’air de penser que le FBI avait mis en place un plan machiavélique pour se débarrasser de moi sans avoir rien à faire, et je n’étais pas aussi certains qu’elle qu’ils tombent si bas, surtout s’ils n’avaient rien à me reprocher. Je voulais croire à la méprise, mais je ne me faisais pas d’illusions pour autant et souhaitais avoir son avis sur la question, il était possible qu’elle en sache plus que moi. « Et tu penses qu’ils ont quoi en tête ? » En prison aucun argument n’avait du poids, c’était la loi du plus fort, mais je n’étais pas inquiet pour autant, j’étais entrainé et je me méfiais de tout le monde ici, bien plus que ce qu’ils me craignaient. Alors j’étais serein et j’essayais de l’instiguer chez ma femme aussi. « Ne t’en fais pas pour moi. » Acquiesçant alors qu’elle irait à la pêche aux informations auprès de Haynes, je doutais qu’il ait été mis hors course tant il était essentiel au FBI. « Ils ne pourraient pas se passer de ses talents, c’est le meilleur dans son domaine. » Et par le passé j’avais été ravi de le recruter moi-même parce qu’il avait donné un avantage non négligeable à mon équipe. Je suppliais ma femme du regard de surtout penser à elle avant tout. Elle aurait besoin de se prémunir de tout. « Fais juste attention à toi. » C’était là ma priorité, sachant notre fils en sécurité. Quant aux gardiens, j’haussais les épaules sans grande conviction. Je ne voulais pas tenter de me les mettre dans la poche, je n’étais pas doué pour ce faire. « Ils font leur job, que je sois innocent ou pas, ils s’en foutent bien pas mal, et j’évite de leur adresser la parole. » Je voulais être irréprochable, sans traitement de faveur, je pouvais endurer quelques jours ici.
« Et moi donc. » soufflais-je. Le FBI que nous avions en face des yeux aujourd'hui, n'était définitivement pas le même que celui avec lequel nous avions travaillé pendant une dizaine d'années. Il n'y avait plus rien de similaires et si j'avais eu un léger pincement au cœur en changeant de voie, ce n'était plus du tout le cas actuellement. Je le regardais et si je refusais qu'il se défende seul, ce n'était pas par manque de confiance, bien au contraire, il était la seule personne dont je ne doutais pas, sur aucun point. « Je vais suivre le dossier de près, je ne te lâche pas. » Autant dire que j'allais être sur les côtes de cet avocat, que ça lui plaise ou non. Il n'y avait pas une autre issue qu'une issue positive, je voulais sincèrement y croire même si pour le moment, voir Blake avec sa tenue orange était difficile. J'esquissais un léger sourire à sa menace parce que je savais qu'il était fort possible qu'il aille au bout des choses, surtout si ça me concernait. En réalité, si quelqu'un s'attaquait à James ou à moi, il signait son arrêt de mort auprès de Blake, c'était un fait qui ne me surprenait pas, je connaissais mon époux. Bien sur, je n'appréciais pas quand sa part d'ombre prenait le dessus sur l'homme qu'il était mais avec le temps, j'avais appris à le tempérer et à le canaliser, du moins je l'espérais. « Pas faux. » admis-je en lui rendant son sourire, caressant sa main avec tendresse. J'aimais bien le faire craquer de toutes les manières possibles et ce n'était pas donné à tout le monde de fissurer la carapace de Blake Ellis. Je me posais mille questions sur les intentions du FBI concernant leur ex directeur. Pourquoi autant d'efforts pour le mettre sous les verrous si c'était finalement pour le relaxer ? J'allais mener mon enquête et je me fichais pas mal si cela devait m'emmener jusqu'à Washington. D'ailleurs, peut-être qu'il y avait un peu de rétention d'informations au bureau de Los Angeles et que l'Olympe, comme on aimait les appeler, n'était au courant de rien... Il y avait sûrement un coup à jouer. « Je ne sais pas, mais j'ai l'impression qu'ils veulent éliminer quelques têtes simplement pour pouvoir exercer leur petit trafic tranquille... Il y a de la corruption, c'est une évidence. » On ne pouvait plus faire confiance à qui que ce soit, sauf peut-être à nos anciens collègues comme Raphael qui en plus d'avoir travaillé avec nous était aussi un ami. J'essayais de ne pas trop m'en faire pour Blake mais ici, tout était possible... On savait tous comment était traité un flic ou ancien flic en prison, pire un fédéraux. « D'accord. » Haynes était sur ma liste et une fois sortie du parloir, j'allais aller le voir. Il pouvait nous aider, en tout cas si Blake le pensait alors moi aussi. « Je ferais attention à moi, promis. » J'avais été bien formée et si mes années au FBI pouvait me servir, c'était bien à assurer ma propre protection tout en restant sur le qui-vive. « Tu as raison, plus tu es discret, mieux c'est. » Si j'avais peur de ce qu'il se passait ici, je savais que mon mari avait la bonne attitude et qu'il n'allait pas attirer volontairement les ennuis. « Tout ça est une question de temps... Je vais te sortir d'ici. » Il fallait qu'il garde mes paroles en tête parce que je n'allais rien lâcher jusqu'à ce qu'il soit libéré. Il n'avait rien à faire là et j'allais le prouver... Nos valeurs et notre droiture étaient nos forces, personne ne pouvait nous les enlever, pas même quelques connards bien placés. Certes, j'avais parfois merdé en chemin mais Blake avait toujours été là pour rectifier le tir. Je lui devais donc de faire de même cette fois-ci.
Je ne pouvais pas dire que j’appréciais la situation dans laquelle je me trouvais. Elle était plus qu’inconfortable et je n’avais pas la possibilité de réaliser quoi que ce soit en étant enfermé dans ma cellule, j’en étais plus que conscient. Je savais que certains détenus y parvenaient, mais je n’étais pas un criminel, j’allais attendre que la justice fasse son travail. Au contraire de ma femme, qui se lançait à corps perdu dans la bataille. Elle avait un mauvais présentiment, ça se lisait dans son regard. Et si d’ordinaire ça ne me dérangeait pas, cette fois, c’était différent, parce que techniquement, elle ne devait pas interférer du fait de sa position au bureau du procureur, et parce qu’elle était ma femme. Ca m’inquiétait, mais je savais que de lui en faire part ne servirait à rien. Elle irait au bout parce qu’elle ne supportait pas l’injustice dont j’étais victime. Il était inutile de l’en empêcher, et j’espérais simplement qu’on ne lui reprocherait pas un conflit d’intérêt, après tout, elle était connue sous le nom d’Ellis désormais, et non plus son nom de jeune fille. « Je sais. Tu ne l’as jamais fait. » Déclarais-je alors que je hochais la tête à ses dires. Elle ne m’avait jamais laissé tomber, même quand les choses allaient plus que mal pour moi, voire même entre nous. Les choses s’étaient tassées depuis, et nous avions tout affronté ensemble, alors je ne doutais pas qu’elle allait réitérer la chose aujourd’hui. Malgré la situation, Roxy gardait le sourire, et ça me rassurait, voire me canalisait même. Elle était sereine et c’était tout ce qui m’importait puisque notre fils était en sécurité. En revanche, je ne voulais pas renchérir sur les gestes d’affection, tout simplement parce que les gardes qui nous épiaient pourraient croire que je lui mettais quelque chose dans les mains. Il y avait bien quelque chose qui m’échappait dans le discours de Roxy, tout comme dans mon arrestation, et c’était la raison latente de leur acte. « Ca n’a pas de sens pour moi, je suis parti, je n’ai plus de droit de regard sur ce qu’ils font. » Et surtout, depuis que je leur avais tourné le dos, je ne m’en préoccupais plus, j’avais tourné la page, aussi détestable soit ce comportement, tant c’était un désaveu pour le FBI. Je ne croyais plus en leurs valeurs, ni en la justice de notre pays, et pourtant, je continuais d’essayer d’œuvrer pour elle. En tant qu’ancien fédéral, j’étais une cible de choix ici, mais j’avais également un plan pour me faire respecter ici si ma présence en prison s’éternisait. Je n’étais pas non plus dans le couloir de la mort, encore moins entouré des criminels les plus dangereux du pays, du moins pas tant que ma culpabilité n’était pas prouvée. Je n’étais pas sûr qu’Haynes ait des informations, mais il était la seule personne qui se mouillerait pour moi et qui ne me ferait pas défaut. Le reste ne comptait pas à mes yeux. Satisfait d’entendre ma femme me garantir qu’elle ferait attention à son propre bien-être, je pouvais dormir sur mes deux oreilles et je lui souriais pour lui montrer que sa réponse m’apaisait, car je serais toujours plus inquiet pour elle que pour moi. Me détendant, je me laissais même aller à une plaisanterie. « Ca je sais faire. Etre mondain aurait été plus contraignant. » La discrétion était un de mes points forts, et le silence aussi, les enquêteurs l’apprenaient à leurs dépens. Je connaissais la loi aussi bien qu’eux, et je ne comptais pas dire quoi que ce soit qui pourrait être retenu contre moi. L’affirmation de ma femme m’amusa une fois de plus : « T’en fais pas, je bouge pas d’ici. » Je n’avais nulle part où aller, c’était une manière de dire que j’attendrais le temps qu’il lui fallait. Je n’avais aucun doute la concernant, mais j’espérais malgré tout qu’elle n’y laisserait pas des plumes.
Je savais pertinemment que Blake s'inquiétait pour moi, autant que je devais m'inquiéter pour lui. C'était un peu normal dans un couple, de se préoccuper de ce qui pouvait arriver à l'un ou à l'autre, nous n'étions donc pas différents des autres. Malgré tout, je n'avais pas peur de prendre des risques pour le sortir de prison, ni même pour le blanchir parce que j'étais convaincue qu'il était purement et simplement innocent. Si il y avait bien quelqu'un qu'on ne pouvait pas corrompre sur cette fichue planète, c'était mon époux. « Et je ne le ferai jamais. » Nous avions promis de nous aimer et de nous soutenir devant nos familles et nos proches, je n'allais certainement pas renier mon serment face à une nouvelle épreuve. L'adversité ne nous avait jamais réellement épargné mais nous en étions toujours sortis plus fort, je voulais qu'il en soit de même cette fois même si le combat ne faisait que commencer. « Peut-être mais tu sais sans doute trop de choses, du moins pour eux... Tu es parti mais pas sans fracas. Après ce qu'il s'est passé avec Jones l'année dernière, vous avez ouvert une boite de pandore. » Du moins, c'était mon avis. Blake et Jones avaient feinté leurs morts et mis en place des stratagèmes astucieux pour revenir en force et faire tomber quelques mauvaises têtes au sein du bureau. Malheureusement, les choses se retournaient un peu contre eux, contre Blake plus précisément. Tout n'était probablement pas lié mais on ne devait rien négliger à ce stade. Tout ça était écœurant quand on voyait tout ce qu'on avait donné au FBI depuis des années... Si j'avais fait le deuil de mes années d'agent fédéral, je savais que cela avait été particulièrement compliqué pour mon mari. Il avait tout donné jusqu'à la sueur de son front et parfois de sa propre personne. Pour quoi ? Finalement pas grand chose quand on voyait la façon dont il avait été traité. Voir un sourire se dessiner sur les lèvres de Blake me faisait du bien. Je le sentais rassuré de savoir que je n'allais rien faire d’inconscient et que j'allais faire attention à moi dans les jours, voir semaines à venir. Je n'étais plus aussi impétueuse qu'avant, je savais réfléchir avant d'agir et c'était aussi parce que j'avais appris à ses côtés. Désormais, je n'avais plus qu'un objectif en tête ; aller voir Haynes et comprendre ce qui se tramait chez mon ex employeur. « C'est vrai, finalement c'est ton élément. » dis-je en souriant légèrement. Blake n'était pas le genre de personne à se mettre en avant ou à chercher les ennuis par soucis d'ego, fort heureusement. « Tu gardes ton humour, c'est rassurant. » répondis-je. Tant qu'il était lui-même alors ça voulait dire qu'il avait encore la force de se battre, c'était important surtout face aux gens qui l'entourait entre les murs de cette prison. « Je reviens demain, avec j'espère, de bonnes nouvelles. » J'avais envie de l'embrasser mais c'était tout bonnement impossible. Les contacts physiques étaient interdits et je devais m'estimer chanceuse d'avoir pu toucher ses mains sans qu'on ne me dise rien. Peut-être que l'imbécile qui m'avait accueilli avait réellement peur de ce que je pouvais faire à sa carrière.
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Mar 22 Juin - 19:11
