C’est un de mes mauvais jours – ceux où je suis complètement fatigué, parce que le revers de la chimio commence à faire effet. Nous arrivons à un stade où ma maladie semble être maitrisée – en autre que cela ne risque pas de s’empirer. Tout ce qu’on attend tous c’est que ça s’améliore, et pour le moment ce n’est pas le cas. Si le coma de Janvier et Février commence à être loin dernière nous, il y’a des mauvais jours comme aujourd’hui qui sont plus difficiles que d’autres. Je me sens fatigué, vulnérable, incapable de faire quoi que ce soit. Teddy étant en garde, j’ose quand même lui envoyer quelques sms pour la rassurer mais minimise mon état. Je reste simplement dans mon lit, en attendant que ça passe réellement. Si bien que lorsque la sonnette retentit en me réveillant, je peste. Il est 15 heures, je n’ai pas eu le courage de sortir du lit, de manger quelque chose, de prendre une douche. Je suis une pauvre larve qui tente de passer cette journée aussi vite que possible, mais…je n’attends personne. Du moins, je suppose. Lorsque la sonnette retentit de nouveau, je peste de nouveau et me force à repousser ma couette. Avec une force surhumaine, je finis de bout, à enfiler au moins un jogging et un t-shirt, pour ne pas rester qu’en boxer. Puis je descends lentement mes escaliers qui mènent vers l’entrée. Une main passe dans mes cheveux, complètement en bordel, avant de saisir la poignée et de me figer face à deux paires d’yeux qui me sourient. « Qu’est… ? » Mes frangins, Luke et Nova, sont plantés, là face à moi avec un grand sourire, comme si leur présence était légitime. C’est là qu’un flash m’arrive en pleine tronche – on était censé se retrouver sur la plage pour profiter un peu de l’eau et du soleil, pour papoter un peu et se retrouver. Sauf qu’avec toute la fatigue qui m’a assommée, j’ai tout oublié. « Je…Merde, je vous ai oublié » Faut dire que vu ma tête, ils doivent vite comprendre qu’effectivement, je ne mens pas. « Entrez, entrez…je…hum… » Je me retrouve littéralement con : le ventre en vrac parce que je n’ai pas mangé, toujours dans de vieilles fringues et avec une sale tronche. Bravo le grand frère !
Je me lève de bonne humeur aujourd’hui, je pars du bon pied, sans mauvais jeu de mots. Je vais bientôt être débarrassé des béquilles, j’espère parce qu’elles commencent à m’agacer et à devenir pénible, mais je prends sur moi. Je prends aussi sur moi pour ne pas montrer à ma famille que je suis inquiet, que je ne suis pas vraiment bien ces derniers temps, l’avocat de mon père adoptif n’arrête pas de m’appeler, j’en ai parlé un peu avec Teddy l’autre jour. Je ne sais toujours pas si je vais aller le voir et je n’ai pas envie d’y penser pour le moment, je veux juste profiter de ma famille, de James et de Nova. On va pouvoir passer du temps ensemble c’est tout ce qui compte. On doit se retrouver à 15h chez James. J’ai profiter de la mâtiné pour aller à ma séance de kiné, j’ai mangé, j’ai fais une vidéo et je me suis préparer pour aller chez James et rejoindre Nova à notre point de rendez-vous. Je l’embrasse sur la joue lorsqu’elle arrive et je lui dis :
« Salut toi. »
Je lui fais un grand sourire, je suis ravi de la voir. j’adore ma petite sœur, elle est arrivée avant moi dans la famille, mais elle reste le plus jeune d’entre nous, c’est assez étrange n’est-ce pas ? Je me souviens encore de mon arrivé chez eux, ce n’était pas gagné, mais maintenant ça va beaucoup mieux. Je me suis détendu, adouci grâce à eux, ils m’ont montré que j’avais droit à une deuxième chance, d’avoir une chance d’être aimé. J’ai beaucoup de chance de les avoir. On arrive devant chez James et on sonne. Il arrive et nous ouvre, l’air surpris de nous voir. J’ai comme l’impression qu’il a oublié qu’on devait se voir aujourd’hui. Je suis inquiet pour lui alors je lui demande :
« Est-ce que ça va ? »
Question sans doute inutile, je vois bien que ça ne va pas. Je regarde Nova, peut-être qu’on aurait du l’appeler pour le prévenir qu’on arrivait. Il aurait eu l’air moins surpris.
« Est-ce que tu veux qu’on te prépare quelque chose ? »
J’ai entendu son estomac, je n’aime pas le voir dans cet état.
Une journée en famille c’est tout ce que j’aime. Passé du temps avec mes frères me fait beaucoup de bien au moral, me permet de souffler du stresse du boulot et j’ai tout simplement besoin d’eux. J’ai toujours été reconnaissante à mes parents de m’avoir adoptée et d’avoir fait de moi une enfant tout autant légitime que les autres, ce n’est jamais simple quand on n’est pas biologiquement lié à sa famille mais je sais que ça n’a pas d’importance chez nous. Je sais que je peux également être reconnaissante à la vie d’être en bonne santé quand je sais que ce n’est pas le cas pour tout le monde en ce moment et je suis là pour remettre un peu de soleil dans la vie de mes frères. Je me prépare assez vite avant de me rendre au point de rendez-vous où je retrouve Luke qui m’accueille avec le sourire. Je viens le serrer dans mes bras me mettant sur la pointe des pieds pour lui embrasser la joue à mon tour. « Hey frérot » Bizarrement Luke et moi on a assez vite matché quand il est arrivé, même si je suis sûr que pour lui j’étais la petite dernière chiante à coller les grands, parce que j’étais clairement comme ça. Mais j’aime Luke comme mon propre frère et il l’est devenu sans vraiment d’encombre. On se rend ensemble chez James qui ne semble pas avoir les yeux en face des trous. « Oh toi tu étais encore au lit je me trompe ? » Je viens embrasser la joue de mon grand frère quand Luke propose qu’on lui prépare quelque chose. « Je peux faire des crêpes si vous voulez ? » J’adore les crêpes surtout si je peux y mettre une tonne de chocolat, c’est peut-être la chose que je préfère dans le monde.
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Dim 25 Avr - 17:30
