Mouchoir abandonné dans l’espoir que l’autre ne fasse pas une esclandre au sujet de la violence de la police Los Angélienne, il s’éloigne de quelques pas, le temps de prévenir Leah qui a peut-être déjà commencé à préparer le repas. Sa fille ne met pas longtemps avant de décrocher et malgré la distance il entend la malice dans sa voix.

– Laisse moi deviner, demande-t-elle sans lui laisser le temps de la saluer, tu as reconnu un baron de la drogue évadé de prison et tu t’es retrouvé en pleine fusillade ?
– Comment est-ce que…
– C’est déjà partout sur Twitter papa !

Forcément, les réseaux sociaux, la plaie du XXIe siècle. L’information allait plus vite que la lumière, envahissait toutes les plateformes, les cerveaux, les complots. Si un jour Ethan se prenait une balle entre les deux yeux, il pouvait être certain que sa fille serait au courant avant même que ses collègues n’aille le lui annoncer. Et le moins qu’on puisse dire c’est que ça déformait tout, amplifiait les échos, inondant de ces fameuse fake news les plateformes. Bon, ce n’était pas toujours négatif, parfois les réseaux sociaux avaient également pu les aider à résoudre des affaires – il fallait croire certaines personnes assez bête pour ne pas imaginer que la police aussi traînait sur le net.

– Je suppose que je t’attends pas pour manger ? Dommage pour toi, j’avais fait des macaronis au fromage.
– Je suis désolé Leah, je me rattraperai ce weekend.
– Je suis chez maman ce weekend, on fête l’anniversaire de Barry.
– Ah oui, c’est vrai… alors le weekend prochain.
– Ok, mais pas samedi, j’ai une fête chez Olaf.
– Olaf ? C’est qui ce Olaf, tu ne m’en as jamais parlé ?
– Papa ! C’est pas le moment, là, tu as un rapport à remplir et mois des macaronis à sortir du feu.
– Hmm… On en reparlera. Oublie pas de faire tes devoirs ma chérie.

Il raccroche et range son téléphone avant de revenir au conducteur de taxi dont l’état ne s’est pas vraiment amélioré depuis qu’il s’est éloigné pour passer son coup de fil. Bon, ce n’est guère étonnant après tout, les miracles n’existent que dans les contes de fée. Heureusement les ambulances sont elles bien  plus efficace et Ethan lui tend une main pour l’aider à se relever histoire de se diriger vers les fameux véhicules, reconnaissables entre tous. Il ne semble pas vraiment content de laisser sa voiture derrière lui, surtout lorsqu’il lui parle du chargement dans son coffre – qui n’a pas l’air illégal, même si l’inspecteur se demande si le blessé n’est pas alcoolique sur les bords.

– Je suis navré, ça devra rester sous scellé le temps de l’enquête.

Un jeune urgentistes se précipite vers eux, coupant court à la conversation, l’inquiétude clairement lisible sur son visage – ok, l’ancien militaire a peut-être un peu sous-estimé la situation, mais au moins l’homme marche ce qui est déjà bien mieux que la plupart de ses anciens frères et soeurs d’arme qui n’étaient même plus capable de marcher et se contentait de se traîner pour tenter de s’éloigner des conflits. Au moins l’homme formé prend le relai et on ne pourra pas dire que Lively est responsable d’avoir laisser mourir un homme d’une hémorragie interne sur un trottoir. Il n’en reste pas moins qu’il espère que tout ça n’est pas très grave car au pays des procès à tour de bras, il est susceptible de s’en prendre plein la tête pour avoir blessé un civil, même si c’était dans le cadre de ses fonctions et dans le but d’arrêter un des hommes les plus dangereux de la ville.

– Vous voulez que je prévienne quelqu’un ? demande-t-il pendant que le patient et son médecin semblent occupés à se battre autour d’une absurde histoire de lunettes.

Cependant Ethan comprend mieux au moment où l’homme parle de célébrité. Non, effectivement, il ne serait pas de bon ton pour la police si les médias capturaient cette image – et il se ferait encore une fois tapé sur les doigts. Surtout qu’il ‘est pas très sûr que des lunettes de soleil suffisent à masquer son identité. Ces bêtises, ça ne marche que dans les films de super-héros avec Superman qui ne fait vraiment aucun effort pour dissimuler sa véritable apparence.

– Faites le monter dans l’ambulance. Vous le soignerez directement dedans.

Il y sera ainsi plus à l’abris des regards. L’urgentiste semble vouloir protester, mais un regard noir et intransigeant du policier l’en empêche. Clairement, il n’a pas son mot à dire dans tout ça, on n’attend simplement de lui un diagnostique et quelques points de suture.

– Il va falloir que je l’emmène à l’hôpital pour le recoudre et pour surveiller qu’il n’a aucune commotion.

Observant la compresse appuyée sur la tête du chauffeur en attendant pour atténuer le flot de sang, Ethan hoche la tête. Ça devient plus périlleux que prévu cette histoire, mais le témoin pourra toujours faire sa déposition demain… Il faudra qu’il fasse envoyer un bouquet de fleurs en tout cas pour s’excuser histoire de calmer le jeu en attendant.

– Très bien. Alors… je crois que nos routes se séparent ici. Je suis vraiment navré pour… tous les dégâts, mais la police prendre bien sûr tous les frais à sa charge. Je vous laisse entre des bonnes mains, on se reverra sûrement lorsque vous viendrez faire votre exposition de toute manière.

Qui aurait cru que conducteur de taxi pouvait être aussi risqué ?