C’est vraiment étrange comme sensation, de me retrouver ici, à l'hôpital, après ce que l’on vient de vivre avec Lou. Personne ici n’est au courant, pour notre mariage. Hormis Logan, j’imagine, mais ça reste dans la famille, donc ce n’est pas grave. J’ai tout de même eu le droit à des petites questions, vu qu’on a quitté la ville pendant deux jours. Mais maintenant, il est temps de reprendre notre vie, avec quand même une légère différence, qui fait que je ne peux m’empêcher d’être heureux, de sourire. J’ai comme l’impression que rien ni personne ne peut venir me gâcher ce moment. Tout est parfait et après les choses qu’on a vécu, elle et moi, on a de la chance d’être ici aujourd’hui, tout en étant uni jusqu’à la fin. Mais je dois aussi avoir l’esprit tourné vers le travail, car c’est aussi très important. Surtout qu’aujourd’hui, les urgences sont un peu rempli, pas vraiment le temps de trainer. Une aide-soignante vient me voir pour me dire qu’on a besoin de moi, pour une consultation. J’arrive sur place et je tombe sur Lou. “Docteur Falcone.” tout en lui souriant, évitant de révéler notre petit secret. “Tu m’as demandé ?”

Depuis notre mariage, je vivais sur un petit nuage. J'avais un peu de mal à réaliser ce qui était arrivé mais dans un autre sens, je savais que j'avais enfin réalisé un de mes rêves ; épouser l'homme de ma vie. Enlever mon alliance à chaque début de garde n'était pas chose facile mais pour l'instant, il valait mieux que notre petit secret en reste un. Cela ne regardait personne et autant Luke que moi n'aimions pas spécialement nous épancher sur notre vie personnelle. Aujourd'hui, j'avais été affectée aux Urgences et je devais bien reconnaitre que ma présence n'était pas de trop. Les gens grouillaient dans tous les sens et les infirmières étaient rapidement débordées. Je faisais en sorte d'être le plus efficace possible mais c'était parfois compliqué étant sollicité de chaque côté en permanence. J'avais fait appeler Luke pour qu'il vienne en renfort. Au delà d'être désormais mon mari donc une présence rassurante, il était aussi un excellent médecin. « Docteur Ross. » dis-je en souriant avant de lui tendre un dossier. « Oui au bloc 4, j'ai besoin de ton avis. Je dois m'occuper du patient du bloc 3 en attendant. » Je passais à côté de lui en gardant ce petit sourire charmeur et allai vers l'espace, appelé bloc 3, réservé au patient. Je me stoppais net en voyant près de la porte, un homme blessé par balle avec une arme en main. Comment avait-il passé l'entrée et les contrôles comme ça ? Je regardais autour sans pouvoir appeler quelqu'un à l'aide. « Ferme là et soigne moi ! » m’ordonnait-il en attrapant mon bras pour qu'on entre dans le fameux bloc.

Je comprends pourquoi on m’a demandé de vite venir aux urgences. Il y a du monde partout, chaque lit est occupé. C’est un peu la panique, situation de crise, que je vais devoir gérer, car je suis responsable de cet endroit. En me dirigeant vers la salle 4, je donne des directives, pour garder une certaine cohésion et que les patients n’attendent pas pour être traités. “Appelez la banque du sang, on va avoir besoin d’un gros stock ! Et bipez les chirurgiens qui ne sont pas de garde, on a besoin d’un maximum de personne ici.” Je rentre dans la pièce pour tomber sur une personne qui est blessé au niveau de l’estomac. Avec ce que j’ai eu l’occasion de voir à l’armée, je reconnais très vite une blessure par balle. “La balle n’est pas passée de l’autre côté. Je vais avoir besoin d’un scanner, on se rejoint là-bas.” Je sors rapidement de la salle pour revenir sur mes pas, voulant prévenir Lou que je risque de partir pour une opération, mais elle n’est plus là. Je demande à une infirmière qui me dit qu’elle vient de rentrer dans le bloc 3. Je regarde mon téléphone tout en me dirigeant là-bas et ouvre la porte, avant de relever la tête. “Qu’est-ce que…” Je commence à paniquer. Dans un sens, je comprends maintenant pourquoi les blessures par balle, mais je n’arrive pas à garder mon calme quand je vois ce mec qui pointe une arme sur ma femme. Mais qu’est-ce qui se passe ?

J'étais venue au travail après une matinée assez étrange et je pensais pouvoir me vider la tête avant de repenser à tout ce que j'allais devoir affronter d'ici peu. Je ne voyais pas les choses d'un aspect négatif au contraire, mais j'oscillais entre le stress et l'excitation ce qui ne faisait pas toujours bon ménage chez moi. Cela dit, jusque là, j'étais plutôt de bonne humeur, totalement prête à affronter ma garde, les patients, mes collègues mais... pas un tueur. Il venait de me forcer à entrer dans le bloc 3 et je commençais à ressentir un sentiment que je ne connaissais pas. J'avais peur qu'il me fasse du mal, qu'il brise tout ce pourquoi je m'étais battue depuis toujours, qu'il me tue dans un excès de colère ou de douleur. « Je vais vous soigner mais s'il vous plait baissez votre arme. » dis-je en mettant mes mains légèrement en avant. « Enlève moi cette balle et peut-être que j'te laisserai en vie ! » Je prenais une compresse en tremblant faisant tomber un scalpel au passage et je me tournais rapidement en entendant la voix de Luke. « Putain dégage ou je la bute ! » criait-il en m'attrapant pour me maintenir par le coup, arme sur la tempe. « Arrêtez s'il vous plait arrêtez... » me plaignais-je totalement terrorisée par cet homme qui était complètement fou et excessif dans son comportement. Je n'avais jamais fait face à ce genre d'attitude mais je savais que Luke, lors de ses missions, avait pu voir des gens de ce style, des forcenés prêt à tout pour sauver leur peau quitte à tuer des innocents.

J’ai un frisson, qui vient parcourir tout le long de mon échine. Je ne suis pas du genre à avoir peur, de quoi que ce soit. Mais là, pour le coup, je dois l’admettre, je suis terrifié. Pas réellement par l’homme en face de moi, qui tient une arme. Ca encore, j’arrive à prendre sur moi, car c’est quelque chose que j’ai déjà vu, déjà vécu. Mais ma femme, non, ça ce n'est pas possible. Je ne peux pas garder le contrôle, j’ai l’impression que je vais exploser. J’en deviens presque sanguin. Tout ce que je veux, c’est lui sauter dessus et le démolir, pour avoir juste osé agressé Louanor de cette façon. Mais je ne suis pas idiot, je sais très bien que je peux rien faire. “On se calme, pas besoin de s’énerver.” J’ai encore mon téléphone dans la main, mais instinctivement, je sais que je ne dois pas le garder. “Regardez, je laisse tomber mon téléphone, je ne bouge pas d’un pas.” Si on m’a appris une chose, dans l’armée, c’est que dans ce genre de situation, il faut toujours aller dans le sens de l’agresseur, pour le calmer, pour essayer de trouver une solution. “Écoutez, je vois que vous êtes blessé. Je peux m’occuper de vous, si vous le souhaitez. Elle ne peut pas le faire, ce n’est qu’une infirmière, elle ne peut pas opérer quelqu’un.” Je viens bien entendu de lui mentir, mais ça, il ne le sait pas, c’est un bon moyen pour qu’il la laisse un peu et qu’il me vise moi, ce que je préfère. “Laissez-moi vous aider.” Je n’ai toujours pas bougé et j’attends de voir sa réaction, mais j’avoue que je ne suis pas tout serein à l’idée de voir l’amour de ma vie dans cette situation sans pouvoir l’aider.

Je ne savais pas si j'étais rassurée que Luke nous ait rejoins. A vrai dire, maintenant, nous étions tous les deux en danger et je refusais qu'il puisse lui arriver quelque chose. Cet homme était clairement fou et j'avais appris avec le temps qu'il n'y avait pas plus dangereux qu'une personne qui n'a plus rien à perdre. C'était exactement ce qu'était cet homme et même si je devais me contenir pour ne pas trop exposer mon angoisse, j'étais consciente que la situation avait une chance sur deux de mal finir. « Bouge pas ! » continuait-il avant de relâcher légèrement sa prise quand Luke l'informait que je n'étais qu'une infirmière. Il tentait de le manipuler pour me sauver. Bon sang que j'aimais cet homme. « D'accord, tu me soignes mais elle reste là et... et si tu fais de la merde je la bute c'est clair ? » Il me poussait légèrement sur le côté sans pour autant arrêter de me viser avec son arme et il faisait signe à Luke de le soigner. « Luke... » gémis-je légèrement alors que le voir s'approcher de ce type me faisait peur. Il allait avoir mal, c'était une évidence au vu de son état et j'avais peur qu'il s'en prenne à son médecin et donc à mon mari. « Luke ? Les infirmières elles appellent pas les médecins avec leur putain de nom pompeux ? » J'avais du mal à déglutir et ma gorge était soudainement plus que sèche. « On travaille ensemble depuis longtemps... » me défendais-je en regardant Luke aka Docteur Ross.

Il faut croire que notre bonheur n’aura pas duré bien longtemps. Depuis notre mariage, j’avais la chance d’être sur un petit nuage, d’être enfin heureux, depuis mon retour de l’armée. Depuis ce traumatisme. Mais j’imagine que le karma est toujours juste et il vient frapper quand il le faut. Mais j’avoue que j’aurai vraiment préféré quelque chose de bien moins violent. Certes, je suis capable d’encaisser cette situation, mais je n’imagine même pas ce qui doit se passer dans la tête de Lou. “Je ne bouge pas, restez calme, on peut très bien régler cette situation sans arriver au drame.” Car le drame est si vite arrivé, avec ce genre de personne. En le voyant, arme au poing, totalement désespérer, ce n’est pas difficile de comprendre qu’il ne doit pas avoir grand chose à perdre. S’en prendre à des innocents, sans aucune raison, ça n’a pas de sens. Et je vois que mes paroles commencent à avoir de l’effet. C’est une bonne chose, tout ce que je veux, c’est sortir celle que j’aime de cette situation, même si c’est moi qui dois prendre une balle. “D’accord, d’accord… Je vais m’approcher doucement. Je garde les mains levées. Vous pouvez pointer votre arme sur moi, si vous voulez être sûr que je vais écouter.” Tant bien que mal, je veux qu’il évite de pointer son arme sur elle. Je m’approche alors de lui, très calmement, sans faire de geste qui pourrait le brusquer. J’attrape une paire de gants, sur la table juste à côté, que j’enfile sur mes mains. “Elle est dans mon service depuis très longtemps donc on se connaît, c’est pour ça.” Je me retiens, de toutes mes forces, car j’ai juste envie de lui sauter dessus et de le démolir. Mais je ne peux pas, je ne peux rien faire tant qu’elle est ici, à côté de moi. “Je vais devoir découper votre haut pour voir l’endroit ou vous êtes blessé. Je peux commencer ?”

J'étais tétanisée et je ne pensais jamais ressentir un tel sentiment. J'avais l'horrible sensation que mes jambes étaient du coton et que quoi que je puisse faire, mon corps et mon cerveau étaient totalement déconnecté. J'avais déjà eu a faire à des situations de stress extrême, de crises même mais jamais je ne m'étais retrouvée avec une arme pointée sur moi. « Ok approche doucement ! » ordonnait-il alors qu'il relâchait la pression qu'il exerçait jusque là sur mon corps. Je regardais Luke en coin sans savoir quoi faire et il me semblait plus logique de ne pas bouger pour l'instant. « Elle va le faire ! » grognait-il en secouant son arme pour me montrer. J'inspirais lentement avant de m'approcher bien que j'étais déjà assez prêt à mon gout et je lui découpais le bas de son tee-shirt pour voir la plaie. Elle était affreuse, il allait souffrir le martyre si on le soignait sans anti douleurs ou même sans anesthésie. « Vas y soigne moi et si tu fais un truc de travers, je la bute c'est compris docteur Luke ? » Il prenait une voix provocante et je me demandais d’où il puisait encore cette force. Il aurait probablement du tomber au sol inconscient avec une balle dans le ventre comme il avait, ou alors le fait qu'il ne soit pas sobre de produits stupéfiants jouait en sa faveur. « Je... Je pose mes mains là, je ne fais rien... » Au fond, je préférais qu'il me vise moi plutôt que mon mari qui était entrain de le soigner. Après tout, dans son état, une douleur de trop et il pouvait tirer et je refusais qu'il blesse Luke. Je le regardais faire ne sachant plus à quel rythme battait mon cœur ou s'il battait encore.

Pourquoi est-ce que ça nous arrive, à nous deux ? Il faut croire qu’on a pas le droit d’être heureux. Peut-être que le karma me fait comprendre sa façon qu’il est juste et toujours présent, que je ne dois pas me reposer sur mon bonheur. Mais quand même, pour en arriver là, je ne sais pas si c’est vraiment quelque chose qu’elle et moi, on mérite. Comme convenu, je m’approche de lui, sans faire de geste qui pourrait le brusquer. Je reste calme, malgré la situation, pour faire en sorte de la sortir de tout ça. Au pire, si je dois me retrouver tout seul dans cette salle avec lui, ce n’est pas très grave, mais je veux au moins que Lou soit en sécurité, loin de lui. “D’accord, elle va le faire, je reste ici.” Je la regarde, qui découpe le tissu autour de la blessure. Je sais très bien qu’elle ne doit pas du tout être à l’aise ici. Qu’elle doit avoir vraiment peur. Ce n’est pas tellement mon cas, car c’est quelque chose que j’ai déjà vu, on m’a appris à réagir à ce genre de situation. Mais tout de suite, avec sa femme dans la même pièce, ça change tout. J’ai envie de jouer au héros, mais je sais que ce n’est pas une bonne idée. Encore plus quand il me dit qu’il va la tuer si je fais quelque chose de travers. Je m’approche un peu plus de lui et je regarde la plaie, qui ne m’inspire vraiment rien de bon pour la suite. “La balle est toujours à l’intérieur. Ce n’est pas bon.” Je commence à approcher mes mains de la blessure, mais je sais très bien qu’au moment ou je vais commencer, il va avoir mal, il va hurler. “Je préfère vous prévenir, si je ne fais pas au moins une anesthésie locale, vous risquez de souffrir. Vraiment souffrir.” Je tourne le visage, pour regarder Louanor, qui dans son coin, semble de plus en plus terrifiée. Puis, plein de confiance, je décide de le provoquer un peu, uniquement pour la défendre un peu plus. “Vous savez qu’au fond, votre arme, elle est mieux pointé sur moi. Entre nous deux, ce n’est pas elle qui représente une menace pour vous.” Avec un peu de chance je vais attirer un peu plus son attention sur moi et il va changer de cible avec son arme. J’ai vraiment l’impression que cette situation va encore durer un petit moment.

Je regardais Luke en coin avant de découper son tee-shirt. Je n'étais pas très à l'aise mais peut-être que si je l'avais trop été, il n'aurait pas cru que j'étais une simple infirmière, allez savoir ce qui se passait dans la tête de ce type. Je tentais de garder une respiration simple mais j'avais du mal à me contenir. Luke gérait son calme à la perfection et je me doutais que ses années dans l'armée devait grandement l'aider. « Ouais fais un truc local là... vas-y mais si tu m'endors ou que tu me shootes, je la flingue ton infirmière ! » disait-il en posant son arme sur moi. J'ouvrais de grands yeux en entendant Luke le provoquer. Pourquoi faisait-il cela ? Au fond, je le savais un peu... Il voulait me protéger quitte à le soigner avec une arme planter sur la tempe. Je n'étais bien sur pas d'accord avec ça mais je ne pouvais rien dire, rien faire, pas même bouger. « J'peux toujours la buter et ensuite pointer mon arme sur toi, ça t'irait comme scénario ça ? » Il ricanait légèrement en faisant mine de me tirer dessus. Je sentais la pression monter et je n'avais qu'une envie, enfoncer mes doigts dans sa plaie pour le faire souffrir. « S'il vous plait ne faites pas ça... Je... Je suis enceinte. » dis-je prise de panique. C'était la pure vérité, du moins d'après le test de grossesse que j'avais fait récemment... peut-être qu'une prise de sang aurait été légitime pour être certaine de ce que j'avançais mais j'espérais au moins que l'idée de tuer deux personnes dont un foetus le calme. Je regardais mon mari, pas vraiment heureuse de lui apprendre la nouvelle comme ça mais au moins, l'homme avait baissé son arme. Il semblait hésiter, voir même être confus mais il se reprenait et pointait son arme sur Luke désormais attendant qu'il ne lui enlève cette balle.