Je me plonge dans mes souvenirs avec aisance. Dans ces quelques mois avant que tout ne parte en fumée, avant que nous ne perdions le contrôle de nos vies et de notre couple. Une ignorance qui nous allait. Une bénédiction à laquelle nous étions accrochés et qui nous revient doucement. Très lentement, je la retrouve, prêt à prendre le temps qu’il faudra pour être sûr qu’elle est prête pour ça. Qu’elle est prête pour nous. Sauter dans ce souvenir, prendre le risque de laisser le désir me dévorer, je le fais uniquement pour la brune comme je ferais n’importe quoi pour elle. Peut-être que de cette façon elle prendra d’autant plus conscience de l’importance qu’elle a ? Oliana m’est précieuse, plus que n’importe qui d’autre au monde, plus que ma propre vie. C’est de l’amour à l’état pur, beau mais aussi dangereux. Je pourrais facilement me brûler les ailes par amour pour elle, je n’aurais pas le moindre regret. Pas plus que j’en ai en prenant le risque de parler d’une des nombreuses fois où nous avons fait l’amour dans un endroit insolite et absolument pas conçu pour ça. Nous avions adoré et je me souviens encore d’elle me demandant une piscine peu importe l’endroit où nous irions pour notre lune de miel. Ça paraissait si accessible à l’époque. C’est lointain désormais, ainsi que notre mariage. Ma poitrine se compresse en y pensant, je ne m’arrête pas pour autant. Je ne lui donne pas tous les détails, j’en donne toutefois assez pour éveiller du désir chez elle comme chez moi. Oliana à cette façon de se tendre lorsqu’elle en a envie qui ne m’a jamais échappé. De mon côté il est nettement plus difficile de cacher l’attirance brute que j’ai pour elle. Sortir de la piscine va s’avérer plus tendu que prévu. Je m’en doutais. A l’instant où j’ai vu sa silhouette, son corps caché sous sa serviette, j’ai su que j’allais me faire du mal. Une douleur malgré tout agréable, y compris lorsqu’elle gémit doucement et embrasse ma peau humidifiée par l’eau chlorée. « Merci… » Je réponds par un sourire. Ma voix risque d’être enrouée à cause du désir et il me faut faire un effort presque surhumain pour ne pas l’embrasser immédiatement. « Ollie, fais une pause maintenant. Ramène-le vers le bord. » Oswald semble avoir un don pour intervenir au bon moment. Nous ne nous détachons pas tout de suite l’un de l’autre, pas avant que je ne puisse me tenir au bord de la piscine et ainsi éviter de couler. Mais je n’ai d’yeux que pour elle qui flotte dans l’eau. « Ça tire ? Bien, c’est que ça a autant travaillé pour Cameron. Cameron fait tes exercices de bassins, Ollie a mérité une petite pause » Mon amie parle mais je n’écoute que d’une oreille. Mon regard fixe l’endroit où Oliana a coulé et où elle remonte à la surface, fascinée par ce qui pourrait être une magnifique sirène. Oswald semble le remarquer puisque me demande : « T’y arrives où t’as besoin d’un accompagnement ? » alors qu’elle connait la réponse. « A ton avis ? … » Marmonné-je ce qui fait rire Oswald. « Ta pause est finie, tu peux l’aider ? » Je boude comme un gamin alors que je suis celui qui réclame cette aide dont je n’ai pas besoin. Je veux simplement sentir encore ses mains sur moi. « Je crois que je suis drogué à ta présence. » Je confie à Oliana une fois près de moi et en veillant à ce qu’elle soit la seule à l’entendre tandis qu'elle repose ses mains sur mes hanches.

Un vrai gamin ! En train de bouder dans mon coin dès qu’Oswald se met à rire, je me retiens de lui répliquer que si je veux Oliana aussi proche de moi c’est uniquement de sa faute. C’est elle qui a voulu jouer l’entremetteuse, qui nous a mis tous les deux dans cette situation, elle devrait comprendre que maintenant je n’ai pas du tout envie de voir la brune s’éloigner. Depuis Noël nous nous retrouvons plus que jamais. Cette seconde chance à laquelle je ne croyais plus semble enfin arriver et je me jette dessus de peur qu’elle ne me glisse entre les doigts. Je ne supporterai pas de la perdre une nouvelle fois, nous le savons l’un comme l’autre. Certains pourraient dire qu’il n’y a aucune raison mais Oliana et moi en connaissons au moins une. Celle que nous avons soigneusement évité pendant des années tout sachant qu’elle était là, silencieuse mais ravageuse. Son cœur pourrait lâcher définitivement. Il pourrait décider de me l’arracher sans crier gare. Lui mentir, la protéger de la douleur due à sa perte de mémoire, c’était pour préserver son cœur et la garder en vie. De l’égoïsme dont je ne peux pas totalement m’excuser. Je tiens trop à elle, l’aime beaucoup trop, pour accepter ce que je sais pourtant depuis des années. Alors cette chance qui s’offre à nous, je ne peux pas la laisser passer, y compris lorsqu’il s’agit seulement de l’avoir près de moi pour ma séance de rééducation. Oswald lui demande si elle accepte de m’aider et Oliana ne se fait pas prier. Face à elle, ses mains qui descendent le long de mon torse pour retrouver mes hanches me font frissonner. Il n’y aurait pas eu Garrett et Oswald, je n’aurais pas donné cher de notre résistance. Il me suffit de croiser son regard pour savoir qu’elle en a autant envie que moi. Parler d’un souvenir charnel n’a pas aidé et la bosse dans mon short de bain non plus. « Je suis droguée à la tienne. » Sourire au coin des lèvres, ces mots m’apaisent, me rassurent. J’aime le fait de la retrouver et de la voir laisser tomber ses barrières. J’adore que nous nous lancions une nouvelle fois dans notre relation. Un retour à zéro qui fera de notre histoire quelque chose de plus beau, je n’en doute pas. « Qu’est-ce que je dois faire ? » Patient, je lui explique les gestes qu’elle doit m’aider à effectuer. Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que je n’avais pas besoin d’elle – si elle ne l’avait pas encore réalisé. Le bas de mon dos me tire, comme mes hanches, je prends ça comme une preuve que ça travaille et tente de m’accrocher à l’idée que tout ce travail n’est pas inutile. Cela dit, je n’ai d’yeux que pour elle malgré l’automatisme de mes mouvements. « Je vais rêver de toi cette nuit. Comme à chaque nuit. » Me confie-t-elle, son visage niché dans mon cou, son souffle chaud me faisant frissonner autant que ce qu’elle vient de me dire. « Je n’ai jamais cessé de rêver de toi. » Admis-je à mon tour. Je ne cesserai jamais de le faire. Oliana est ma raison de vivre. Nous étions faits pour nous trouver et pour nous aimer. Je n’ai pas été certain de grand-chose dans ma vie, mais ça c’est une certitude qui ne quittera jamais.